Stones of the night

Partie III : La fuite

          Les deux adolescents s'étaient réfugiés dans la pénombre du corridor afin d'échapper au danger qui les guettait. Tyler mit sa main sur la bouche de Lya pour l'empêcher de laisser échapper un bruit qui pourrait trahir leur cachette, mais la jeune fille tremblait énormément et sa peur voulait qu'elle s'enfuit le plus loin possible de cet endroit. Une ombre passa devant eux à une vitesse folle, si bien qu'elle ne les vit pas, mais malheureusement pour les deux adolescents, cette créature possédait un odorat extraordinaire, et leurs odeurs commençaient à se répandre dans toute la pièce. 

"- Elle va finir par nous trouver, nous devons absolument rejoindre les autres.. Chuchota Tyler. Il va falloir que tu me fasses confiance, ce que nous allons faire est très risqué, mais on devrait s'en sortir vivants tous les deux. On va se séparer.

- Pardon ?! Il n'est pas question que tu me laisses seule dans un endroit pareil ! C'est toi qui es venu me chercher donc maintenant je reste avec toi, même si je ne t'accorde aucune confiance.

- Je te promets que tout va bien se passer. Je vais partir au fond du couloir pour distraire la bête, et toi pendant ce temps, tu iras tout en bas de ces escaliers et tu tourneras à droite, il y aura une porte menant à l'extérieur. Quand tu seras dehors, tu suivras la direction de la Lune, et tu trouveras les autres. Tu as bien compris ?

- Mais et toi ?? Tu vas mourir si cette chose te rattrape, et tu imagines si elle décide de me suivre moi ? 

- Lya ça n'arrivera pas. Bon je te laisse dix secondes avant de me lancer, tu es prête ? 

- Je n'ai pas vraiment le choix... Mais je suis prête...

- Très bien ... C'est parti !!" 

          Lya s'élança de toutes ses forces dans la direction que Tyler lui avait indiqué, elle courut encore et encore sans jamais voir la fin de ce couloir. Elle se retourna pour essayer d'apercevoir le jeune homme, mais le lieu était bien trop sombre et il était déjà trop éloigné d'elle. Un grognement se fit entendre et un cri retenti, c'était Tyler. Lya se stoppa net et cria le nom de l'homme qui lui avait sauvé la vie, et fit demi-tour. Elle remonta les escaliers et s'aventura dans le fond du couloir qui lui parut de plus en plus étroit. La jeune fille aperçu un gros morceau de bois au sol, elle le prit pour s'en servir comme une arme si jamais on venait à l'attaquer. Du sang frais était éparpillé sur le sol, accompagné d'une grande trace comme si un corps avait été traîné jusque derrière la porte. Elle était sale et n'avait pas de poignée. Lya l'ouvrit avec de grands coups de pieds, entra dans la pièce et aperçut un piano au fond de celle-ci. La porte se referma avec fracas et l'instrument se mit à jouer tout seul, comme s'il était vivant et Lya reconnu la mélodie ; c'était celle qu'elle jouait étant enfant. Ses souvenirs l'envahirent et la peur prit le dessus sur elle alors qu'elle pleurait toutes les larmes de son corps, cette musique qu'elle trouvait si belle était devenue l'objet de ses cauchemars. Elle revit le jour où sa vie avait été chamboulée et perdit le contrôle. Elle se jeta sur l'instrument, et le frappa de toutes ses forces avec son morceau de bois. Les coups étaient de plus en plus puissants, et les touches musicales s'envolèrent, puis, elle s'écroula au sol. 

          Lorsqu'elle releva la tête, une lumière rouge brilla autour de son corps et ses cheveux flottèrent dans le vide. Le cadavre du piano était en lévitation ainsi que des vieux meubles cassés et de la poussière. Lya se releva et vit une lueur dans la vitre de la pièce sombre par le manque de lumière. Deux yeux écarlates se reflétèrent et la jeune fille cria puis cacha les siens avec ses mains. Elle entendit la voix d'une personne qui essayait de l'appeler, et qui semblait agoniser. La brune comprit qu'il s'agissait de quelqu'un qui avait besoin d'aide. Elle sorti de ce lieu effrayant et tous les objets volants retombèrent au sol. Soudain, quelque chose attrapa Lya par le bras, c'était Tyler. Il était blessé à la jambe droite, la bête semblait l'avoir mordu à cet endroit. 

"- Pourquoi es-tu revenue ? Tu es inconsciente ! 

- Je t'ai entendu crier... Je ne pouvais pas te laisser. Allez partons vite, agrippe toi à moi."

          Le jeune homme regarda Lya un moment pendant qu'elle l'aidait à atteindre la sortie, et une fois dehors, loin du danger, ils firent une pause au pied d'un chêne immense. Le détail qui surprit la jeune brune, c'est que les feuilles de cet arbre étaient encore présentent, malgré la saison. Elle s'émerveillait devant tant de splendeur. 

"- Tu ne savais pas que le chêne était un arbre marcescent ? Demanda Tyler intrigué.

- Oh si bien sûr.. C'est juste que j'avais un chêne dans mon jardin, et il faisait partie de ma famille et il me manque terriblement..

-  La seule chose que je peux te dire, c'est que tu mens très mal ! Ricana le jeune homme. Mais, je peux te demander ce qui s'est passé dans cette pièce ? J'ai entendu des bruits sourds et une fille qui pleurait, c'était toi ? "

          Lya leva son regard haut dans le ciel étoilé et se remémora cette scène qui lui semblait si peu réaliste.

"- Tu ne me croiras pas.. Et puis de toute façon, cela ne te regarde pas.

- On ne se connait peut-être pas Lya, mais je vois bien dans tes yeux la lueur qui montre qu'une chose ne tourne pas rond. Explique-moi, avant que je ne meurs de cette blessure ! Se moqua l'adolescent. Tu sais que tu ne crains rien avec moi, sinon je ne serai pas venu à ton secours cette nuit.

- D'accord, mais sache que je ne parviens pas à comprendre ce qu'il ce passe et ce qu'il c'est passé. Rétorqua la jeune fille. Quand je suis entrée dans la pièce, j'ai eu très froid subitement et j'ai vu un piano devant moi. Il a commencé à jouer une mélodie que j'appréciais énormément étant enfant et j'ai.. Comment dire ? Éclatée de l'intérieur. 

- Je peux te demander pourquoi ? Enfin je ne te force à rien, tu peux m'en parler que si tu le souhaites.

- Je pense que t'en parler ne va pas me tuer. Enfin bon, je me lance. Quand j'étais petite, je voulais devenir musicienne et jouer dans les plus grands orchestres au monde. Je participais à toutes les représentations et aux castings que j'avais la possibilité de faire. Mais seulement un soir, je suis rentrée seule chez moi d'un cours de piano car mon père n'avait pas fini son travail.. J'étais dans une rue assez calme et peu de passants étaient présents, et c'est là qu'un homme m'a agressé. Il a tenté d'abuser de mon corps et il essayait de me retirer mes vêtements, mais bien sûr je criais, et cela a attiré l'attention d'un des résidents... Il est venu à mon secours mais mon agresseur était armé et il l'a poignardé dans le ventre à deux reprises, puis c'est enfui. J'ai appelé la police, les urgences, et j'ai tenté de sauver cet homme à qui je devais la vie désormais... Seulement il est décédé avant que les autorités et les soignants n'aient eu le temps d'arriver. Je serrais son corps très fort et je m'excusais auprès de lui, car si je n'avais jamais joué de musique, il dînerait encore à table avec sa femme et ses enfants. Je n'arrive plus à faire face à la musique aujourd'hui, et le piano de ce soir... Jouait la mélodie que j'avais appris avant cette nuit-là."

          Elle mit ses bras autour de ses genoux et contempla la Lune. Libérée, l'histoire qui la hantait depuis de nombreuses années, venait enfin de prendre son envol. Elle repensa à cet homme et à la vie qu'il aurait pu avoir si elle ne s'était pas retrouvée au mauvais endroit, au mauvais moment. Tyler se rapprocha d'elle malgré sa douleur et lui prit la main. Il essuya les larmes de la jeune fille avec un mouchoir en tissu blanc qu'il avait mis dans sa poche quelques heures auparavant. 

" - Je ne peux pas imaginer ce que tu ressens, mais maintenant je suis là Lya, et si je t'ai faite sortir de cette prison, c'est que c'est de mon devoir de veiller sur toi. Je t'ai menti tout à l'heure, pardonne-moi. Je ne suis pas là depuis seulement quelques jours, en réalité ça doit bien faire trois mois que je suis ici et je sais pourquoi nous avons été enlevés ainsi que ce qu'est l'endroit dans lequel nous sommes..."