Tu es au chaud et en sécurité, tout va bien.
Encore, sans vraiment l'entendre.
Simplement le répéter comme un sort de protection.
Ça n'a pas d'importance si c'est vrai ou faux. Répètes-le.
Tu es au chaud et en sécurité, tout va bien.
Pourtant je respire irrégulièrement, mon souffle est coupé puis reprend, aletant. Mon cœur s'emballe.
Je suis dans une salle de classe avec une vingtaine d'élèves ou une trentaine... Je m'arrange pour être sur les premiers rangs en général, ça me permet de ne pas les voir, de ne pas me distraire, me perturber. Ils sont presque tous silencieux et cela me fait prendre compte que je ne supporte pas ce vide.
Il n'y a pas de brouhaha pour m'empêcher d'entendre ce qu'il se passe dans ma tête.
Je suis un mécanisme fragile qui se dérègle assez facilement.
Il a suffi que je me retrouve seul avec ma feuille et mes idées.
Il me faut une organisation très précise...mais..mais je n'ai pas réussi cette fois. Et tout s'est accéléré.
J'avais placé les documents plastifiés dans un coin de ma table, ma trousse face à moi dans l'autre coin, ma feuille de brouillon parfaitement au dessus de la copie-double qui me servira pour le propre et...
La feuille de brouillon est verte.
Ça ira. Je peux toujours écrire en noir.
Les idées fuses, des pistes où des vaisseaux se lancent et reviennent parfois avec de la patience et les bons pilotes à leur bord. Cela fait du bruit.
Mais jamais autant que les réponses.
Ça s'accumule et s'entasse en piles un peu partout. Je dois faire le tri sans perdre mes moyens. Mais ça fait tellement de bruit indéfinis et j'ai peur des bruits forts.
Ne panique pas, reprends toi.
Tu vas y arriver.
Je respire et mets mes mains sur mes oreilles.
Je me demande parfois pourquoi j'ai autant de limites, est-ce que je les ai créées seul et quand ?
J'ai une amie à côté de moi, elle sait, elle comprend... Posant une main sur mon épaule. Je ne suis pas sûr de trouver ce contact réconfortant. Ça n'est pas contre eux, c'est incontrôlable...
Elle a dû sentir, c'est incroyable d'avoir quelqu'un comme ça à mes côtés.
Elle a écrit un petit mot d'encouragement. Merci à toi.
J'ai repris ce contrôle momentanément, j'ai tenu jusqu'à la fin des deux heures.
Puis je suis parti en courant. J'ai trouvé un petit ange et je me suis reposé contre lui. J'ai pleuré. J'ai tout lâché. Ça faisait du bien. Et je me suis légèrement endormi, las d'être le pantin de mes émotions.
