Chapitre 2: Le poids du passé

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Pendant que les deux jeunes femmes étaient sur le point de s'engager dans une dispute sûrement très houleuse, un ami prit Alexander sous son aile.

-Alex..., s'enquit le jeune homme, parle-moi, raconte-moi.

Sa voix était douce et réconfortante. Depuis le temps, Alexander savait que son cher compagnon de fortune était digne de confiance. Il prit une grande inspiration pour atténuer ses sanglots et pouvoir entamer son récit.

-Ok, marmonna-t-il à l'assistant comme pour lui-même, donc tu te souviens de Marine, ma... ''femme''.

-Oui, vous avez divorcé il y a deux ans et elle a eu la garde de Xavier, ton fils aîné, répondit son interlocuteur, visiblement informé.

-NON!.. Alex soupira de douleur. Nous n'avons pas divorcé et elle n'a pas pris Xavier sous sa garde.

L'acolyte d'Alexander était perplexe. Pourquoi Alex lui aurait-il menti?

-Écoute, Maxenss, tu sais que Xavier avait de l'anxiété très forte qui a fini par lui causé des problèmes cardiaques. Il est mort... Il y a trois ans... Un an après, c'est Marine qui a succombé au chagrin. Je suis seul avec Émalinne et Miranda, mes deux filles cadettes.

Stupéfait, Maxenss ne savait trouver les mots pour retirer un peu de la souffrance de cet homme. Alex avait camouflé ces décès par cette histoire de séparation et de garde partagée. Tout ce qu'il put faire fut de le prendre dans ses bras. Jamais il ne pourrait ne serait-ce que d'imaginer la douleur et la solitude par laquelle son ami est passé. S'il perdait sa femme, Lyli, et sa fille unique, Rosa, Maxenss ne sait ce qui l'aurait empêché de les rejoindre. Alexander, lui, avait encore une raison de vivre, ses deux filles cadettes. Il ne pouvait pas les abandonner, elles avaient besoin de lui.


Dans le bureau de Zarina, Zoélyne se tenait debout à côté de la chaise sur laquelle l'insolente sous-chef était assise. Penchée vers l'avant, ses longs cheveux bruns ondulés obstruant les côtés de son visage et sa vision périphérique. Une fois de plus, Zoélyne manqua de se laisser de nouveau attendrir par sa moue boudeuse.

Elle a toujours cet air d'enfant lorsqu'elle est contrariée, pensa-t-elle.

À peine cette dernière eut-elle le temps d'ouvrir la bouche que Zarina la coupa.

-Tu vas encore jouer les mamans?! lui reprocha-t-elle. Je n'ai plus douze ans! s'écria la sous-chef, furieuse qu'on ne l'ait pas laissé s'amuser plus longtemps.

-Tant, et aussi longtemps que tu travailleras pour MON entreprise, tu devras m'obéir et je ne te ferai pas de traitement de faveur même si tu es ma sœur! hurla presque Zoélyne.

-Peut-être, mais j'ai six ans de plus que toi! C'est moi qui t'ai tout appris, qui t'ai vu grandir! Et voilà comment tu me remercie! En me poignardant dans le dos! C'est moi qui aurait dû ouvrir mon entreprise! Tu ne mérites rien de ce que tu as! Ni ton copain, ni cette bague de fiançailles, tu pensais sérieusement que je ne la verrais pas! Tu sais quoi?! Tu ne mérites même pas ta vie! Laisse-moi être à ta place! La dernière phrase était plus désespéré et brisé qu'en colère.

Zarina aurait pu continuer longtemps, mais elle ne vit pas venir la paume de sa sœur cadette s'abattre rudement contre son visage. 

Zoélyne gifla sa grande sœur. 

Elle pouvait, même après une dizaine de secondes, sentir la brûlure de sa main contre sa joue. Incrédule, elle ouvrit la bouche pour lui crier dessus mais Zoé la coupa.

-Ta gueule. Sors de ce bureau.

-Q-quoi?

-Dit autrement: TU ES VIRÉE!

-Mais tu ne peux pas me virer...

-Oh si, je peux. Ce n'est pas parce que Mélanie te traitait comme une reine et qu'elle ne te refusait rien que je ferai pareil! s'étouffa la plus jeune.

Abasourdie par la soudaine violence de sa supérieure, Zarina ne put que s'exécuter. Elle prit un carton qui traînait dans un coin de la pièce et ouvrit tous les tiroirs du bureau pour remballer ses effets personnels. Lorsqu'elle releva la tête du carton, la pièce lui sembla différente. Comme si elle découvrait cet endroit pour la première fois, elle tourna sur elle-même, posant ses yeux d'abord sur la baie vitrée, puis sur l'énorme bureau qui trônait au milieu. À la gauche et derrière le meuble se trouvaient plusieurs sièges de différents modèles, certains faits de corde tressée tel un hamac, d'autres au design plus futuriste. En guise de décoration, le plafond est recouvert de mousse artificielle ainsi que des lampadaires ayant la forme de différentes fleurs grimpantes descendant vers le bas. De plus, chaque coin de la pièce, à part celui sur lequel s'ouvre la porte, a été aménagé en coin détente ou pour travailler plus calmement. Le sol de ces lieux avait été creusé pour y déposer du terreau et y faire pousser de l'herbe et quelques fleurs. Les murs débordaient de tablettes sur lesquelles reposaient plusieurs plantes. Enfin, elle regarda la petite fontaine d'eau cristalline qui abrite plusieurs poissons. Elle aimait les plantes et la nature, elle s'était tellement battue pour pouvoir mettre le bureau à son goût. Zarina contemple encore un moment la baie vitrée à la droite du bureau qui n'est désormais plus le sien.

Suis-je allée trop loin? se remit-elle en question.

Elle sorti la tête basse, la trace rougeâtre encore bien présente sur sa joue. Elle traversa toute la pièce des secrétaires et des autres employés. Sous les regards mi-satisfaits, mi-incrédules de ses collègues, la jeune femme atteignit l'ascenseur au bout du bureau commun et, carton à la main, les portes de l'engin se refermèrent sur elle.


À quelques millénaires de distanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant