Harmonie

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La musique a été plus qu'importante dans mon secondaire. Ce fut l'histoire de tout mon trajet à cette école, même s'il reste encore une année. La musique est pour moi la meilleure façon de m'exprimer, que ce soit en l'interprétant, en l'écoutant ou même en la créant. Avez-vous seulement déjà eu le sentiment d'être confortable en entrant dans une classe, le feeling d'être libre en commençant un cours? Le cours de musique a été ce havre pour moi tout au long de mon secondaire. J'ai composé, arrangé, apprécié et surtout joué des pièces, mais j'ai surtout appris que peu importe le talent que nous avons, il est toujours possible de l'améliorer. Je vous le signale : en entrant en première secondaire, je n'avais aucune idée de l'instrument que je voulais apprendre à jouer. Mes trois choix devaient être écrits sur une feuille afin que le professeur puisse prendre une décision – et ce par rapport au nombre d'élèves voulant le même instrument, il n'était quand même pas pour avoir 25 saxophonistes alto dans la même classe (malgré le fait que dans l'Harmonie du Mont il y ait en tout 12 de ces instrumentistes). J'avais choisi en premier l'euphonium (ou mini tuba pour les intimes), la trompette comme deuxième choix, puis les percussions. Je me suis résulté à être euphoniste, instrument que j'avais su faire un Si bémol dès les premières cinq minutes (qui peuvent vous sembler longues, mais dites-vous que je n'avais jamais touché à un cuivre de ma vie, mis à part un des instruments à embouchure incluse en plastique que l'on utilise sans trop comprendre lors des parties de football des Alouettes de Montréal).

Les années passèrent, les concerts aussi. J'imagine que, si l'on revient à mon conseil de tout à l'heure, la pratique a porté fruit, puisqu'aujourd'hui je suis en quatrième secondaire et plus heureux que jamais. J'ai ­– enfin réussi à faire performer mon arrangement de Happier à l'orchestre au Mont-Bal de cette année, et j'en suis plus-que-fier. J'entame aussi mon secondaire cinq avec la promesse d'André de monter Joyful (Song of Happiness), composition de mon cru. Je l'ai nommée ainsi puisque son écriture me fut plus qu'un cadeau. Malgré les problèmes techniques que j'ai éprouvés, et Dieu sait qu'ils sont nombreux, la composition de ma chanson de la joie et une pièce majestueuse, dans laquelle on peut y entendre les notes aigues et feutrées des cors, les montées et arpèges des bois et le son solennel des cuivres. J'espère sincèrement pouvoir la diriger avec ma famille. Je crois en moi, mais surtout en eux.

La vie m'est mouvementée cette année. Cela est bien sûr que ce ne l'est pas, mais les longues rencontres avec ma psychologue portèrent fruit (ou presque) en émettant l'hypothèse qu'un Trouble du Spectre de l'Autisme soit présent chez moi, ma personnalité, ma façon d'agir. Ceci étant bien dit, je tiens à préciser (ce qui ne serait point à préciser normalement) que si l'on me confirme cette hypothèse qui sait dans combien de temps (ça peut tout autant être deux mois que deux ans), je ne changerai pas, puisque ce trouble neurologique (comme tout trouble neurologique, en exemple la dyspraxie qui, avant ce doute, était mon diagnostic) est présent dès la naissance, mais se présente au jeune âge (voyez-vous la nuance?). Seulement, rien n'est confirmé, mais sachez que si ce l'est, je ne serai qu'un homme rassuré, parmi toutes ces crises qui m'ont mené dans un autre monde, un monde qui ne fait pas que peur, mais qui tue l'âme de chacun de mes espoirs de m'en sortir un jour. Si l'on paraphrase Jean Barbe : La nuit vient. Je sais que demain le soleil va se lever. Mais il sera sans doute un peu plus cruel qu'hier. Cette citation me donne des frissons. Elle peut être interprétée de plusieurs manières, mais je crois que, pour moi, elle signifie que oui, le pire arrivera peut-être. Même si tout finirait par bien aller, je sais très bien que mes traces me suivront. Ma vie est peut-être parfois un fardeau, je l'avoue. Mais cela ne fait pas de ma vie un désastre. Je me sens gratifié d'avoir hérité de personnes qui m'aiment, une belle troupe qui prend soin de moi, des professeurs qui me soutiennent dans mes projets. Je parle de Mme Gaudet en secondaire 3 qui lisait chacune de mes histoires, Mr Cyr qui m'encourage à continuer la musique comme je l'aime, et d'autres. Si l'on revient au TSA, lorsque j'ai appris cette nouvelle, je n'étais pas trop sûr de comprendre ce qui se passait. En même temps, je n'écoutais pas vraiment. C'est plus tard que j'ai réalisé que nous avions probablement fini par trouver la dernière pièce du casse-tête, qu'il ne nous restait plus qu'à l'assembler avec les autres. Ce puzzle, c'est la compréhension de toute ma jeunesse, jeunesse qui a fait des siennes plusieurs fois. Lorsque j'ai expliqué à André Cyr l'hypothèse que ma psychologue avait émise, et il faut préciser qu'André ne croit pas à ces troubles de développement, il m'a dit : « L'important, c'est que tu aies toujours ton talent musical. Et je sais que tu ne le perdras pas. » Waouh, ç'avait fait beaucoup d'émotions en même temps. Je suis prêt à le jurer, je me rappellerai de ses paroles toute ma vie. L'admiration que j'avais envers cet homme. Cet homme, qui est aussi un roi des dieux, a été tout ce dont j'ai rêvé du secondaire. Il m'a fait pleurer, rire, sourire, et il m'a surtout fait découvrir la musique comme personne ne l'aurait fait. Cet homme, qui a un grand cœur, un énorme cœur, est toujours à nos côtés lorsque quelque chose nous perturbe, comme cette hypothèse. Cet homme est un roi des dieux, c'est vrai. Mais il est aussi le dieu de la musique, de ma passion pour la musique, à mes yeux.

Mon plus grand rêve serait de diriger des jeunes musiciens, comme le fait mon professeur. Lorsque j'ai dirigé Happier et les maintes pièces en classe m'ont apporté un sentiment de liberté, comme si j'étais délivré de tout problème. Cet été, je me procure une baguette, cela est certain. C'est un mélange entre Harry Potter et la musique que j'aime bien, et si je pouvais lancer un sort sur chacun des élèves que j'aide à jouer, ce serait plus-que-magnifique. Je n'ai rien gagné cette année en Harmonie. Je m'en fous un peu. Je suis fier de moi, et c'est le plus important, n'est-ce pas ? J'avais pensé aussi aller en composition, mais je ne sais pas trop quoi faire comme carrière avec un diplôme en compo. Compositeur de musique de films serait bien trop incroyable ! Parlant de musique de films, j'ai eu la chance avec quelques musiciens de l'Harmonie du Mont de jouer la Fanfare Olympique de John Williams avec l'Orchestre Symphonique de Laval, et ce fut un honneur. Être musicien dans un orchestre pourrait aussi être pas mal. Bref, comme dirait mon enseignante, on ne met pas la charrue avant les bœufs.

Peut-être que j'ai dérivé, je l'admets. Mais je trouvais important d'expliquer certains points de ma vie pour prouver que la détermination est plus forte que n'importe quelle chance. Je crois que mon secondaire cinq sera une belle année. J'espère que, pour bien conclure mon périple, je quitterai mon havre musical en paix, en joie, en harmonie...

Merci de m'avoir lu.

Xavier Fournier, le 7 juin 2019 à 22 :28

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