Le deuxième œil

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PROLOGUE

Le pourfendeur à la marque serpentait lentement le long du couloir d'une des maisons du domaine du papillon. Ses pieds nus craquaient sur le parquet, son pas était lent, maîtrisé. Son corps récupérait à peine du combat contre Muzan et ses membres se dégourdissaient enfin.

La maison était silencieuse, en deuil depuis quelques semaines déjà. Sa maîtresse avait perdu la vie au combat. Elle s'était sacrifiée corps et âme pour la nature humaine; pour la mémoire de sa sœur. Les murs étaient muets et le peu de personnes qu'il croisait paraissaient effondrées. Chez eux, la victoire contre les démons avait un goût amer de défaite.

Tanjirô réapprenait lentement à vivre, Nezuko l'aidant. Son pas se stoppa lorsqu'il arriva à l'entrée du jardin. Il assistait émerveillé au spectacle de la nature qui même sans son pilier, vivait. De nombreux papillons dansaient autour de celle qu'il cherchait. Il ne l'avait pas vu depuis la bataille finale, et la douloureuse image de son visage blessé restait la dernière vision qu'il avait eu avant de sombrer dans un sommeil réparateur.

Le sabreur descendit de la terrasse en bois et posa un premier pied fragile dans l'herbe fraîche. Un léger sourire se forma sur son visage alors que les pousses vertes chatouillaient sa peau nue au rythme de ses pas. Pendant quelques secondes, il ferma les yeux et profita de l'odeur enivrante de la nature, il revivait.

Un papillon vint titiller son épaule, c'est ce qui le décida à s'avancer vers la jeune fille, un sourire nostalgique pendu aux lèvres. Il la trouvait jolie dans ce décor, qu'il savait être son élément. Ses cheveux lâchés s'emmêlaient dans la brise printanière. De ses mains gracieuses, elle accompagnait les insectes colorés dans leur envol. Elle semblait danser avec eux. Un petit sourire aux lèvres, la brune se retourna vers Tanjirô. Son regard le surprit. Un de ses yeux était terne, sans vie.

– Tu..vas bien ? Demanda-t-il alors que le vent faisait virevolter ses boucles d'oreille.

La jeune fille hocha la tête pour répondre au garçon. Une odeur de menthe fraîche et de coriandre vint assaillir leurs sens.

– Je suis contente de te voir debout. Avoua-t-elle dans un murmure réconfortant.

Sa voix douce caressait les tympans de Tanjirô, il adorait les sons harmonieux qui sortaient d'entre ses lèvres. Un sourire plus ensoleillé s'installa sur son visage alors qu'il réprimait avec difficulté un soupir de bonheur.

– Oui..après tout ce repos je suis enfin debout !

Tanjirô avait toujours ce caractère enjoué, même après les événements difficiles. Et son expression heureuse la réconfortait, un peu. Pourtant, le sourire du garçon chaleureux s'effaça progressivement lorsque son regard se concentra sur l'œil anormalement terne de la brune.

– Ton œil.. Sa voix n'était qu'un murmure.

Sans vraiment l'anticiper ni le vouloir, le visage du pourfendeur se rapprocha de celui de Kanao. Il examinait sa couleur sans vie, qui lui était affreusement étrangère. Le cœur battant, il sentit une douleur vive étreindre son organe vital. Il se sentit triste, énervé face à son œil blessé.

– Je l'ai fait pour mes sœurs. Se justifia Kanao.

Sa voix était assurée, son expression du visage déterminée. Et Tanjirô se sentit déstabilisé devant ce côté confiant qu'il ne lui connaissait pas. Avec ses mots, elle lui disait qu'elle ne regrettait rien, que ce qu'elle avait fait était fait. Et qu'elle assumait. Impressionné, il sentit son pouls s'accélérer.

Le pleur des glycinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant