« Coucou Hazza.
Quand tu liras cette lettre je serai sûrement déjà décédée. Je suis désolée pour tout. Je sais que j’aurais dû te parler de ma maladie, du cancer qui me rongeait depuis quelques mois. Mais j’ai choisi de ne pas le faire et de vivre les derniers mois de ma vie à fond. Si tu étais au courant tu m’en aurais empêché. Et je ne voulais pas passer le restant de mes jours dans une chambre d’hôpital, dans une atmosphère qui me rappellerait que la mort me tendait les bras toujours un peu plus chaque jour. Alors c’est pour ça que du jour au lendemain j’ai tout laissé tomber, que je t’ai laissé vendre mon appartement et mes affaires parce que j’étais partie faire le tour du monde. Je t’ai juste laissé une lettre en te disant que je voulais vivre et que j’allais, pendant un an, faire le tour du monde. Au fond, je savais que mon tour du monde n’allait pas durer un an. Six à neuf mois disaient les médecins, j’en ai tenu neuf. Peut-être que si j’avais suivi un traitement j’aurais pu tenir quelques mois de plus ou même guérir. Mais je ne voulais pas gâcher la fin de ma vie avec un traitement qui allait m’épuiser. Alors je suis partie. Je suis tellement désolée de t’avoir uniquement laissé une simple lettre qui contenait les clés de mon appartement.
Alors à chaque fois que je changeais de pays ou de ville je t’envoyais une lettre, accompagnée de quelques photos. Des fois tu recevais des vidéos par mail de ma part. Je voulais te montrer à quel point je profitais de la vie, que tu sois fier de moi, de voir que j’arrivais à me débrouiller en territoire inconnu. J’étais tellement heureuse Haz’. Alors pour te montrer que j’ai profité de mes derniers mois je t’ai dressé la liste des pays que j’ai visités, dans l’ordre.
Nouvelle Zélande, Australie, Indonésie, Philippines, Inde, Chine, Japon, Russie, Suède, Norvège, France, Allemagne, Italie, Grèce, Espagne, Maroc, Algérie, Egypte, Soudan, Kenya, Nigéria, Congo, Madagascar, Afrique du Sud, Argentine, Brésil, Pérou, Mexique, Etats-Unis et Canada.
Et dans cette liste il me manque un pays qui j’ai toujours voulu visiter, le Groenland. Je n’ai pas pu m’y rendre car arrivée au Canada, je me sentais faiblir. Mais je me suis forcée à tenir jusqu’au bout. J’ai visité tout ce que je voulais mais deux jours avant mon vol pour le Groenland j’ai fait un malaise. On m’a emmenée à l’hôpital et j’ai passé un PET scan. J’avais des métastases de partout Harry, j'avais un cancer généralisé. Ils m’ont dit que je n’en avais plus pour longtemps. Ils m’ont donné un mois au maximum. J’étais tellement faible que je ne pouvais plus marcher. Je me déplaçais en fauteuil roulant. J’ai annulé le Groenland, à mon plus grand regret. J’ai voulu garder le meilleur pour la fin mais je n’ai pas pu le faire. Alors je te demande de faire une chose, de partir au Groenland pour moi. Pars avec Louis, je laisserai une enveloppe avec de l’argent pour que vous puissiez payer le voyage. Tous les trois on avait tellement parlé du Groenland que vous allez y aller, et profiter. C’est le meilleur cadeau que vous puissiez me faire.
Je reprends. Après avoir passé une semaine à l’hôpital j’ai appelé Nanny, la maman de papa qui habite en Ecosse. Et j’ai pris l’avion pour Edimbourg et ensuite pour Wick. Là-bas elle est venue me chercher avec un vieil ami à elle. Et puis elle m’a emmené dans son chalet au bord du lac, tu sais celui où on a passé les vacances de Pâques quelques fois. Le voyage m’avait épuisée. Alors quand j’étais chez elle je dormais et sinon je passais ma journée emmitouflée dans une grosse couverture, sur la terrasse, à regarder le lac et boire les tisanes qu’elle me préparait. Je l’avais suppliée de ne pas t’appeler. Tu étais heureux avec ton nouveau poste dans un grand journal anglais. Je ne voulais pas gâcher ton bonheur, tu comprends ?
Et aujourd’hui je sens que c’est la fin. Je suis sur la terrasse, Nanny m’a donné un carnet et un crayon, comme je lui ai demandé. Je me sens plus faible que les jours précédents. Je sens la mort arriver à grands pas. Tu n’auras sûrement pas remarqué les lettres manquantes entre le moment où ma dernière lettre, postée d’Ottawa, arrivera et le moment où Nanny t’appellera pour t’annoncer que je vous ai quitté. J’ai du mal à écrire, ma main me fait souffrir, comme le reste de mon corps, malgré les antidouleurs que je prends en grandes quantités.
Harry. Je voulais te parler d’une chose. D’une personne, plutôt. Louis.
Tu sais, quand j’ai vu Louis pour la première fois, il y a cinq ans. J’ai su que vous étiez fait l’un pour l’autre. La façon dont il te regarde, dont il regarde tes lèvres quand tu parles… Et je sais que c’est réciproque. Je te connais assez bien pour savoir quand tu es amoureux. Et tu l’es Harry. Quand vous êtes ensemble, vous puez l’amour 10km à la ronde. Et vous êtes assez bêtes pour ne pas vous en rendre compte. Ou du moins pour faire comme si. Tout le monde l’a remarqué. Même Nanny, qui n’a vu Louis qu’une fois m’en a parlé. Alors si j’aurais une dernière demande à te faire. C’est de dire à Louis que tu l’aimes. Ne pense pas le contraire car je te connais tellement bien que je sais qu’au fond de toi tu meurs d’envie de lui sauter dessus à chaque fois que tu le vois. Alors, pour l’amour de Dieu, dites vous une bonne fois pour toutes que vous vous aimez et l’affaire est réglée. Tu sais que je t’aime Harry mais tu peux être tellement exaspérant des fois. Alors pour une fois fais ce que je te dis, écoute ta vieille sœur et fais-moi plaisir une dernière fois.
Je t’aime tellement Harry. Tu sais, tu as été le seul homme de ma vie. Certes j’ai eu quelques histoires mais rien d’important, avec papa, vous avez été les deux personnes qui comptaient le plus pour moi, mais toi, encore plus. Je ne me voyais pas vivre sans vous. Quand maman est décédée de son cancer des os, je ne sais pas comment j’aurais pu faire pour tenir le coup sans vous. Vous étiez les bras qui me tiraient vers la surface alors que ma tristesse m’attirait toujours un peu plus vers les profondeurs. Papa n’était pas non plus au courant pour ma maladie. Personne ne le savait. Hormis Nanny à partir du moment où je suis allée vivre chez elle.
Pour en revenir à mon cancer, il a été diagnostiqué il y a neuf mois. J’avais perdu un peu de poids sans avoir changé d’habitudes alimentaires, j’avais mal aux articulations et j’étais de plus en plus fatiguée. Ca faisait quelques moi que ça durait mais je pensais que ça allait passer. Puis un jour j’ai fait un malaise au travail. A l’hôpital ils m’ont fait une prise de sang pour savoir pourquoi. Et là ils m’ont annoncé que j’avais une leucémie. Ils m’ont dit que j’étais en phase accélérée. J’avais le choix entre me faire opérer, souffrir et peut-être guérir, sans aucune certitude. Je ne voulais pas de ça alors j’ai choisi de ne pas faire le traitement. J’ai choisi de prendre des médicaments pour me faire tenir le plus longtemps possible mais sans subir de greffe de moelle osseuse, voulant profiter du peu de temps qu’il me restait à vivre. Alors pendant deux semaines j’ai réfléchi. Puis j’ai retiré de l’argent, et je suis partie pour l’aéroport. Et je suis montée dans le premier avion libre avec juste un sac à dos. Pardonne-moi d’avoir été égoïste et de n’avoir pensé qu’à mon bonheur personnel. Aujourd’hui je suis partagée car d’un côté je m’en veux de te laisser et je suis aussi tellement heureuse de toutes les choses que j’ai vues lors de mon tour du monde.
Tu sais, je pense que le plus important, c’est que j’ai profité de ma vie durant ces derniers mois.
Pardonne-moi encore d’être partie comme une voleuse.
Pardonne-moi de t’avoir laissé.
Pars au Groenland avec Louis pour moi.
Maries-vous, adoptez plein de beaux enfants.
Fondez une famille.
Soyez heureux.
Sois heureux.
Je t’aime, ne l’oublie pas.
Gemma. »
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Correspondance post-mortem
General FictionHello ! Bienvenue sur cette histoire qui va comporter deux parties. Une lettre de Gemma à Harry et une lettre d'Harry à Gemma. /!\ A LIRE S'IL VOUS PLAIT /!\ Dans la première lettre, je parle de la leucémie. Je tiens à dire que je ne suis pas une...