La clé du mystère

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Rassuré, le couple comprit que l'enquête prenait soudain une toute autre direction et que la théorie d'un complot visant à les incriminer devenait tout à fait plausible.

La police se concentrait à présent sur cet homme que plus personne n'avait vu après la traversée. Il se serait volatilisé entre l'appareillage et la signature du tout premier registre.

Les enquêteurs, qui passèrent la journée sur l'île, étudièrent attentivement les scènes de crimes, recueillant des indices, collectant des témoignages et autres renseignements.

C'est plein à craquer que le bateau regagna le continent au soleil couchant. Se mêlaient alors dans un espace relativement confiné, policiers, randonneurs, suspects, corps des victimes, documents et preuves potentielles en tous genres.

N'ayant pas retrouvé le mystérieux suspect, certains policiers restèrent sur place et continuèrent les investigations.

A terre, les randonneurs furent de nouveau auditionnés pendant près de trois jours.

Pendant ce temps là, sur l'île, les recherches ne donnaient rien et le suspect numéro un restait introuvable. Chaque habitation, chaque recoin avait été passé au peigne fin, sans grand succès. Les crimes, toutefois, avaient bel et bien cessés.

Faute de preuves, les fonctionnaires de police ne purent contraindre les randonneurs à rester plus longtemps dans la région.
C'est alors que le couple sauta dans le premier bus venu et c'est à ce moment précis de leur aventure que je les rencontrais.

Leur récit étant à présent terminé, je comprenais alors leur nervosité et leur hâte à quitter définitivement le Vieux Continent.

Le bus pour l'aéroport à peine arrivé, ils se précipitèrent pour y monter.

Alors qu'ils s'apprêtaient à franchir la porte du véhicule, ils se retournèrent vers moi, me jetant tous deux un dernier regard qui, sans réellement comprendre pourquoi, me donna froid dans le dos.

Poursuivant mon voyage, je finis par oublier cette rencontre peu banale.

C'est par hasard, quelques semaines plus tard, alors que je m'attardai à la terrasse d'un café d'une charmante petite ville portuaire, que je lus dans un journal un article qui m'interpella.

On y parlait d'une série de meurtres commis sur une île voisine, connue pour sa météo des plus capricieuse. Le journaliste relatait alors des faits qui m'étaient familiers. En effet, ils correspondaient en tous points au récit des jeunes américains rencontrés un soir, au détour d'une gare routière.

Ce même article mentionnait également l'identification formelle du corps d'un homme qui avait été remonté dans des filets de pêche quelques jours auparavant.

Parcourant chaque paragraphe attentivement, on y faisait alors le lien entre les assassinats des habitants de l'île, le cadavre repêché et le suspect qui n'avait jamais été retrouvé. La police confirmait qu'ils étaient parvenus à identifier la victime et qu'il s'agissait de l'homme recherché pour meurtre.
Selon leurs premières constatations, l'homme aurait tenté de fuir l'île à la nage et aurait été emporté par les courants de l'océan déchaîné.
Son corps se serait par la suite coincé dans les filets dans lesquels on l'aurait retrouvé.

Alors que je terminais la lecture de l'article qui semblait apporter un point final à cette histoire des plus singulières, un serveur s'approcha de ma table pour prendre ma commande.
Son regard s'attarda quelques secondes sur le journal que je repliais soigneusement.

Il engagea alors la conversation sur ce qui semblait être le fait divers du siècle pour les habitants de la région.

Il me confia alors qu'il y avait un petit détail important que la police et la presse n'avait pas divulgué.

En effet, se trouvant être le cousin du médecin ayant autopsié le corps du noyé, il aurait fait part de ses conclusions à l'ensemble de sa famille à l'occasion du dernier repas dominical (de toute évidence, celui-ci n'avait pas fait grand cas du secret médical):
L'homme retrouvé ne serait pas mort noyé. En effet, il n'avait pas d'eau dans les poumons ou très peu, ce qui excluait totalement la noyade évoquée dans le journal.

La véritable cause du décès serait un coup asséné violemment à l'arrière du crâne.

Il aurait donc lui aussi été assassiné.

Et c'est sans le savoir que ce serveur allait m'apporter la clé du mystère qui entourait toute cette affaire.

Tout en prenant commande de mon petit-déjeuner, il ajouta qu'il connaissait même la date du décès établie par le légiste.

Celui-ci aurait perdu la vie le samedi 23 mars. 

De mystérieux randonneurs  (+ audio)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant