Mon Amie

Elle était jolie pour une enfant. Elle rayonnait. Elle n'avait qu'à sourire pour qu'on lui donne le bon dieu sans confession. Elle était toujours entourée. Elle était comme le soleil de notre système solaire. Tout le monde gravitait autours d'elle. Les petits garçons étaient à ses pieds et toutes les petites filles voulaient être son amie. Si on pouvait établir une hiérarchie à l'école primaire, elle aurait été une reine. Pourtant, elle n'avait pas conscience de son influence, ou peut-être que si. Si elle s'en rendait compte, elle en jouait et elle était douée. D'un autre côté, elle paraissait trop simple pour se rendre compte de ces choses là. Et puis, sa jeune innocence lui permettrait de passer entre les mailles du filet. Du plus loin que je me souvienne, elle a toujours été ma meilleure amie. Elle m'impressionnait. Je voulais toujours être plus proche d'elle. Je voulais lui ressembler, être comme elle. Je vivais à travers elle, je voulais sa vie. Je partageais tout avec elle. Malgré notre proximité, je me sentais délaissée. On ne me donnait pas assez d'amour. Pas assez par rapport à ce que je donnais. J'avais pas confiance en moi, peut-être qu'elle aussi finalement. J'étais tellement obsédée par cette fille que je m'interdisais d'avoir d'autres amies. Il n'y avait qu'elle, seule, sur son piédestal. Elle avait une autre amie de laquelle elle était aussi proche, plus que de moi, je pensais. Plus le temps passait plus je voulais que cette fille disparaisse. Je pense que je lui ai fait du mal par le biais de certaines paroles, certaines actions. Je ne pourrais vous donner plus de détails car je ne me souviens pas tellement des ces années passées. Je haïssais cette fille car petit à petit elle m'éloignait de ma meilleure amie. Contrairement à ce que je pensais à l'époque, je me dis maintenant que la cause de notre éloignement était mon comportement. Plus tard, au cours des années collège, cette fille a changé d'établissement, par ma faute ? Je ne sais pas. J'aurais trop honte si c'était le cas. Ce qui comptait, à ce moment là, était que je me retrouvais dans la classe de la fille pour laquelle j'avais le plus d'estime. C'était une nouvelle chance, un nouveau souffle pour notre amitié. Malheureusement, elle n'avait pas changé. Les petites filles voulaient être son amie et les petits garçons étaient à ses pieds. Étonnamment, cela me dérangeait moins qu'auparavant. Peut-être parce que j'étais sur le point de me faire de nouvelles amies. Je l'adorais toujours autant, pourtant les choses étaient différentes, j'évoluais sûrement. Quelques mois avaient passé depuis le début de cette nouvelle aventure et je n'avais plus envie de partager sa vie. Je me rendais compte qu'elle ne m'apportait pas tant de choses que ça. Je vivais par procuration et cela ne me suffisait plus. Je ne pouvais pas l'abandonner du jour au lendemain. Il me fallait un déclic. C'était toxique. Toxique plus à cause de mes ressentiments et de ma vision des choses plus qu'à cause de cette fille et son influençabilité. Elle allait avec le vent, là où elle trouvait son compte. Elle prenait les mains tendues. Personnellement, je ne lui apportais rien car c'était son rôle envers moi. Aujourd'hui je vais mieux et ce depuis quelques années déjà car j'ai eu ce fameux déclic. Vous savez, dans une rupture amicale comme dans une rupture amoureuse, on passe par plusieurs stades types. Je suis passée par la colère et l'acceptation principalement. Le souvenir que je garde de cette amitié n'est ni bon ni mauvais. J'ai eu l'habitude de penser qu'elle ne me considérait pas assez et c'était vrai mais il faut avouer que j'ai passé de bons moments en sa compagnie. Aujourd'hui, j'ai changé et je ne pourrais plus être amie avec elle, on ne se ressemble plus. J'ai rencontré d'autres personnes depuis. Avoir l'habitude d'être avec certaines personnes ne signifie pas forcément que votre amitié perdure ou qu'elle le doit. Il faut choisir les gens qui nous accompagnent pour ce qu'ils peuvent nous apporter et vice-versa.