Car j'étais ivre de toi

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Car j’étais ivre de toi


Je m’en allais dans les champs, un soir de printemps.
Le soleil disparaissait au loin, lentement,
Emportant avec lui, la douce mélodie
De la campagne, maintenant endormie.
Seul le petit ruisseau, dans le soir sifflotait.
Le souffle du vent, dans les arbres chantonnait.
Et le thym, et le romarin, et la lavande
qui parfumaient subtilement l’air chaud des Landes,
Me rendaient profondément heureux et léger.
Tel une plume qui par le vent se laisse porter,
Je m’évadais, d’un monde que je trouvais dur,
Vers les étoiles qui écoutaient mes murmures.
Mais une bourrasque poussa la plume vers le sol.
Un oiseau valsait dans le ciel étoilé, seul.
Ses longues plumes brillaient au clair de lune,
Sa vive beauté me laissa alors incrédule.
Qui était cette femme, à pieds nus dans les champs ?
Est-ce un être fantastique, qui en pleine nuit errant,
Ensorcèle les passants, les simples paysans ?
Elle s’assit, avec grâce, tout en me souriant.
J’aimais, je rêvais. Ce beau Phoenix me charma.
Alors que les grillons chantaient, la foudre frappa,
Sur deux jeunes qui devant eux, la vie se créait.
Dès l’aube, l’oiseau s’envola. J’aimais, je rêvais…
J’avais vu passer le temps, les douleurs, les mœurs
Au rythme des saisons, des pluies et de mes pleurs.
Et puis cette nuit-là, comme une autre d’avant, elle,
Qui éveilla en moi, une nouvelle étincelle.
Une sensation unique qui fit vibrer mon cœur,
Comme une lueur d’espoir dans un monde de malheur,
Qui avec tendresse me berce en chantonnant,
Comme une braise, que lentement porte le vent.
Or un beau soir, à la lumière de ma bougie,
C’est à côté d’elle et dans notre lit, que je vis,
La Mort, tenant dans ses mains un sablier d’or.
Ma vie, ma femme, mon cœur, celle qui me rend fort…
Sa vie tient maintenant qu’à quelques grains de poussière.
Peut-être celle des étoiles entourant la Terre…
A sa douleur, hélas, on évoqua un cancer.
Les grains chutent lentement, mon cœur défait se serre.
Alors, tant que les mortels grains le permettaient,
Ma belle et moi, au doux soir levant, on partait,
Pour admirer les chaudes couleurs du couchant,
Et plus tard, les douces étoiles au firmament.
Mais, un beau soir, la douce harmonie se brisa,
Et, devant moi je vis ; mon Phoenix qui tomba.
Sa magie d’antan, sur la neige disparue,
Ne laissa derrière elle, qu’une seule trace connue ;
Un amas de cendres, d’une profonde noirceur,
d’où s’échappait encore une très faible lueur.
Un silence douloureux régnait autour de moi,
Seul, au milieu des Landes, soudain remplis d’effroi.
Perdu, je repensais à ton beau rire, si pur,
Aux courbes de ton corps, à tes tendres murmures.
Je pensais au temps, où il faisait encore doux
Où, l’on riait, tard dans la nuit, comme des fous
Ces moments ne furent que la veille d’un dur départ
Celui d’une étincelle, qui s’efface, et qui part,
Fuyant dans l’immensité du ciel étoilé,
S’évadant ainsi de quelconques gravités.
J’étais seul, regardant la fine poudre grisée,
Par le souffle glacial, durement balayée.
Dès que les derniers grains, avec grâce, s’envolèrent,
Je pris le chemin du retour, dos à la mer.
Derrière moi, les eaux mortelles se déchaînaient.
Les grandes vagues, sur les rochers se jetaient,
Produisant un grondement sourd et menaçant,
S’unissant au tonnerre lointain et au vent.
Je marchais en silence, sous le ciel déchiré.



Les rues étaient tristes, par la foule dénudée.
La colère des éléments fut si soudaine,
Qu’elle en surpris les foyers et mon âme en peine.
Ma maison, autrefois tellement chaleureuse,
Semblait vide après le passage de la faucheuse.
Il était tard, je partis me coucher, sans toi,
écoutant songeur, la pluie martelant le toit.
Les jours passèrent douloureux et mensongers.
Mes dures émotions, en mon cœur dissimulé,
S’éveillaient souvent, en pleine nuit hurlante.
Ô durs souvenirs, qui dans la nuit me hantent !
Pourquoi tant de douleurs ? Ce n’est qu’un adieu…
Moi qui étais tant ivre de toi, de tes yeux,
Voilà que je me retrouve seul et perdu,
A la recherche de mon Phoenix qui n’est plus.
Haut dans le ciel un bel astre d’argent brillait,
Les nuits étaient longues, ton souvenir me hantait.
Noirci par la douleur je tentais d’oublier,
Et un soir, mélancolique, je l’ai trouvée…
Cette bouteille d’alcool, déposée sur la table…
Je la voyais comme un remède ; coupable.
Aujourd’hui, je ne ris plus et ne manges plus,
Aujourd’hui, je vis, pauvre, dans la triste rue.
Avec ce prétendu remède, j’ai tout perdu,
Et je rôde dans la ville, tel un ange déchu.
Ivre, le monde m’avait semblé tristement beau...
L’alcool est un vif démon, un pesant fardeau.
Un soir, j’aperçu au loin, une douce lumière,
Et elle me sembla, étonnement familière.
Alors, je fus comme attiré par sa douceur,
Je marchais, marchais jusqu’à cette belle lueur.
Puis, délicatement, elle me prit dans ses bras.
Et bercé par cette douceur, mon cœur s’apaisa.
J’avais choisi de m’envoler, tout près de toi,
Car c’est par ma mort, que mon Phoenix renaitra.



















Car j'étais ivre de toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant