1- Fais pas ton crevard !

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Un souffle tiède au creux de son cou. Une main délicatement posée sur sa poitrine nue. Un corps chaud et entièrement dénudé contre le sien et quelques cheveux qui lui chatouillaient gentiment le visage. Une sensation de bien être étrangement familière et d'une couette chaude lui couvrant à peine le buste. Elle avait les yeux fermés mais savait très bien qui était la personne qui était à ses côtés, ce lundi matin. Elle reconnaissait parfaitement cette douce odeur de fraise subtile et délicate qui l'apaisait et l'énervait en même temps. Anna. Encore. Merde.

Ash ouvrit les yeux lentement, mais les referma aussitôt en grimaçant, éblouie par le soleil qui était déjà haut dans le ciel. Quelle heure était-il au juste ? Peu importe, il fallait qu'elle parte de là. Elle prit quand même le temps de s'habituer à la lumière du soleil et tourna doucement la tête sur le côté, apercevant la fille avec qui elle avait, encore une fois, partagé son lit. Elle prit une minute pour observer le corps nu d'Anna contre le sien, regarder son visage angélique à demi caché par quelques mèches de ses cheveux blonds, remarquer les suçons dans son cou et sur ses épaules, parsemant sa belle peau blanche et la rendant encore plus attirante. Elle se laissa bercer un instant par la respiration paisible de sa partenaire, contemplant et dévorant chacune de ses courbes d'un regard insatiable. Elle ne pouvait pas se lasser de cette vue qui, pourtant, au plus profond d'elle, l'agaçait et la frustrait au plus haut point. La rouquine fut rapidement tirée hors de sa rêverie par un léger mouvement de la part de son amante qui commençait lentement à sortir de son sommeil. Il fallait partir, maintenant. Ash fit tout son possible pour sortir du lit sans réveiller Anna et se mit à chercher ses vêtements qui devaient être éparpillés aux pieds du lit et poussa un soupir de soulagement en les trouvant à leur place, aux pieds du lit. Elle se rhabilla, enfila son T-shirt blanc, son pantalon noir, sa veste vert kaki et grommela en cherchant ses chaussures. Elle les trouva finalement, les enfila et prit son téléphone sur la table de chevet. Enfin elle pouvait partir. Elle déposa un baiser sur le front de la fille endormie et partit sans faire de bruit, soulagée de ne pas avoir à affronter le regard sévère de sa petite amie qui, malgré tout, lui paraissait comme étant, encore une fois, une parfaite inconnue.

Enfin, elle était dehors, la brise soufflant dans son visage et les rayons du soleil lui réchauffant lentement la peau. Elle mit un petit moment à se repérer au milieu des gens qui marchaient dans la rue comme des robots, captivés par leur téléphone, et commença à marcher pour rentrer chez elle. Il était lundi et elle avait cours, mais elle s'en fichait royalement. Elle passa par le parc municipal et plongea rapidement sa main dans sa poche, espérant trouver ce dont elle avait envie depuis quelques longues minutes maintenant. Elle grimaça et lâcha un juron en faisant demi tour d'un coup, ne trouvant pas l'objet de son bonheur. La rouquine trottina jusqu'à arriver devant la maison d'Anna, qu'elle dépassa avec hâte, sans même y jeter un œil. Un stress mêlé à une colère soudaine l'envahissait peu à peu tandis qu'elle arrivait rapidement devant la Rue Chapstal, qu'elle ne connaissait que trop bien depuis le temps. Elle aperçu finalement un jeune homme, adossé contre un mur au bout de la rue, qui fumait une cigarette tranquillement, jouant avec la fumée comme un enfant. C'était un grand brun, assez mince, avec des yeux bleus clairs qui ressemblaient à deux perles, froides et sans émotions. Au dessus de sa perle droite, Ash pouvait clairement voir une large cicatrice assez vieille et dont elle n'avait jamais pu en connaître la cause. Il la vit et un léger sourire se dessina sur son visage un peu pâle, sûrement à cause de la fatigue, éclairant alors son air qui avait l'air si froid et fermé quelques secondes auparavant.

« Hé, Ash ! Salut ma belle.

- Bonjour Alexandre. »

Ce dernier jeta sa cigarette par terre d'un geste soudain en s'avançant vers son amie, son sourire s'agrandissant rapidement, au grand désespoir de la jeune femme qui n'était pas vraiment d'humeur.

« Laisse moi deviner, tu n'as plus de beuh ? Si c'est le cas vas falloir que tu me payes pour en avoir, aujourd'hui et aussi pour les deux dernières fois. Tu te souviens ? Ces fois où tu m'as assuré que tu me paierais bientôt, hm ? »

Ash grimaça simplement en soupirant. Elle sentait une boule de stress et surtout de frustration remonter le long de sa gorge. Elle ne voulait pas discuter ou négocier, il lui fallait juste sa drogue quotidienne, et vite car elle commençait déjà à s'énerver.

