Chapitre 4

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Après quelques pas supplémentaires, dans le silence le plus total pour nous deux. Personnellement, je ne veux pas être désagréable envers cette pauvre femme. Elle n'y est pour rien.

Et elle ne doit pas avoir envie de continuer à me divulguer des informations dont j'ignore encore tout. Ce n'est jamais évident d'être le messager, surtout quand les nouvelles ne sont pas bonnes.

Elle interrompe notre silence lorsque nous arrivons devant une porte.

— Voici, l'infirmerie. On a allongé Lola depuis sa chute. L'infirmière est restée chaque seconde avec elle pour la surveiller, le temps que vous arriviez.

— Très bien, merci.

Je ne sais pas quoi ajouter donc je me contente d'ouvrir la porte. Après le petit discours de Mlle Sanchez, j'appréhende un peu. Dans quel état, je vais retrouver ma Lola, la prunelle de mes yeux, celle pour qui je travaille tant.

Je me faisais un sang d'encre pour rien. Elle est allongée dans un petit lit à papoter tranquillement et gentiment avec l'infirmière, de choses et d'autres, comme deux vieilles copines qui viennent de se retrouver après s'être perdues de vue depuis des années. Lorsqu'elle me voit, elle stoppe net sa conversation avant de sauter du lit pour venir se réfugier dans mes bras.

— Papa !

Rassuré qu'elle ne soit pas en train de se vider de son sang dans un recoin de son école, je la sers fort contre moi, peut-être un peu trop mais je ne peux pas m'en empêcher, c'est ma façon de me rassurer. Je ne sais pas ce que je deviendrais sans elle. Je n'imagine pas ma vie sans elle, maintenant, et surtout je serai perdu si elle n'en faisait plus partie.

Du coin de l'œil, je vois bien que l'infirmière me reluque des pieds à la tête. Elle doit me trouver à son goût. Il est vrai que mes yeux bleus et mes cheveux châtains clairs, m'ont valu quelques succès auprès de la gente féminine. Sûrement la vague ressemblance avec les surfeurs qui m'aident à draguer. Cet effet est même accentué l'été lorsque je commence à bronzer. Je cultive même un peu le style en gardant mes cheveux un petit peu longs, mais pas trop, une dizaine de centimètres pas plus, n'oublions pas que je suis cuisinier, et retrouver des cheveux dans sa soupe, ce n'est pas très vendeur. Et je n'aime vraiment pas mettre de filet sur ma tête, ma toque me suffit.

Je ne suis pas super musclé comme pourrait l'être certain. Je suis un savant mélange entre le « je m'entretiens à la salle de sport » et le « je bouffe beaucoup trop ». Je possède une certaine force qui m'aide dans ma vie quotidienne. Et comme beaucoup de personnes de mon âge, j'essaye d'aller régulièrement à la salle de sport, entre une et trois fois par semaine.

Mais tous mes efforts sont réduits à néant par mon métier, je suis continuellement obligé de goûter les plats que je réalises. Il y a donc plus de chance de trouver des tablettes de chocolat dans mon placard, avec lesquelles je vais réaliser des super desserts, que de les voir apparaitre sur mon ventre comme par magie. Je n'ai quand même pas un ventre énorme comme possède beaucoup de chefs cuisinier ou pâtissiers, je suis svelte mais certainement pas sculpté.

Depuis le temps, j'ai également remarqué que mon métier faisait saliver d'envie certaines femmes. Vous imaginez un homme qui sait cuisiner à la maison. Je soupçonne que plus d'une femme m'ont sauté dessus juste pour cette raison. Mais mesdames, quitte à vous décevoir, je n'aime pas être réduit à un chef cuisinier, il y a pleins d'autres choses que je sais faire, et bien faire.

Depuis que Lola est inscrite dans cette école, c'est la première fois que je vois cette personne dans le personnel de l'école. Elle a dû faire son entrée dans cet établissement à la rentrée de Septembre.

Elle est bien plus jeune que Mlle Sanchez. J'ai l'impression qu'elle sort même de l'école d'infirmière tellement elle me semble jeune. Tout comme moi, elle est dotée de cheveux châtains, mais légèrement plus foncés que les miens. Ou alors c'est sa tresse qui accentue cet effet. Un léger maquillage rehausse la profondeur de son regard. Il est vrai qu'elle est plutôt charmante. Mais je ne chasse plus vraiment, et encore moins avec les personnes qui côtoient quotidiennement ma fille.

Après nos retrouvailles père/fille, l'infirmière, toujours en présence de la directrice, m'explique les recommandations à adopter pour les prochaines 24 heures.

— M. Blanc, faite bien attention aux pertes de connaissance ou si elle vomit ou encore si elle a des propos incohérents. Si l'un de ces cas de figure se produit, je vous recommande de la conduire immédiatement aux urgences. Elle pourrait avoir un traumatisme crânien dû à sa chute.

Même sa voix est agréable à mes oreilles. C'est bien dommage que cette jeune personne travaille dans l'école de Lola, car cela fait bien trop longtemps que je n'ai pas passé du bon temps avec une femme. Et mon corps commence à être sérieusement en manque d'attention.

On récupère les affaires de ma fille, dont un sac particulièrement gros qui doit contenir des affaires de rechange durant l'absence de sa mère. Au vue de la taille du sac, je dirais qu'elle s'absente pour un bon bout de temps. Je note dans un coin de ma tête d'interroger Lola quand on se retrouvera tous les deux en tête à tête, on n'a pas besoin de se donner en spectacle.

En quittant l'infirmerie, je vois bien que l'infirmière me fait un clin d'œil, au cas où je n'avais pas remarqué son intérêt pour moi. Je fais comme si de rien n'était. Notre relation n'ira pas plus loin que là.

Sur le chemin du retour jusqu'à ma fourgonnette, la directrice se confond en excuses plusieurs fois, même peut être un peu trop, à mon goût.

— Au nom de tout le personnel éducatif, je tiens à renouveler nos excuses de se regrettable accident.

C'est bon, il n'y a pas mort d'homme, non plus. Même s'il y a une heure encore je n'en étais pas vraiment persuadé. Je pense qu'elle fait tout ça pour être sûr que je ne le reproche pas à l'établissement. Il y a de plus en plus de personnes procédurières, Mlle Sanchez doit avoir peur que j'en fasse partie. Qu'elle se rassure, je ne ferais rien, un accident arrive vite surtout avec des enfants de cet âge. Et Lola n'a rien, je ne vois pas l'intérêt d'intenter une action en justice contre l'école, surtout pour la dernière année de ma fille, ça serait une pure perte de temps et d'argent pour tout le monde.

— J'espère revoir très rapidement Lola dans notre établissement en plein forme, prête à étancher sa soif de savoir.

C'est quoi cette expression, plus personne ne l'utilise. Ah, sacrée Mlle Sanchez, il n'y a bien qu'elle pour utiliser des expressions du siècle passé. Et à l'heure actuelle, plus personne ne va à l'école pour le plaisir. On y va avec un coup de pied dans le cul de nos parents. Ce qui était déjà le cas à mon époque, pour dire.

— Au revoir, Mlle Sanchez.

— A bientôt, ajoute Lola.

Moi aussi, j'espère qu'elle va retourner à l'école très vite. Je n'aime pas lui faire manquer l'école trop longtemps. Pour sa vie future c'est important de faire des études pour avoir un bon travail et une bonne situation. Et ça commence depuis le plus jeune âge. Je suis bien placé pour le savoir, n'ayant même pas le BAC, j'ai ramé pour monter mon entreprise. Je n'aurais rien pu faire sans mon comptable. D'ailleurs en pensant à lui.

— Lola, cette après-midi, j'ai rendez-vous avec mon comptable. Tu veux venir avec moi ou tu préfères que je te dépose chez mamie ?

Je n'ai pas fini ma phrase que Lola vomit ces tripes sur le parking de l'école à proximité de ma camionnette. En voilà une réponse claire et concise, comme quoi dès fois nous n'avons pas besoin de mot pour nous exprimer. Allez aux urgences, et sans perdre une minute.

True love never ends (Sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant