Saphir

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Jeudi, 13h.

Ce jour-là, les rumeurs allaient de bon train, chacun ourdissait les théories, pendant que d'autres dénonçait la magie. Rosalya Scarlet, une ravissante élève, s'était suicidée et avait laissé derrière elle un parterre de fleurs rouges. Ce mystérieux changement de couleur était sur toutes les lèvres. Seule toi te rendait compte de la gravité de la situation, de la détresse émotionnelle que représentait cet acte de désespoir. Cette expression sur ton visage... je veux l'effleurer du doigt, je veux te prendre dans mes bras, te mentir, te dire que ce n'étais pas de ta faute. Mais en réalité c'est de ta faute, tu m'y as forcé. Viens m'embrasser, comme tu le fais quand je me sens triste. Je veux te sentir pleurer, et te dire que ça va aller. Je veux être ton espoir.

Tu partis te réfugier dans le temple des rêves, la bibliothèque. Tu ouvris la lourde porte de bois d'un mouvement las. Je profitai de cette ouverture pour entrer dans la salle. Manque de chance, je te percutai :

« Excuse-moi Cielle, tu me fixas avec de grands yeux.

- Pardon...mais...on se connait ? tu arboras un sourire gêné. »

Évidemment qu'on se connait, quelle idiote tu fais ! Je te souris puis m'enfuis d'un pas enjoué vers une des nombreuses tables de la bibliothèque. Tu paraissais décontenancée, ma chère Cielle, mais tu t'en allas tout de même rapidement rejoindre une pile de livre. Une jeune femme, note bien « femme ». Les cheveux courts, bruns, en bataille, elle dégageait une certaine individualité pouvant en faire rêver plus d'un. La brune posa sa main sur ton épaule. Je ne l'avais encore jamais vue à tes côtés, qui *est*-elle ? Mes yeux gris trahissaient ma jalousie. Ses mains semblaient te connaitre par cœur et glissaient avec aisance sur ta peau. Tu te détendis et lâcha d'une petite voix :

« Liz, j'espérais te trouver là... »

Sa présence dégageait quelque chose d'irréel, de subtil, d'imaginaire. Tel un papillon, elle te métamorphosait, craquait ta chrysalide. Je t'en prie, dis-moi qui elle *est*. Cette « Liz » déposa un baiser dans tes cheveux. Cette femme te transportait dans un autre univers en un instant. Les larmes coulaient sur ton merveilleux visage :

« Est-ce que c'est toi ? C'est toi qui me les as enlevées ? »

Mais, qui était cette femme ? Pourquoi ? Pourquoi savait-elle te faire pleurer ? Je veux savoir. La brune essuya tes larmes et s'assit devant toi. Je ne comprends pas, je suis dans un monde inconnu, le temps semble figé. Liz embrassa un des diamants coulant sur ta joue :

« Cesse de pleurer Cielle, je n'ai rien fait, elle prit ton visage entre ses mains, je te le promets.

- Alors si ce n'est pas toi...

- Faut croire que tu es le soleil d'autres personnes Cielle, elle captura tes lèvres -tes douces lèvres-, mais saches que tu es à moi Cielle. »

Mon sang bouillait, la rage brulait mes veines. Cette fille te fait du mal j'en suis sûre. Elle t'attrape dans un rêve, dans un idéal, une illusion pour mieux te voir tomber. Réveille-toi. L'univers est une réalité, Peter Pan ne t'attend pas à ta fenêtre, Wendy. Pourtant, jeune Alice, tu regardas la reine rouge amoureusement :

« Tes yeux sont une merveille Liseron »

Liseron te souris, un sourire narquois et possessif. Elle ne te méritait pas. Elle ne te considèrera jamais à ta juste valeur. Liseron partit au loin, dans son royaume imaginaire, la reine au pouvoir illusoire.

L'amour est une drogue, Cielle. Tu planes avec la chenille bleue pour oublier la réalité. Mais que voulais-tu oublier ce jour-là ?

La nuit tomba, les livres se fermèrent, Peter Pan oublia Wendy, incapable de la voir, la reine rouge perdit sa tête et les sirènes se noyèrent, hypnotisées par leur propre voix.

La rose bleue fanât.

ParmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant