(Plume de Cristal) Le Souverain Gelé - Histoires Annexes

(La Plume de Cristal) Flash Back n°1 - La Blanche-Mort

[Commentaire de l'Auteur]

Je vous offre cette petite nouvelle que j'ai écris pour le concours "La Plume de Cristal", où il fallait écrire un petit texte sur le thème de l'hiver avec un de nos personnages principaux de notre roman.

Je vous présente donc un petit flash-back qui risque d'être assez intrigant !

Ainsi que l'apparition d'un nouveau personnage... ;D

C'était une désolation.

Malgré la beauté des arbres blancs, des feuilles cristallisées et des lueurs bleutées et violacées, nulle âme joyeuse et riante ne vivait dans cet endroit abandonné.

Pourtant, une silhouette cachée sous un manteau de blanc s'avançait sereinement entre les arbres. La neige craquait sous ses pieds et les flocons tombaient sur sa capuche. De cette dernière s'échappaient de longues mèches ondulées aux couleurs de l'Hinvel*, ainsi qu'un visage pâle révélant des traits jeunes et féminins.

Elle s'arrêta un instant pour relever la tête et écouter ce silence cristallin. Aucun chant d'oiseau frivole, ni bruissements d'animaux fuyant ne rompaient ce vide effarant. Ses yeux chocolats glissèrent vers le ciel assombri. Les seules lumières qui s'offraient à elle était les lueurs de la flore, ainsi que l'éclat aux couleurs froides des crevasses et fractures qui parsemaient son chemin.

Elle tapota le sol neigeux de son bâton comme si elle testait la réponse de la forêt, mais rien ne vint troubler l'inquiétante paix de cette dernière. Alors continua-t-elle sa route, telle une âme errante.

Au bout de quelques minutes, son regard s'arrêta sur des traces de pas humaines incrustées dans la neige. Les flocons tombant à foison sur cette terre désolée, il était évident qu'une autre âme qu'elle avait emprunté ce navrant chemin récemment.

Quelle pourrait être l'affligeante raison pour qu'une personne ose braver les dangers invisibles de cette forêt, si ce n'était la folie rongeant son âme ?

Sur ses gardes mais vivement intriguée, la silhouette suivit les traces de pas jusqu'à ce qu'elle entende un son des plus curieux, surtout dans cette région dévorée par la Tempête.

Pourquoi entendait-elle au sein de cette forêt cristallisée les gémissements d'un nourrisson affamé ?

Ses pas se précipitèrent dans les profondeurs des bois, sans pour autant courir vers ce bruit si insolite car elle connaissait les malheurs qu'offrait ce jardin sylvestre.

Le vent se révéla plus insistant lorsqu'elle s'aventura dans une clairière où jonchaient des ruines de colonnes antiques et autres vestiges, certaines toujours debout et d'autres effondrées ou couchées sur le sol.

La plupart étaient couvertes de cristaux aux mêmes couleurs que la forêt... comme si ceux-ci les avaient autrefois transpercés alors qu'elles étaient encore fièrement dressées ; certainement pour supporter l'ancienne bâtisse sacrée qui fut jadis à la place de cette endroit mélancolique.

Ce champ de cristal parsemé de visions du passé enchantait comme intriguait la mystérieuse femme, mais ce qui attira son attention fut les braillements plus nets et plus forts qui s'échappaient du centre des ruines.

Elle s'avança prudemment et constata avec stupeur la présence d'un nourrisson enrobé dans des draps blancs, abandonné au milieu des cristaux et des ruines. Celui-ci pleurait en tendant ses minuscules bras, comme s'il cherchait à s'accrocher à un espoir illusoire.

— Un bébé... murmura-t-elle en tournant la tête vers les alentours pour chercher vainement une quelconque présence.

Elle s'approcha et s'arrêta à côté de lui avant de l'observer sans s'accroupir. Elle détailla cette nouvelle vie d'à peine quelques mois, et remarqua ses yeux azur clairs.

— Voilà de bien jolis yeux, mon enfant... Mais quel est ton crime pour avoir été abandonné ici ?

Elle soupira et ramassa d'un bras le nourrisson qui se tut au moment du contact. Leurs regards se croisèrent un instant, dans un calme alourdissant, jusqu'à ce que le bébé ne lui offre un joli sourire chaleureux.

Légèrement attendrie, elle lui répondit avec ce même étirement de lèvre avant de doucement soulever le drap pour s'enquérir de la nature de l'enfant.

— Une petite demoiselle... s'amusa-t-elle avant de tourner les talons.

Elle jeta un œil vif vers la lisière de la forêt, tentant une nouvelle fois de voir une âme vivante... Bien qu'elle savait pertinemment qu'il s'agissait d'un vain espoir.

— Cruel accueil dans notre monde que de te laisser ici, à la morsure du froid... Malheureusement, j'ignore si notre rencontre t'apportera une meilleure fortune.

L'enfant ne pleurait plus. Ses yeux étaient rivés sur elle, comme si ce petit bambin l'écoutait.

Le regard de ce dernier était réellement touchant, aussi la serra-t-elle contre sa poitrine.

— Peut-être... es-tu un cadeau de Kalya pour vaincre ma solitude... pour vivre avec moi dans ce jardin glacé, loin de la chaleur et des rires... Moi, surnommée la Blanche-Mort...

Elle s'arrêta un instant et fixa le bébé en écarquillant légèrement ses paupières.

— Peut-être même pour... commença-t-elle dans un murmure à peine audible, avant de s'enfermer dans le silence.

Les petites mains agrippèrent les mèches argentées de la femme pour jouer avec, suivi de gazouillements de gaieté comme si l'enfant était heureux de sa condition.

Ou peut-être était-il juste bien trop jeune et innocent pour comprendre la situation...

Elle glissa sa main gantée sur le visage du bébé, telle une caresse rassurante, puis serra-t-elle tendrement ce petit bout de chaleur contre elle avant de l'enrober dans son manteau.

— ... Je suis désolée... lâcha-t-elle finalement avant de s'enfoncer à nouveau dans la forêt.

Avançant doucement avec l'enfant blotti contre elle, elle prit soin de bien la protéger des flocons et du froid. Pourtant sentait-elle cette enfant déjà bien résistante pour cet âge. Elle ignorait quand elle avait été abandonnée, cependant il était étonnant qu'elle l'ait retrouvé vivante et non congelée.

Elle s'arrêta subitement pour observer une nouvelle fois l'enfant.

Personne ne viendrait s'enquérir d'elle. Personne ne viendrait la chercher, ni s'en occuper. Personne ne viendrait lui donner de l'amour. Elle était seule au monde... comme elle.

Heureuse coïncidence ou malheureux hasard... ?

L'Hinvel pouvait se révéler froid et cruel, parfois même meurtrier. La Tempête était certainement une menace pour le monde, et pourtant...

Ces cristaux naturellement sculptées sa poudre blanche si douce et ses paysages de pureté...

Ainsi que ce petit être plein de vie...

Même la glace pouvait offrir le plus chaleureux des cadeaux.

— Rentrons à la maison... petite Sheelan...

[Fin]

[définitions]

Hinvel* = Hiver