| Notre Dame de Paris |

Chapitre 1

Le parvis était plus vide qu'elle ne l'aurait pensé, mais la nuit était tombée il y a longtemps maintenant et les températures glaciales du mois de décembre ne poussaient certainement pas les gens à y rester plus que nécessaire. Elle s'arrêta devant l'illustre monument, inspira profondément, et observa autour d'elle, cherchant une place où s'installer. Les écouteurs dans ses oreilles ne diffusaient aucune musique, mais ils l'isolaient assez bien de l'ambiance extérieure.

A sa droite, un groupe de jeunes était installé, sur des bancs en pierre, des bouteilles d'alcool passant d'une main à l'autre. Ils rigolaient tous beaucoup et cela la fit sourire. Tout au fond de la place, des photographes utilisaient leurs appareils pour immortaliser la bâtisse sous les projecteurs et non loin d'eux, des cracheurs de feu avaient rassemblé une petite foule qui s'extasiait face aux différentes figures, toujours plus dangereuses, qui illuminaient la place l'espace de quelques secondes. Au loin, elle entendait l'animation des bars de l'autre coté de la Seine.

Ses pieds l'emmenèrent automatique sur le pont du double, en face de la où elle se tenait. Elle s'installa sur un des bancs en bois, en râlant sur ses malheurs à voix basse. Après quelques minutes, elle se releva et fit les cent pas, longeant les barrières de métal du pont. Elle finit par s'accouder contre ses dernières, récupérant son téléphone pour mettre de la musique. Ses émotions n'étaient qu'un mélange de tristesse, de colère et de déception et cela l'aida un peu à se calmer. Rapidement elle sorti une cigarette de son paquet de clopes. Elle fumait peu, la dernière devait remonter à minimum une semaine, pourtant elle en ressentait le besoin là, tout de suite.

- Merde .. soupira-t-elle

Ses doigts gelés l'handicapaient et elle dût s'y reprendre à quatre fois avant de pouvoir faire fonctionner son briquet correctement. Trois essais de plus furent nécessaire pour allumer ce qu'elle tenait entre ses lèvres tremblantes. Prudemment, elle s'installa sur la fine barrière de métal, légèrement penchée en arrière et observa les lumières qui se reflétaient dans l'eau. Elle savait sa position dangereuse mais elle s'en fichait bien.

Elle mit un moment à ressentir les premiers effets, mais elle finit par se détendre et décida enfin d'affronter les choses. Elle prit son téléphone et navigua jusqu'à arriver au fameux message.

« Je n'y arrive plus »

Elle n'avait toujours pas répondu et à vrai dire elle ne savait pas si elle le ferait un jour, il n'y avait rien de plus à ajouter. Et le manque de réponse n'avait pas eu l'air de le déranger puisqu'il n'avait pas relancer la discussion. Il lui laissait le temps de digérer l'information.

- Neuf mois partis en fumée en un seul sms, chuchota-t-elle ironiquement

Un trou béant se fit soudain ressentir dans sa poitrine. Elle souffrait. Elle l'aimait, bien sûr, comme une dingue. Leur histoire avait si bien commencé. Un coup de foudre. Elle se rappelait encore de la veille, emmitouflés l'un contre l'autre, devant la télé. Elle était rentrée chez elle le coeur léger et débordant d'amour. Tout cela avait été si soudain. Si incompréhensible. La cigarette s'éteignit doucement alors qu'elle sanglotait, elle venait enfin de réaliser.

- C'est fini, vraiment.

Elle laissa le temps filer, doucement, sans s'en rendre compte, trop perdue. Un klaxon et des éclats de voix la sortirent de sa tourmente. Elle tremblait, ses doigts étaient presque violet, et elle se maudit d'être sortie avec uniquement un gros sweat sur le dos. Malgré ça elle tenait toujours dans un équilibre malhabile sur la barrière. Après de multiples tentatives, elle ralluma sa clope, déjà presque finie. Sur le moment, l'idée de sauter et de se laisser engloutir par l'eau gelée lui parut attirante.

-La vie ça craint hein ? la surprit une voix grave proche d'elle.

Elle eu du mal à ne pas sursauter. Elle n'avait pas entendu l'homme se rapprocher d'elle. Elle ne voulait pas de compagnie, pas ce soir. Elle se contenta d'un hochement de tête, espérant qu'il parte face au manque de réponse. Mais au lieu de ça il s'installa à ses cotés, les avant-bras contre la balustrade. Elle tourna la tête et le détailla, se fichant bien d'être discrète. A quoi bon ? c'était lui qui s'était incrusté dans sa bulle. Il était jeune, sûrement la vingtaine, et ses cheveux sombres s'échappaient de son bonnet. Son profil mettait en avant son nez, qui, constellé de taches de rousseur, semblait fin, bien qu'un peu long peut être. Des cernes ornaient ses yeux clairs, qui regardaient droit devant. Sa mâchoire était carrée et ses joues creusées sous une légère barbe. De fines rides apparurent à la commissure de ses yeux lorsqu'il sourit, toujours sans lui jeter un seul regard.

Il porta doucement une cigarette à la bouche, inspira fortement, garda la fumée dans sa bouche avant de la laisser ressortir plus doucement par ses narines et entre ses lèvres.

-M'appelle Antoine, il soupira, ne t'inquiète pas t'es pas obligée de faire la causette, je suis un très bon animateur à moi tout seul tu sais.

Il tourna enfin les yeux vers elle, et sourit, fier de sa phrase. Elle lui sourit en retour, un tout petit sourire, qui disparut bien vite, mais ce fut comme une petite victoire et il reprit la discussion, seul.

- Hm attend peut être que je parte si tu veux sauter, histoire que je ne me retrouve pas dans des histoires un peu sordides et tout ça.

Cette fois si elle sourit plus franchement et se permit même de lui rendre son clin d'oeil.