Chapitre 17

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De retour dans leur chambre après le dîner donné dans la grande salle, la porte fut à peine fermée que Mordred lui lança un regard sondeur. Leïa tressaillit. Fallait-il qu'elle lui dise ? Après tout, elle ne voyait toujours pas pourquoi le Roi lui avait conseillé de ne pas le faire. De toute façon, à qui devait-elle faire confiance ? À ce roi qu'elle connaissait à peine ou à son mari qui avait à plusieurs reprises risqué sa vie pour protéger la sienne ? Elle allait ouvrir la bouche pour le lui avouer quand il lui coupa l'herbe sous le pied : « Leïla, tu sais que tu peux me faire confiance. Et je sais aussi que tu ne me trahiras pas. C'est pour cela que je n'exigerai pas de toi que tu me dises ce dont le Roi et toi avez réellement parlé. Mais peu importe mes ressentis, je veux que tu me promettes une chose : ne te mets pas en danger et ne fait rien qui puisse se retourner contre toi.

La jeune femme tomba des nues. Alors qu'elle était prête à tout lui avouer, de peur de l'éloigner d'elle, il lui offrait son soutien indéfectible. Presque inconsciemment, elle se mit à sourire.

  - Je te promets que je ne ferais rien qui me mettrait en danger. Ce dont j'ai parlé avec le Roi, je ne peux pas te le dire pour le moment mais dès que je le pourrais, je viendrais immédiatement vers toi.

Mordred lui porta un regard grave, inquiet, avant de lui lancer un sourire contrit. Poussant un soupir, il se mit à se préparer pour aller se coucher, enlevant bottes et cuirasse.

  - Je suppose que je n'obtiendrais rien de mieux ce soir. Allons-nous coucher.

Leïa sourit avec soulagement et se prépara pour aller au lit. Dénouant ses cheveux jusque là coiffés en une tresse en épis de blé, elle se rendit alors compte à quel point ils avaient poussé depuis leur départ du village des Yamhas. Désormais, ils arrivaient jusqu'en bas de ses reins. Heureusement, elle avait la chance d'avoir une chevelure légère qui ne la pesait par conséquent pas trop.

Là seulement, elle se mit à penser à Violette et Olivius. Leïa se sentait certes coupable de les avoir laissé en plan au village mais elle n'était pas malheureuse d'avoir retrouvé Mordred. Au moins, se dit-elle, ils pourraient veiller l'un sur l'autre. Elle espérait malgré tout que ces deux-là aillent bien. Après tout, si ils étaient venus, c'était pour elle et surtout pour Si. Or, ils ne pouvaient être avec aucun des deux si elle se trouvait au château.

Cette nuit-là, elle s'endormit en pensant à eux, un bras de Mordred sur sa taille comme s'il avait peur qu'elle ne s'en aille. Ce ne fut que plus tard, lorsqu'elle se réveilla, qu'elle remarqua que son bras avait quitté sa taille. Se retournant, cherchant où était passée cette présence réconfortante, elle le trouva endormi, fronçant les sourcils comme dans un mauvais rêve. Et alors comme elle l'aurait fait à un enfant, elle passa son doigts tout doucement du haut de son front et sur l'arrête de son nez jusqu'au bout de celui-ci. Elle refit ce doux mouvement de ses doigts frais plusieurs fois et Mordred finit par cesser de froncer les sourcils. Il soupira une fois, de contentement ou de bonheur, apaisé et elle sourit. En tournant la tête vers la fenêtre à travers laquelle brillaient les rayons de la Lune, Leïa sentit le pressant besoin de voir le sîmorgh. Se levant du lit, laissant la fraîcheur des pierres refroidir ses pieds, elle saisit sa robe de chambre en satin blanc et s'en alla hors de la chambre. Parcourant les couloirs, elle descendit quelques escaliers et se retrouva dans une cour carré. Laquelle, baignée par la lumière lunaire, était couverte d'un tapis d'herbe verte dont elle ressentit la douceur sous ses plantes de pieds. L'herbe humide de la nuit ne tarda pas à mouiller le bas de ses vêtements mais elle ne semblait pas s'en soucier. L'architecture de l'endroit, la lumière pâle dans lequel il se trouvait ainsi que l'herbe tendre sous ses pieds faisaient de cet instant un moment de sérénité dont elle avait besoin. Elle ferma les yeux un moment et profita de la douce odeur qui se dégageait des plantes. Puis son sifflement, tout aussi doux, empli la cour et il ne suffit que de quelques instants pour qu'une ombre tombe sur elle, bientôt suivi de l'oiseau légendaire.

Leïa et les AilésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant