Journal de bord d'un homme transgenre

Mise en contexte

 Pour que vous compreniez, je vais rapidement placer un contexte sans rentrer dans les détails. Ces derniers viendront sûrement en fonction de ce que j'aurai à raconter avec le temps.

Qui suis-je ?

Je m'appelle Eden. Ce prénom est mon prénom de naissance. J'ai la chance d'être né avec un prénom mixte. Je vois beaucoup de personnes transgenres ftm (female to male) choisir ce prénom quand ils en changent. Est-ce que je vais garder ce prénom ? Peut-être. Peut-être pas. La suite nous le dira. J'ai 19 ans, 20 dans quelques mois. Je suis né le 6 Mars 2000 à Schoelcher, une jolie ville en Martinique. J'ai vécu en Martinique pendant à peu près 16 ans, si on ne compte pas la période en Guadeloupe où ma petite soeur Lou est née, et si on ne compte pas non plus l'année dans le Sud de la France, que nous avons rapidement quittée car je ne supportais pas la France. Alors non, à 3 ans je ne disais pas que je n'aimais pas la France, c'était juste que mon corps ne supportait pas le froid. Bref, retour à la case Départ et me revoilà sous 35 degrés.

J'ai globalement toujours grandi avec les mêmes personnes, et avec mes deux parents. J'ai aussi un demi-frère du côté de ma mère, mais il a quitté la maison quand j'avais 8 ans à cause de sa relation trop violente avec mon père. D'ailleurs, à ce jour, j'ai également coupé les ponts avec mon père depuis quelques semaines et je suis décidé à ce que ça tienne. 

A l'école, qui est-ce que j'étais ? 

En primaire, j'étais la petite fille aux allures d'ange qui pleurait quand elle devrait quitter sa maîtresse à la fin de l'année. J'offrais des cadeaux régulièrement et je crois que tout le monde m'aimait plus ou moins. Pourquoi je dis la petite fille ? Car ça reflète vraiment la douceur et la joie -ainsi que les vêtements - que j'avais en moi à cette époque. 

Au collège, c'était différent. Je sortais avec des filles et des garçons, jamais bien longtemps, et si moi je n'y voyais pas le mal, les autres le voyaient. Rapidement, j'ai été rejeté par la plupart des gens. J'étais juste l'élève aux bonnes notes qui faisait pourtant pas grand chose, et qui était détesté par la plupart des gens. Je suis tombé amoureux d'une fille en 6ème, et je l'ai aimée jusqu'à la fin du collège. C'est également à cette époque que j'ai fait connaissances avec l'auto-mutilation, la guerre avec les parents, et avec tout ce qu'on peut ressentir de mauvais. Je n'ai pas arrêté de sortir avec différentes personnes malgré que j'aimais une fille, et malgré que la plupart des gens me détestaient au point de devoir me faire quitter le collège par sécurité pour moi une fois.

Au lycée, tout s'est arrangé sans que jamais je ne comprenne pourquoi car je n'avais pas changé mes habitudes. Je crois qu'on avait entendu parler de moi un peu partout, et bizarrement, ça a eu un effet positif sur ma réputation. Début seconde, j'avais l'impression d'être une star et de vivre dans un film. J'avais une copine plus agée, youtubeuse et top-model, je faisais tout ce que je voulais au lycée, et les filles étaient à fond sur moi. Il m'est même arrivé de voir les filles réagir comme si elles avaient vu leur idole quand je leur faisais un clin d'œil. Je raconterai quelques anecdotes plus tard. Mais très vite, j'ai laissé tout ça de côté pour conquérir Rosiane, une femme pour qui j'ai eu un coup de foudre littéralement. J'ai laissé tomber tout le reste, n'ayant qu'elle en tête, malgré ses refus. A ce jour, on est en couple depuis 4 ans. Fin seconde, je dois faire les adieux à ma bien aimée et à la Martinique. Me voilà en France, en pleine campagne, sans le moindre repère. Ce nouveau lycée sera une catastrophe. Entre doutes sur ce que je veux faire plus tard, la S alors que j'aimais les matières littéraires, et les problèmes avec les autres élèves, rien n'était stable dans ma vie à ce moment-là. 

Finalement, j'arrive à la fac. Je choisis la fac de langues, je réussis ma première année durant laquelle je retrouve ma chérie mais nous restons à 400km de distance. Au bout d'une année validée, je me rends compte que je n'aime pas ce que je fais et me voilà en deuxième année de licence en Décembre, à demander une réorientation en L1 pour Janvier.

Et maintenant ?

 Entre temps, mon coming-out trans a eu lieu, et vivre avec ne m'a rien facilité du tout. Je suis sur la fin de mon couple, mon père et moi on ne s'adresse plus la parole, et ma mère et moi avons des différents mais on reste proches car elle a un cancer. Je l'accompagne toutes les semaines à l'hôpital et je vois de temps en temps ma petite soeur. Rien n'est sûr pour mon orientation, et dans deux jours je revois mon psychiatre pour parler des hormones, mais ma mère va le rencontrer pour la première fois, et ce sera un tournant dans ma relation avec elle et dans sa compréhension envers ma transidentité. Noël arrive, et je ne sais toujours pas si je vais rentrer chez mes parents à cause de mon père. Au nouvel an, je vais sûrement vivre la rupture la plus destructrice de ma vie, et à la rentrée devoir tout recommencer à zéro socialement.

Bref, un joli bordel m'a été offert pour les fêtes de fin d'année.