Prologue

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“Mirror on the wall, here we are again
Through my rise and fall, you've been my only friend
Told me that they can understand the man I am
So why are we here talking to each other again ?”
Bruno Mars
in Mirror ft Lil Wayne.

°°°
— Nouria ! Nouria ! Oumma ! (lève-toi)

Hein ?
Je cligne des yeux et finis par les ouvrir. Adda¹ se tient debout près de moi. Je m'étire tout en baillant.

— Va réveiller tes soeurs ! C'est l'heure de la prière. Tu connais comment est votre père si vous arrivez en retard.

J'hoche juste la tête et dit un faible "d'accord" presqu'inaudible, en me levant, sortant du lit.

Je réveille mes soeurs et nous partons faire nos ablutions tandis que la voix du muezzin continue de raisonner.

Je prend mon himar et mon tapis de prière accompagné d'un chapelet et du livre Saint. Perdue dans mes pensées, je me dirige vers ma mère afin de prier en groupe avec les autres femmes de la concession familiale.

La prière terminée, j'ouvre le livre Saint au même rythme que mes soeurs. On se croirait dans un centre où tout est effectué dans une synchronisation ennuyeuse suivant des règles quotidiennes strictes. Je fais semblant de lire, les yeux rivés sur les belles lettres arabes, symbole de la parole divine transmises aux hommes. Mon corps était présent, mais mon esprit, lui il vagabondait.

— Nouria, ma fille, prépare toi, tu épouseras le...

Tout mon monde s'était écroulé. Je n'avais même pas pu écouter la suite des propos de ma mère quand mon père la chargea de m'informer sur mon futur mariage.

Mariage ?! Je ne me sentais plus en sécurité. Je sais que ce qui m'attend sera un vrai calvaire. Oui, je sais que le mariage est quelque chose de bien, ça permet de compléter son dîne. Ses bienfaits et avantages sont bien connus. Mais là, ce n'est pas un mariage. On ne demande pas mon avis, il n'y a pas de consentement. Mon père a tout décidé. Je ne peux pas refuser. À quoi bon ? Nous savons tous dans cette maison que nous n'avons pas le droit de lui dire non. Nous devons tout simple suivre le mouvement, suivre les instructions, suivre les règles. Nous avons tout ce que nous souhaitons : nourriture, habits, bijoux, et j'en passe. Mais nous sommes dans une prison dorée.

Tout n'est qu'apparence !
Nos mères, femmes d'un grand Alhadji, sont admirées et enviées mais les gens ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Tout n'est qu'apparence !
Ils ne savent pas qu'à l'intérieur de cette splendide villa familiale qu'ils envient tous, ces femmes sont plus tristes que la tristesse elle-même. Plongées dans des appartements à air conditionné, quand le rideau de la nuit enveloppe la ville dans ses ténèbres, elles versent des larmes silencieuses, seules marques de leur amertume sans fin.

Les jours suivants j'ai appris l'identité de mon futur "époux", s'il le devient même. Un homme de quarante ans, qui a déjà une femme, et des enfants de mon âge ! De surcroît, c'est l'un des partenaires commerciaux de mon père ! En somme, Hamma² m'a en quelque sorte vendu ! Cet homme, en m'épousant, s'engage à vie à marchander avec mon père. Je ne suis qu'un pion sur leur échiquier, un simple pion leur servant à renforcer leur partenariat commercial.

Je ne comprend pas. Je ne comprend vraiment pas. Certes, je l'avoue, je m'attendais bien un jour que mon père m'attribue un époux choisi par ses soins. Mais pas si tôt ! Je n'ai que dix-sept ans ! J'ai toujours été une fille exemplaire pour mes parents, d'ailleurs ils m'ont toujours qualifié d'enfant la plus douce. J'ai toujours été une élève exemplaire. Je n'ai jamais repris de classe, je suis toujours parmi les trois premiers et en plus, une brillante élève de la Terminale C ! J'espèrais aveuglement et naïvement qu'avec mes résultats scolaires, Hamma, me laisserait continuer jusqu'à l'obtention de mon diplôme d'ingénieur qui est mon rêve ! Par la suite, épouser un jeune homme de ma génération, même si mon père le choisit, au moins, j'aurai la chance de le connaître même un peu avant de m'engager. Mais là, il s'agit d'un homme pouvant être mon père, qui tend à tripler mon âge, et encore qui ne veut pas que ses épouses fassent de longues études et le fait d'avoir un emploi est un vrai tabou !

Pourquoi Hamma ? Pourquoi moi ? Que t'ai-je fait ? Tu aurais pu choisir Kania. Elle, qui est bien belle, longs cheveux, nez fin, teint d'ébène et qui désire haut et fort se marier le plus tôt possible à un homme riche et réputé. Mais non. Tu ne l'as pas choisi. Tu as jeté ton regard sur moi, la petite Nouria brune mais avec des cheveux si courts qui font honte à l'illustre qualité de la longue chevelure des peules. En me choisissant, tu as augmenté la haine ou la jalousie de Kania envers moi. Ma mère me dit qu'elle a toujours été jalouse de mon teint brun semblable à du chocolat blanc. Or moi, j'enviais et j'envie ses longs cheveux lui arrivant aux reins. Nous partageons certes le même père, mais à cause des differends de nos mères, nous sommes en froid : famille polygamique !

Adda, j'ai peur. Wallahi³ j'ai peur ! J'ai peur de subir le même sort que ma soeur Rougayatou: être répudiée avec son enfant et retourner chez ses parents, retour à la case départ ! Est-ce ça que tu veux que j'endure ? Ou bien finir comme notre Fadimatou, paix à son âme: mariée à quinze ans et morte d'une grossesse précoce. J'ai si peur. Ya Allah, aide-moi !

— Nouria ! me chuchote ma soeur Rougayatou en me donnant un coup de coude.

Je sors immédiatement de ma transe et remarque que des larmes coulent en silence sur ma joue. Rougayatou a remarqué cela mais également le fait que j'étais toujours sur la même page depuis des minutes.

Contrôle-toi. Refoule tes sentiments. Ne laisse pas tes états d'âme prendre le dessus. Je répète ces paroles dans mon coeur et essuie rapidement mes larmes.

Le temps de lecture terminé, chacun se rend dans l'appartement de sa mère. Nos regards se croisent avec Kania, elle me regarde avec dédain, comme d'habitude, et s'en va. Avec Kania, c'est toujours pareil ! Et dire qu'elle n'est que mon aînée de quelques mois. On dirait qu'être née la même année que moi l'exaspère au plus haut point. Je soupire, lassée et regagne l'appartement de ma mère suivi par Rougayatou.

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1. Adda: surnom de la mère de Nouria.
2. Hamma: surnom du père de Nouria.
3. Wallahi: expression s'associant au fait de jurer.

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Hi everybody 👋
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Alors, alors, que pensez-vous de ce prologue ? Des ressentis de notre petite héroïne ?

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Mlle Sucrerie 🍫

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 24, 2020 ⏰

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