Dialogue frêle

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Aide-moi. Elle me tue, m’enlève la vie à coup de livres. Je ne peux l’attaquer, elle est plus forte que moi. Plus forte mais moins lourde. Elle me force à être comme elle. J’ai mal, aide-moi. Os devenus couteaux, ils vont flancher, je le sens. Je les tues. Comme elle me tue. Aide-moi.

Tu es inconsciente. Enveloppée dans un univers qui n’a rien de confortable, avec elle. Je ne la vois pas, mais elle te contrôle, je le sens. Je le sens, je le vois. Regarde-moi. Ces yeux ne sont pas tiens. J’ai vu l’effort que tu as mis pour lever tes paupières, sous lesquels se trouvaient deux pupilles complètement vides et dilatées. J’aurais voulu te relever de ton lit d’hôpital. Te secouer. Mais je ne pouvais pas. Je t’aurais brisée en essayant de te saisir le bras. J’aimerais te souffler un doux baiser, j’aimerais pouvoir poser mes lèvres sur ton crâne et y enlever ta douleur. J’aimerais que tu vives, pour une fois.

Je t’ai vu aujourd’hui. Avant de me rendormir, tu étais là. Tes yeux m’ont fait mal, leurs éclairs ont sitôt atteints mon cœur. Cœur qui désormais ne bat plus chamade, mais se bat pour survivre. Teint pâle et anémie, carence de tout ce qu’il y a de merveilleux dans le monde; absence de toi. Aide-moi! Souffle-moi des calories et pose sur mes lèvres de l’espoir.

Chérie reviens. Chaque fois qu’elle te parle, Ana, chaque fois qu’elle entre dans ton esprit, chante une berceuse douce et laisse-toi guider par le rythme reposant. Ferme tes yeux et imagine toi quelque chose qui te fait du bien. Imagine moi, tiens. Et rappelles toi que tu te bats pour revenir là où tu étais avant ton coma, dans mes bras. C’est ça de l’espoir. Je t’en prie, réveille-toi.

Elle ne veut pas. Elle se venge su mon propre corps. Chaque note de musique me rapproche d’un ligne horizontale continue. Cette fameuse ligne, ponctuée par un effet sonore alarmant. Cette ligne, vivant dans un appareil connecté à mon cœur. La ligne verte, qui menace d’être le son qui fera taire ma berceuse. C’est lourd à porter, l’espoir. C’est lourd sur mes épaules fragiles.

Ne regarde pas la ligne. Toi qui as créé ton propre univers autour d’une seule pensée : garder la ligne. Mais ne t’avais-je pas dit à quel point une ligne peut s’avérer frêle? Fais disparaître les lignes, ces bandes horizontales, bande toi les yeux! Après tout, la seule ligne que tu devrais réellement imaginer, c’est celle de notre chemin futur, ces routes sur l’autoroute qui ponctueront notre avenir, que nous bâtirons ensemble.

Tu dis bâtir elle me parle de détruire. Tu me parles d’avenir elle me parle de mon prochain repas. Tannée de manger mes cris, tanner d’avaler mes pleurs, besoin d’autre chose pour me contenir. Pour avancer. Besoin de force, de la force pour bâtir. Mes bras faibles ne pourrons suffire à l’avenir.. . Dis-moi qu’elle a tort, prouve-moi qu’elle n’aura pas raison de moi… Fais-la partir et tiens-moi dans tes bras, fort…

Goûte à la vie avec moi. Pense-y, nous étions heureux. Je viens te chercher, s’il-te-plaît relève-toi. Tu n’es pas seule avec elle, je te suis des yeux. Je suis là. Et nous sommes plus forts qu’elle, nous ne sommes pas peureux. Noie ta peine dans tes larmes, avale ta tristesse, puise ton énergie dans tes sentiments, sens ta force s’emparer de toi, cri, fais-lui peur, fais la fuir. Tu es si belle. Crois-moi elle va partir. Sur un chant triomphant, crois-moi nous chanterons en chœur bientôt, un beau poème... Je t’aime.

Oh si tu savais comment je t’aime. Mon cœur vivait pour toi, mais est mort pour elle. Je me nourrissais de toi, je jeûnais pour elle. Elle a gagné, ceci est mon dernier couplet. Ton nom est à jamais sur mes lèvres, s’il-te-plaît ne pleure pas, je suis là, je te tiens dans mes bras, enfin. Je me suis peut-être noyée dans son univers, mais tu demeureras à jamais mon unique sauveteur, et mes yeux brillent encore de notre amour. Amour que nous avons bâti  ensemble. Pas besoin de construire autre chose, nous avons l’essentiel. Et on se retrouvera, l’autre côté de la ligne, je garde espoir. 

Ana aide-moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant