Chaque matin c'est la même chanson.
--Samantha faudrait te ressaisir ce n'est pas parceque tu es déjà à l'Université que tu vas te conduire ainsi. Cela fait déjà une semaine, depuis que les cours ont commencé tu ne t'es jamais présentée à la faculté.
D'abord qu'il passe son temps à entrer dans ma chambre sans permission, il se permet aussi de me faire des reproches comme si mon père n'en fait pas déjà assez.
--Bref, on doit parler.
Il ferme ma porte et s'assoit sur mon lit comme si j'avais dit oui.
Il prend une mine sérieuse de grand frère en colère.
J'éclate de rire.
--sérieux Jores, moi je ne veux pas parler maintenant et en plus arrête de faire cette tête. Ca ne te vas pas.
Je me lève de la chaise de ma table d'étude un peu nonchalante, déboutonne ma chemise de nuit et lui il rejoint la porte de la chambre en grognant.
--Je t'ai toujours dit de me prévenir quand tu veux te changer Samantha.
Il referme la chambre et moi, en mode je m'en fous, j'enfile une serviette sous mes aisselles et je retire mon joint du tiroir.
Je fais coulisser la grande porte fenêtre et un bon coup d'air frais s'en suit.
Je m'affale ensuite sur le lit et j'allume ma cigarette. Ce sourire sournois aux lèvres et les yeux qui palpitent rien qu'à l'idée de fumer.
Plus je tire et plus je m'évade dans un monde où la vie semble plus rose. La sensation de bien être m'envahit jusqu'à la moelle des os, les yeux rivés dans le vide, je me sens en extase et j'ai une envie folle de toucher la lune.
Mais qui je deviens ?
Je soupire et je me demande si ce serait pareil si maman était toujours en vie, si papa n'avait pas prit une deuxième femme et si j'avais été plus forte au lycée?
Je n'ai plus rien à perdre désormais, je n'ai plus personne, pas d'amis, pas de mère. Juste Jores qui s'entête à vouloir me faire revenir sur terre. De fois je me demande pourquoi tant d'affection à mon égard, on n'est même pas lié de sang lui et moi, c'est le fils de ma belle mère et nous n'avons pas le même père. Pourquoi il s'obstine donc à se soucier?
Moi perso' le monde m'est égal. Je suis l'une de ces filles qui vit dans sa bulle et qui ne se soucit pas de l'entourage et du lendemain.
Sûrement pas, si maman était encore là, j'allais rester cette petite fille innocente et fragile. La Samantha qui se plit en quatre pour que tout le monde l'apprécie. La Samantha naïve et négligée dont tout le monde profitait.
Plus j'y pense et je me dis que je me préfère en version améliorée, moi, jolie et forte, plus aventurière et directe. Oui mais toujours aussi lâche.
De fois je repense même à lui, Khalil, mon ex, celui qui est la cause de tout ce qui m'arrive, celui qui m'a royalement trompé avec ma meilleure pote, celui qui racontait tout nos ébats sexuels à ses copains et qui à leur tour les diffusaient aussi tôt. J'étais la risée du lycée.
Ok j'ai eu mon baccalauréat et j'ai changé de ville, maintenant je vis à Yaoundé avec mon père, Jores, et tata Lynne (ma belle mère). En pure égoïste, je me morfond dans ma chambre et mon joint me fait tenir le coup. Petit à petit les séquelles du passé s'effacent et peut être un jour tout ira mieux.
Je soupire une fois de plus et jette le reste du baton de cigarette par la fenêtre. J'actionne le ventilateur et les odeurs récalcitrantes de fumée se dispersent aussi tôt.
