III

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Toutes les bonnes choses avaient une fin, selon un dicton populaire. Amir put en attester ce soir-là. L'amour était un sentiment si noble qui embrasait les esprits et les pensées mais lorsque la raison s'en mêlait, il désertait soudainement, ne laissant que des souvenirs calcinés et de tendres paroles brulées. Il ne voulait pas d'enfant et le fait que Dina en veuille le posa pour la première fois sur terre de force. Il refusait de briser l'équilibre parfait qu'ils formaient, 1+1+1 n'avait jamais donné 2.

Être père ne l'avait jamais effleuré, il ne serait pas bon parent. La tête dans les nuages plutôt que dans le berceau, il ne verrait pas son fils ou sa fille grandir. À l'instar d'une plante, un enfant avait surtout besoin d'attention, chose qu'il ne pouvait lui donner. Être professeur lui permettait de tricher, de faire mine d'être un adulte sur qui on pouvait compter. Mais en réalité, Amir ne rêvait que de retourner sur les bancs de l'université. Être un éternel étudiant avait un relent de mirage.

Pourtant il aimait Dina. Et c'était parce qu'il lui était tant attaché qu'il décida de la libérer de ses chaines et de la laisser voler libre. La maintenir près d'elle ne lui apporterait ni joie, ni félicité puisqu'il ne pouvait lui offrir ce qu'elle souhaitait par-dessus tout: la maternité. Elle dépérirait. Alors un matin, au beau milieu de tartine et de marmelade, il lui annonça qu'il la quittait. C'était irrévocable. Le café dans sa bouche s'était fait plus amer que d'ordinaire, le sucre n'y faisant aucun effet. À travers la fenêtre, la pluie était torrentielle, parfait reflet de son moral morose. Il sut qu'il était vraiment triste, plus qu'il ne le laissait paraître car Dina prit sa mine tranquille pour de l'indifférence. Elle encaissa le coup avec difficulté mais se mit à pleurer la perte d'un rêve, celui d'une famille unie avec cet homme chéri.

Mais c'est à l'instant où elle saisit qu'Amir l'abandonnait elle aussi qu'elle se mit dans une colère folle. Un ego meurtri et à nouveau blessé n'était que préambule de catastrophe. L'inoffensif couteau à légumes qui avait animé de grands moments cuisine entre les deux tourtereaux se révéla être plus que cela, il s'avéra être celui qui priva Amir d'une vie future. Mais avant de fermer les yeux à jamais, ce dernier eût le temps de lui souffler qu'il ne lui en voulait pas. Parce qu'à présent, elle était libre. Il était, lui aussi, devenu un éternel voyageur entre deux cieux. Libre. Mais il appartiendrait à cette femme à tout jamais. Dans la cuisine, Dina se sentit si misérablement seule. Le couteau en main, elle pleura sur sa propre condition mais elle le savait déjà, 1-1 ne pouvait que donner 1.

Amir et DinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant