Métamorphoses

32 0 0
                                    

Editeditions

2058.

À la suite de catastrophes écologiques, de guerres et de tragédies humanitaires planétaires, seule une petite partie de la Terre est encore habitable.

Sur cet îlot de civilisation ultra-sécurisé, une centaine de milliers d'humains « augmentés », ou post-humains, ont établi une société où la maladie, le handicap, la pauvreté ont été vaincus grâce à la science.

L'intelligence artificielle, la cybernétique, la technologie et les progrès de la médecine ont permis de créer ce petit monde stable, sans conflits, dans lequel règnent l'harmonie et le bonheur collectif et individuel.

Mais récemment des phénomènes inquiétants se sont produits, qui intriguent au plus haut point les membres du Haut Conseil Scientifique.

Franz Vanberg, le doyen, ne cache pas son désarroi face à son confrère et ami Juan Samsa, généticien.

- Pour l'instant, ce que nous savons doit faire l'objet de la plus grande discrétion et de la plus grande prudence. Il faut à tout prix éviter que des informations se répandent dans les médias.

Juan fait défiler les hyper-hologrammes dynamiques relatifs aux cas répertoriés.

Première constatation, leur fréquence suit une courbe exponentielle.

Six nouveaux cas sont apparus au cours des treize derniers jours, portant le total à vingt-trois en sept semaines.

Des créatures inconnues dotées de multiples membres, au dos en forme de carapace, aux gueules béantes remplies de crocs pointus, aux yeux à facettes pareils à ceux des mouches, surgissent de l'ombre puis disparaissent après avoir parcouru quelques centaines de mètres en pleine nuit dans les rues désertes de la ville.

Les systèmes de surveillance ont capté leurs images, leurs émanations chimiques, thermiques, détecté une foule de données, collectées et analysées par les ordinateurs du Centre d'Études, sans aboutir à aucune conclusion rationnelle.

Tout reste énigmatique.

Après une nuit agitée de cauchemars, je me suis réveillé ce matin croyant que je rêvais encore, jusqu'à ce que je me rende compte que ce corps épouvantable que je voyais en relevant la tête était bien le mien.

Quatre bras et quatre jambes s'agitaient de chaque côté de mon abdomen bombé, qui n'était plus couleur chair mais gris foncé et luisant.

J'essayai de me lever, mais mon dos étant arrondi comme une carapace, à force de remuer, je basculai et j'atterris comme un insecte sur ses pattes.

Aussitôt que je pus me mouvoir, j'avançai prodigieusement vite et, arrivé face au mur, je me surpris à continuer ma course à la verticale, jusqu'au plafond, puis me retrouvai la tête à l'envers et redescendis par le mur opposé.

Je dis « ma tête », mais son aspect, que je découvris bientôt avec horreur dans un miroir, n'avait plus rien d'humain.

Il m'avait bien semblé que, depuis mon réveil, je voyais ma chambre d'une manière totalement différente : je parvenais à appréhender ce qui m'entourait dans toutes les directions à la fois, mon champ de vision s'était élargi à 360 degrés, et pour cause : lorsque je vis mes yeux, qui n'étaient plus au nombre de deux mais de six, je poussai un hurlement terrible.

Heureusement que ma femme était déjà partie au travail, je voulais à tout prix lui épargner le spectacle hideux de ma nouvelle apparence.

À la place de ma bouche, une gueule effrayante pourvue de plusieurs rangées de crocs pointus.

ThreadOù les histoires vivent. Découvrez maintenant