Souris, Izuku

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Pour Todoroki Shoto, la mort avait toujours fait partie de son quotidien. Que ce soit les moments d'angoisse quand il était petit lorsque son père partait à l'improviste combattre de dangereux vilains et ne revenait que beaucoup plus tard. Que ce soit l'annonce morbide de sa mère à ses quatre enfants lorsque ses deux parents étaient morts dans un accident de voiture. Que ce soit dans les livres d'histoire que son père le forçait à lire et relire, aux informations qui passaient le matin à la radio, ou même dans son propre jardin, quand son frère s'amusait à embêter l'enfant qu'il était en trouvant des cadavres d'insectes, la mort avait toujours été un concept bien réel qu'il avait compris très jeune.

D'autant plus aujourd'hui. En choisissant la voie de héros, Shoto était conscient que sa propre mort risquait d'arriver plus vite que prévu. Et au vu de la scolarité mouvementée qu'il avait suivi à Yuei, on aurait pu penser que c'était un miracle que tous les élèves s'en soient ressortis indemnes. Pour le métier de héros, plus que pour n'importe quel autre, la mort pouvait les attendre à chaque tournant. Shoto pouvait se retrouver face à un vilain dont l'alter surpassait le sien. Il pouvait se retrouver seul face à plusieurs adversaires, il pouvait tomber dans une embuscade, ou simplement faire une erreur de maladresse qui lui coûterait la vie. Il pouvait mourir en essayant de protéger et sauver des civils, il pouvait mourir dans une catastrophe naturelle causée par l'alter d'un vilain, l'effondrement d'un immeuble, un incendie, un glissement de terrain ou même purement et simplement à cause d'une balle tirée en pleine poitrine.

Et sans compter tous les risques du métier de héros, il y avait tant d'autres façons de mourir, tant d'opportunités pour la mort de refermer ses griffes froides sur lui. Il pouvait tomber malade, se retrouver impliqué dans un accident de voiture, simplement trébucher dans des escaliers et mal retomber. Il avait envisagé, plusieurs fois, le cas de figure où il causait sa propre mort, où son alter échappait à son contrôle et où chacun de ses organes gelaient les uns après les autres, où il aurait senti le froid grandir encore et encore, envahissant son être tout entier, jusqu'à atteindre son cœur et le contraindre à cesser ses battements. Il avait imaginé son feu le consumer de l'intérieur, brûlant artère et vaisseaux, détruisant, carbonisant, et ne laissant rien sur son passage. Il avait imaginé la chaleur le submerger et l'avaler complètement, jusqu'à qu'il ne voit plus que du rouge, du rouge partout.

Parfois, dans ses cauchemars, il succombait aux coups et aux insultes dont son père le submergeait durant sa scolarité. Parfois, c'était une théière d'eau bouillante qui prenait la place de l'homme flambant et qui le rongeait jusqu'à ne laisser derrière elle que des os méticuleusement nettoyés. Et parfois même, c'était lui-même qui décidait qu'il en avait assez et laissait sa glace échapper volontairement à son contrôle.

Mais malgré toutes ces possibilités, tous ces avenirs morbides et ces fins tragiques, Shoto n'avait jamais eu peur de la mort. Il s'était toujours dit que si elle arrivait un jour plus tôt que prévu, alors c'était sans doute que ce n'était pas si imprévu que cela. Et alors, il pourrait enfin reposer en paix, loin de tous les problèmes qui ne concernaient que les vivants.

Ce n'est qu'après son entrée à Yuei que son point de vue avait commencé à changer. Il n'avait accordé que très peu d'importance à ses camarades de classe durant le début de l'année, à l'exception de Yaoyorozu qu'il avait déjà croisé quelques fois lors de galas auxquels son père l'avait forcé à assister. Mais le tournoi du lycée avait bien vite changé cela, la quasi-totalité de son combat contre Midoriya restant encore gravé dans sa mémoire, comme si tout son être le priait de ne pas l'oublier, de ne pas oublier pourquoi il continuait à utiliser son feu aujourd'hui. Et depuis ce jour-là, Shoto avait fait un effort sincère pour s'intéresser à ses camarades. Midoriya en particulier. Et plus le temps passait, plus Shoto se disait que non, il ne voulait pas mourir. Il voulait vivre, continuer à vivre le plus longtemps possible, pour continuer à voir les sourires de son ami éclairer des pièces entières, continuer à entendre son rire et voir couler ses larmes parce que Shoto ne s'était jamais senti aussi vivant qu'à travers toutes les émotions que Midoriya affichait si sûr de lui. Et un jour, face à un énième vilain s'en prenant à leur classe, il avait réussi à bloquer une attaque qui aurait sûrement blessé gravement, voire tué Midoriya, avec un mur de glace dressé juste à temps. Et ce jour-là, il s'était rendu compte que s'il mourrait, Shoto voulait mourir pour Izuku.

Souris, IzukuWhere stories live. Discover now