Surtout, ne pas bouger. Il faut être très précis. Je n’ai pas envie de tout recommencer. Une goutte. Ok, pas de réaction. Deux gouttes. Le mélange fait des bulles et s’obscurcit. Par acquit de conscience je feuillette mon carnet de ma main libre. D’accord, tout est normal, on continue. Trois gouttes, quatre, cinq. On sonne à la porte. Je stoppe net mon geste. J’ai perdu le compte. Bordel !
D’agacement je jette la pipette et renverse le bécher du revers de la manche. Le liquide se répand sur le bois en grésillant. Je hausse les sourcils. Tant pis pour la table.
- « Zoey, si c’est toi, je t’ouvrirais pas !
J’ai crié, j’espère que cette idiote m’entendra et que je n’aurais pas à me lever. Elle est plus têtue qu’un âne et serait capable de camper devant ma porte. Mes yeux parcourent le plan de travail et je soupire. Génial, tout est à refaire. Je serre les poings à m’en faire blanchir les phalanges pour calmer les tremblements qui les parcourent.
- C’est pas Zoey. Ouvre-moi avant que je défonce cette porte.
D’accord, donc c’était pas Zoey. Je vais vraiment devoir me lever. Je repousse la chaise et mon regard balaye la pièce. Il y a des papiers froissés et des produits chimiques dans toute la cuisine. Je rangerais plus tard. Je m’arrête sur l’horloge quelques instants. Il est midi passé, ça explique la luminosité insupportable qui filtre par les rideaux. J’ai dû rester éveillé toute la nuit. Bah peu importe. J’attrape la robe de chambre qui traîne sur le canapé et l’enfile. Si je laisse Shin, si ce n’est pas Zoey c’est forcément Shin qui est là, voir mes bras il va me prendre la tête un bon moment et je pourrais abandonner l’idée de le faire partir rapidement pour pouvoir recommencer ce que je faisais.
Bien sûr, j’avais raison, quand j’ouvre c’est Shin qui me fixe avec son air circonspect. Il me tend un sachet en papier de la boulangerie du coin. Agacé, je lui prends des mains.
- J’ai pas besoin d’un chaperon Shin… Allez dépêche, tu fais rentrer le froid.
Je me décale de mauvaise grâce pour le laisser passer. Je n’ai pas trop le choix, il n’est pas aussi borné que Zoey, mais il est bien plus radical. Autant lui donner ce qu’il veut tout de suite pour être tranquille. Son putain d’oiseau vient voleter à côté de moi pendant qu’il enlève son manteau.
- Tiens le , j’veux pas qu’il mette le bordel dans mes papiers, en plus ça fout des plumes partout.
- C’est toi qui viens me parler de bordel ? Tu as vu l’état de cet endroit ?Apparemment ça à l’air de l’amuser.
- Je me retrouve très bien dans mon « bordel » comme tu dis. Alors contrôle ta source. »
Le piaf retourne se poser sur l’épaule de son proprio. Parfait. Je l’aime bien, mais y a des limites à ne pas dépasser. Et je suis pas trop d’humeur. Je déplie douloureusement mes doigts, je les ai serrés si fort que le sang a du mal à circuler. Un mage ne va jamais sans sa source. Dommage pour ma migraine qui revient au moment le plus opportun. Je me dirige vers la cuisine tout en jetant un œil au paquet. Des biscuits. Mon ventre gargouille quand leur odeur chatouille mes narines. Je ne m’en étais pas rendu compte jusqu’à présent, mais je meurs de faim. J’attrape une assiette dans un des placards et je secoue le sachet au-dessus pour y renverser les gâteaux. Pendant que je m’affaire dans la cuisine, j’entends Shin qui s’installe dans le salon. Je le rejoins et je déblaie comme je peux la table basse avant de m’asseoir sur le fauteuil en face de lui. Il me dévisage avec ses yeux sombres. Je vois très bien la désapprobation dans ses iris quand il me fixe du regard. Pas mon problème. J’attrape un cookie que je commence à grignoter du bout des dents.
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Requiem
FantasiaNéo-London n'a jamais été la plus paisible des métropoles. Alors que la tension monte et que les rassemblements anti-mages se multiplient, le capitaine de police Shinsuke Ogata se voit confier une nouvelle enquête. Retrouver l'invocateur renégat qui...