Départ en week-end

4 1 0
                                    

15.

À mesure que la semaine progressait vers le week-end, je sentais mon angoisse monter. Aucun des Bessebèges ne m'avait adressé la parole depuis notre petite réunion chez Vénus, et je commençais à me dire que j'avais commis un impair de taille, et que le petit séjour en Normandie allait être annulé au dernier moment. Ce qui, bizarrement, me chagrinait.

Mais le jeudi soir, alors que nous quittions le gymnase après deux heures d'athlétisme, Vénus s'approcha de moi avec son élégance coutumière et condescendit à me parler.

— Tu n'oublies pas, pour demain soir, lâcha-t-elle alors que je marchais à côté de Noémie.

— Hé, tu veux pas aller t'acheter une vie au lieu de polluer la nôtre ? grogna mon amie en mode rottweiler.

Vénus ne lui accorda pas plus d'attention qu'à un meuble et poursuivit sa route, altière. Son trio de courtisans la suivait de près, et même François-Guillaume ne m'accorda pas le moindre clin d'œil. Je les regardai s'éloigner, sentant sur moi les yeux interrogateurs de Noémie.

— Alors, tu vas me le dire, oui ou non ? m'apostropha-t-elle lorsque je ne pus continuer à prétendre regarder le quatuor, qui avait tourné au coin de la rue.

— Quoi ?

Soupir agacé de Noémie. Elle m'obligea à lui expliquer les projets que j'avais avec les Bessebèges, ce que je fis à grand renfort d'hésitations coupables.

Les yeux de Noémie s'étrécirent, cherchant à me scruter jusqu'au fond de l'âme et même au delà.

—Tu vas passer le week-end avec Vénus. Chez elle. Et après ça, tu vas me dire que vous êtes pas copines, elle et toi ? Putain, je sais pas ce qui me retient de te faire ravaler tes promesses ! rugit-elle.

— Noémie, je t'assure qu'entre elle et moi, c'est juste... Enfin quoi, merde, si tu me fais pas plus confiance que ça, je sais pas si on peut vraiment être copines ! protestai-je. J'y peux rien si on se connaissait avant que j'arrive ! Alors oui, c'est vrai, on fréquente le même genre de cercles, mais ça veut pas dire que je la trouve sympa ! En plus, elle m'a coupé l'herbe sous les pieds en appelant mes parents avant que je rentre pour leur demander si je pouvais passer le week-end avec elle ! Je t'assure que j'aurais préféré leur annoncer moi-même, histoire d'avoir le choix !

— Elle a fait ça ? s'étonna mon amie, les yeux ronds. Gonflée, la meuf ! Elle doute vraiment de rien !

— Ouais, c'est clair, j'en revenais pas quand ils m'ont annoncé ça, la bouche en cœur. Quand je pense à tous leurs beaux discours sur les a priori qu'il faut pas avoir sous prétexte qu'ils ont du fric ou de l'influence, je constate que c'est deux poids deux mesures, en fait. À peine elle leur parle qu'ils sont prêts à faire tout ce qu'elle veut !

— Bah, tu sais comment sont les parents, ils veulent soi-disant ce qu'il y a de mieux pour leurs gosses, et j'imagine que fréquenter la crème de la crème entre dans la catégorie de ce qu'il y a de mieux pour toi ! commenta Noémie, amère.

— Clair. Bon, tu m'en veux pas trop ? Je te promets que la semaine prochaine, je te consacre tout mon week-end.

— Adjugé ! Bon, ben j'te laisse, on se revoit demain ! me lança-t-elle avant de m'embrasser.

— À demain.

Ma mère était dans son atelier lorsque je pénétrai dans l'appartement et je montai lui faire une bise.

— Ça va, ma chérie ?

— Ouais, j'ai fait la connaissance du prof le plus horrible de la planète, ce matin ! m'exclamai-je avant de me laisser tomber sur le second tabouret haut.

MyocardeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant