Disparue sans raison.

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J'écris pour la première fois dans ce journal ; elle m'a dit d'écrire ce qui me passe par la tête. Je ne sais pas quoi dire,mais elle  dit que ça peut me délivrer. Les nombres se bousculent dans ma tête. Aujourd'hui, nous somme le ... Je ne me souviens plus de la date exacte, je me rappel juste de l'année. 2075. J'ose enfin mettre des mots sur mon histoire. L'histoire d'une vie, ma vie, un énorme secret qui empiète sur ma longue existence, dont je vais enfin me délivrer. Les souvenirs s'embrouillent dans ma tête. Tout en moi se bouscule, une date, un nom, un lieu, un visage, une forêt, un village, des cris, des pleurs, un sentiment plus fort que la peur. Tout me revient. Je me souviens. J'ai peur d'en parler. Je dois me délivrer. Alors commençons par le commencement.

Je m'appelle Maria Melidia, mais tout le monde m'appelle Mari. J'ai vécu une grande partie de mon enfance dans un petit village caché dans les hautes montagnes de Roumanie. Je partageais ce petit coin de paradis avec mes parents et ma sœur, Moa. Tout était parfait. On ne manquait de rien. Avec ma sœur, on passait notre temps dans la foret tout près du village. Tout le monde racontait qu'elle était hantée par des êtres malfaisants, dangereux, et néfastes pour quiconque osait s'en approcher. Encore de vieilles histoires pour terrifier les enfants. Mais c'était notre petit coin de bonheur, nous n'en avions pas peur. On s'inventait des histoires merveilleuses, cela rendait cet endroit extraordinaire.

Et puis un jour, je me souviens encore, il pleuvait énormément, et ce d'une manière anormale, la pluie nous avait surprises  alors que nous jouions dans les bois. Une partie de cache-cache était en cours. Moa était beaucoup plus forte que moi à ce jeu-là. Elle trouvait toujours les meilleures cachettes et je passais toujours des heures à la chercher. Et à la fin c'est elle qui me surprenait en m'effrayant, et en bondissant devant moi. Mais ce jour-là, elle n'était pas décidée à se montrer, je lui criai alors :« - Moa, il pleut, j'ai froid, viens, on rentre ! ». Seul mon écho retentissait, il semblait me narguer. Je commençai sérieusement à avoir peur, je sursautais à chaque bruit. Le bruit de la pluie et de l'orage étaient tellement forts que je n'entendais ni mes pleurs, ni ne sentais les larmes qui roulaient le long de mes joues froides. Un sentiment de danger m'oppressait.

Les gouttes d'eau tombaient par dizaines sur la peau de mes bras nus. Il faisait pourtant chaud en début d'après midi. Maman, qui nous avait vu sortir de la maison, nous avait pourtant dit de prendre une veste mais je ne l'avais pas écoutée, et Moa avait fait de même. Maintenant, je grelottais, j'avais peur pour Moa. Nous n'avions jamais eu un orage aussi fort, une pluie aussi dru. Le tonnerre grondait de plus en plus fort. La foudre s'abattait de part et d'autre de la montagne, se rapprochant de plus en plus de l'endroit où je me trouvais. Je sentais le sol qui semblait trembler sous l'impact de la foudre, puis plus rien. Les gouttes de pluie s'immobilisèrent, comme en suspension. Un sourd grondement monta brusquement des profondeurs de la forêt. Un hurlement retenti. Je ressentis alors une forte douleur à la poitrine, la douleur d'une fatalité, d'une perte :Moa.

Je me souviendrai toujours de ce cri si familier et pourtant inhumain. Le grondement retentit encore plus fort, amplifié par un écho. Une lumière blanche monta des profondeurs de la forêt. Je me couvris les yeux de mes bras grelottants, cette lumière me les brûlait. J'avais vraiment peur, tétanisée je ne pouvais avancer. Je ne sais pas ce qui se passa à ce moment mais je me retrouva à terre, je ne me souviens pas avoir trébuché mais j'étais tombée, c'était évident. Devant moi, tout était dédoublés, que m'arrivait-il ? Je me rendis compte que des larmes embuaient mes yeux. Je me redressai,la pluie avait recommencé à tomber, toujours plus fort, et le hurlement retentit de nouveau.

La peur me saisit la poitrine et contre ma volonté, je me mis à courir dans la direction inverse de ce cri. Il ne pouvait signifier rien de bon. Je sentais que s'il m'atteignait, quelque chose d'horrible allait se produire. Je ne voulais pas m'enfuir, je devais retrouver ma petite sœur mais la peur, ce sentiment si fort, propulsa mes jambes toujours plus loin. Les branches fouettaient mon visage.J'avais honte, mais surtout peur. Plus je courais, plus je voulais revenir en arrière. Son cri résonnait encore en moi, je pensais à elle. Elle devait être frigorifiée, seule et effrayée dans cette forêt, face à je ne sais quoi, ou je ne sais qui.

Moa et moiWhere stories live. Discover now