« Écoute, là je sors de chez Anna et j'ai pas d'argent sur moi. Je te jure que je te paye bientôt, j'ai juste besoin d'un peu de t...

-De temps. Parce que tes parents t'ont lâché, tu galères avec tes études etc etc. Te fatigue pas, je connais la chanson, Poil de Carotte.

-Alexandre s'il te plaît, annonça Ash qui commençait à monter la voix peu à peu, je vais te payer t'inquiète. Mais là c'est chaud pour moi. Aller s'il te plaît.

-N'insiste pas Ash. Je t'ai dis non. Tu me passes l'argent ou tu repars mais viens pas me faire chier, j'ai des clients qui doivent arriver d'une minute à l'autre et ils ont sûrement pas envie de te retrouver là.

-Putain Alexandre fais pas ton crevard et passe moi la beuh !

-Ash j'ai dis non ! Casse toi et reviens quand tu as de l'argent ! »

Cette dernière tourna les talons en grognant, furieuse et frustrée.

« Putain ! Vas-y je me barre, tu fais ta pute aujourd'hui. Connard va. »

Et c'est ainsi que la rouquine se retrouva au milieu du trottoir et des mêmes robots fixés à leur téléphone, à sentir les premiers effets qui indiquaient déjà qu'elle était en manque. Après une longue minute de réflexion, elle décida finalement d'aller en cours, pensant que, de toute façon elle n'avait rien à faire chez elle et que l'ennuie était définitivement son pire ennemi dans ces cas là. Elle fit donc un effort pour tenter d'arrêter son début de tremblement et prit le bus en prétextant avoir oublié sa carte auprès du chauffeur. Elle détestait prendre le bus, elle s'y sentait serrée, étouffée, compressée... On entendait les enfants pleurer, les racailles du coin écouter leur musique au volume maximal sans se préoccuper des autres, la radio qui passait toujours les mêmes musiques que plus personne n'écoute depuis deux mois, les vieilles dames qui demandent à s'asseoir, on sentait le bus freiner d'un coup et nous brusquer, on sentait les autres personnes se serrer et se coller contre nous comme des parasites quand le bus était trop remplie, il y avait toujours un groupe de filles qui riaient bien trop fort. Ash avait toujours envie de crier et de sauter par la fenêtre pour fuir loin de tout ce monde. Mais si elle ne voulait pas être en retard en cours, elle n'avait pas le choix. Elle prit donc sur elle et essaya de penser à autre chose, d'évacuer sa frustration. Elle eut tout le mal du monde à se contenir. Le trajet passa plus vite que prévu et la rouquine sauta sur le trottoir dès que les portes furent ouvertes.

La pression montait pour Ash qui se sentait devenir nerveuse et presque agressive au fur et à mesure que le temps passait. Il fallait qu'elle se calme, qu'elle pense à autre chose, qu'elle arrête de se focaliser sur sa drogue matinale. Mais comme le disait si bien son prof de psychologie sociale : le cerveau ne comprend pas la négation. Elle pénétra dans l'établissement en regardant ses pieds taper durement le sol à chacun de ses pas qui semblaient la mener d'eux même, d'une manière ou d'une autre, vers ces produits illicites qui l'attiraient tant. La jeune fille essaya de penser à autre chose ; sa relation compliquée avec Anna ? La soirée nulle hier ? Son meilleur ami Mika qui devait encore être en train d'essayer de séduire lamentablement la populaire Mélanie, la fille de ses rêves ? D'ailleurs où était-il, celui là ? Elle n'eut pas le temps d'y réfléchir davantage qu'elle fut bousculée par une fille qui ne broncha même pas lors de la collision. Ce fut la goutte de trop pour Ash qui se tourna vivement vers la fille en question, prête à lui décocher un de ses fameux regard assassin, et se retrouva face à une jeune femme plus grande qu'elle, avec de longs cheveux presque noirs qui lui arrivaient dans le bas du dos. La rouquine leva les yeux vers cette fille et croisa un regard magnétique qui lui arracha un violent frisson. Les yeux bleus-gris perçants de l'inconnue qui semblaient la sonder la mettaient mal à l'aise, ils étaient pénétrants, intenses et effrayants. Indescriptibles, ils semblaient creuser au plus profond de votre âme pour y déloger le moindre de vos secret. Néanmoins, la rouquine fronça les sourcils et grogna sur la fille, n'ayant pas de temps à perdre avec elle. Suite à cela, elle cracha d'un ton froid et venimeux, plus qu'elle ne l'aurait voulu.

« Fait attention où tu vas. »

Elle tourna les talons et partit aussitôt en pressant le pas, énervée et perturbée, sous le regard de l'inconnue, immobile, qui n'avait toujours rien dit.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 15, 2019 ⏰

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