CONFRONTATION

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La sonnerie tira brusquement Alina de sa torpeur. Le moment de vérité était arrivé, se dit'elle en se levant pour aller ouvrir. Arrivée au niveau de la porte, elle prit une grande inspiration en priant silencieusement Dieu de l'aider à passer ce moment difficile sans flancher, car elle était convaincue que Karl ne lui apportait pas une bonne nouvelle.
Quand elle ouvrit, ils échangèrent un long regard, en essayant de se sonder mutuellement. Karl fut le premier à le rompre.
- Bonsoir Alina, dit -il.
- Bienvenue Karl! Répondit Alina. -As tu fais un bon voyage? Entre! Ajouta t-elle en lui cédant le passage.
Elle alla tranquilement se rassoir sur le canapé, redoutant la suite.
- Et ma princesse?  demanda Karl en rentrant.
- Elle dort déjà. Tu veux la voir?
Il acquiesça de la tête et elle lui indiqua la chambre en prenant cet instant de répit pour essayer de prendre le contrôle sur ses émotions. Comment dans une pareille circonstance, elle pouvait encore être troublée par lui? Se demandait'elle, furieuse contre elle-même. En sa présence, elle avait toujours été faible: faible de lui tenir tête, incapable de lui en vouloir... Si seulement, elle pouvait arracher de son coeur tout cet amour qu'elle ressentait pour lui, source de ses souffrances! Elle respira bruyamment et se prit la tête entre les mains.
Karl la retrouva dans cette position à son retour, et eut un pincement au coeur au vu de ce qu'il s'apprêtait à lui dire. Elle était visiblement préoccupée, peut-être même qu'elle se doutait un peu des raisons de sa venue; pensa t'il un instant.
Il se sentait tellement minable devant elle, car il s'était toujours comporté ainsi avec elle. Et cela avait assez duré. Il se devait de la libérer aussi bien pour son bonheur que le sien. Mais cela lui paraissait maintenant plus difficile qu'il ne le pensait. Comment lui dire qu'il voulait divorcer; qu'il en aimait une autre? Comment? Mais il savait qu'il n'y avait pas trente six manières de le dire. Il fallait  seulement aligner ces mots, même s'ils étaient cruels afin qu'elle en comprenne le sens. Il se consolait en se disant que pour une fois, son égoīsme pourrait participer aussi à son bonheur....
- Alina....., souffla t'il alors dans un murmure se doutant qu'elle entende.
Mais celle-ci releva lentement la tête et plongea son regard dans le sien. Elle y lut de la gêne, et de l'hésitation.
Karl Mensah qui hésite à lui parler à elle? Elle aurait pu en rire, si elle n'appréhendait pas tant ce qu'il s'apprêtait à lui dire. Karl n'avait jamais hésité, ou tourné deux fois sa langue  avant de se montrer verbalement cruel envers elle. Son hésitation était la preuve flagrante qu'il voulait lui annoncer le pire.
Après un court moment, elle décida de lui faciliter la tâche. A quoi bon s'accrocher s'il ne voulait pas d'elle, s'il n'avait jamais voulu d'elle.... se dit-elle.
- Je t'accorde le divorce, si c'est ce que tu t'apprêtes à demander, déclara t'elle en brisant ce silence qui s'éternisait.
Surpris, Karl la regardait, étonné qu'elle l'ait pris ainsi de court. Comment pouvait'elle savoir que c'était la raison de sa soudaine venue? Sa voix le tira de ses pensées.
- Ton silence est plus qu'éloquent Karl. Je n'en étais pas sûr, mais à présent, je le suis. Je  te l'accorderai sans aucun problème. Tu n'as qu'à préparer tous les papiers je les signerai. Tes conditions seront les miennes. Mais je veux comprendre Karl. Tu me dois au moins ça pour ce que tu m'a fait vivre. Je sais que tu ne m'aimes pas, que tu ne m'as jamais aimé. Tu ne t'en ai jamais caché. Mais je veux comprendre.... Je veux connaître ton histoire avec cette femme; cette femme que tu aimes et qui occupe toutes tes pensées. Cette femme pour qui tu n'as même pas laissé le début d'une chance à notre mariage. Je ne te demande pas qui elle est, je la connais déjà. Je t'avoue que le but de mon voyage ici était de la connaître et de connaître votre histoire.... afin de déterminer si je pouvais encore fait quelque chose pour sauver notre mariage. Mais puisque tu es là, prêt à demander le divorce, je comprend qu'il n'y a plus rien à sauver. N'empêche que je veux comprendre Karl. J'ai tout donné dans ce mariage, mais tous mes efforts ont été sacrifiés au pied de l'autel de ton indifférence, de ton mépris, de ton obsession pour elle, de ton.....
Ne pouvant continuer sans fondre en larmes, elle se leva et lui tourna le dos un instant pour se reprendre. Quand ce fut fait, elle se retourna et lui dit simplement, presque en murmurant.
- Je pense avoir le droit de comprendre Karl, ne me le refuse pas.
Dépassé par la tournure qu'avait pris la discussion, et plus que touché par son monologue, karl alla s'asseoir, le temps d'un répit. Elle avait le don de le faire sentir tellement cruel, et elle avait raison. Il lui devait la vérité. Il aurait bien pu lui demander comment elle avait su pour Donan, mais cela importait peu à présent. Il décida de lui raconter son histoire avec Donan sans inclure son lien familial avec elle. Il commença  alors:
- J'ai rencontré Donan il y a six ans, au cours de l'un de mes voyages d'affaires ici. J'avais un différent avec son mari, de qui je voulais me venger. Et c'est en enquêtant sur ce dernier, que j'ai découvert Donan. J' ai tout de suite été attiré par elle. C'était le coup de foudre pour moi. J'étais tellement épris d'elle que son statut matrimonial ne m'a pas empêché de lui faire des avances. J'avais décidé que j'allais faire d'une pierre deux coups: le ruiner et lui prendre sa femme. Mais c'était sans compter sur l'amour inconditionnel et la loyauté qu'elle vouait à son mari. Malgré tous mes efforts, elle n'avait pas cédé. Je lui ai même fait du chantage sans succès. Plus elle me repoussait, plus je l'aimais. J'avais fini par décider de la laisser et de me concentrer sur ma vengeance qui consistait à faire couler leur entreprise. Si elle voulait vivre avec son mari dans la pauvreté, libre à elle! , me suis-je dit par dépit. Mais c'était sans compter sur l'amoir de cet homme pour sa femme et ses filles. Sachant que c'était à lui que j'en voulais, il s'était suicidé afin de m'obliger à renoncer.
À cette étape de son récit, Alina ne put s'empêcher de pousser un cri d'horreur.
Il lui fit un sourire sans joie et reprit.
- Je comprend ta réaction; c'était vraiment horrible. J'ai fait de mon mieux pour l'en empêcher après avoir compris son intention à la lecture de la lettre qu'il m'avait envoyé, mais c'était trop tard. Ma seule consolation a été de savoir qu'il ne l'avait pas fait seulement à cause de moi mais aussi pour préserver sa famille d'une longue agonie, car il avait une tumeur maligne inopérable et était condamné de toute manière.
- Oh que c'est triste! Souffla Alina avant de s'asseoir, touchée par cette histoire.
- Oui, confirma machinalement Karl qui semblait toujours très touché.
Au bout d'un instant, il reprit.
- Depuis son décès, Donan ne m'a plus jamais addressé la parole... C'était comme si elle avait fait voeu de silence à mon encontre. Cela m'avait émotionnellement achevé. J'avais totalement sombré.....  Je n'arrivais pas à accepter que tout se termine ainsi. Et je n'y arrive toujours pas. Je la fais suivre depuis cinq ans pour avoir continuellement de ses nouvelles..... La suite, tu la connais. Mon père a pensé qu'en me mariant, je pourrais surmonter cette dépression permanente dans laquelle il me trouvait. Il a pris les devant et ne m'a pas laissé le choix....
- Oui la suite je la connais, répéta Alina. Je comprend maintenant un peu plus ton obsession pour elle. Je n'avais dès le départ aucune chance de te faire oublier cette histoire inachevée..... Cependant tu ne me dis pas tout Karl. S'il n'y a encore rien eu entre vous jusqu'à présent pourquoi sa cadette ressemble comme deux gouttes d'eau à notre fille?
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La revanche de DonanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant