4

14 2 0
                                    



Sans un regard en arrière, Jimin ouvrit la portière arrière de sa voiture, y jeta son sac et la claqua d'un coup sec. Il s'installa alors à l'avant et, d'un geste sur et déterminé, démarra le véhicule alors qu'il apercevait à quelque pas la porte d'entrée, de ce qui fut autrefois chez lui, s'ouvrir sur sa mère, qui lui hurla de rester là. Alors que celle-ci s'engageait sur l'allée, les yeux emplis de larmes, l'air dévasté et visiblement déterminée à récupérer son fils, Jimin mit le pied à l'accélérateur et avec un grondement de moteur, démarra en trombe, disparaissant quelques secondes plus tard au premier carrefour.

Comme surpris de son propre courage, Jimin ne put s'empêcher de rester concentré sur la route. Il ne pensait à rien, se contentant de garder le pied frénétiquement fixé à la pédale d'accélération, souhaitant s'éloigner le plus vite possible de cet endroit. Il parcourut une rue, puis deux, trois ; il sortit du quartier et prit alors la route du centre-ville. La maison de ses parents se trouvant en périphérie de ville, il n'avait pour le moment nulle part où aller si ce n'était le centre-ville, dans lequel il se repérait assez facilement. Au fur et à mesure qu'il s'était éloigné, l'adrénaline était redescendue et les larmes étaient montées. Sans qu'il ne s'en rende compte, il s'était remis à pleurer. La réalité le frappa alors soudain. Qu'allait-il faire ? Il était seul, n'avait pas plus d'argent sur lui que de maigres économies avec lesquelles il ne pourrait pas aller bien loin et n'avait surtout aucune idée de l'endroit ou il allait passer les prochaines nuits.

Fébrile, il se gara alors sur le parking d'un café et coupa le moteur de sa berline. Une fois le moteur silencieux, il inspira, remplissant ses poumons d'air et expira ensuite, tentant tant bien que mal de calmer ses sanglots et son rythme cardiaque qui commençait à s'emballer. Il posa ses deux mains sur le volant et resta quelques minutes dans cette position, ne pensant à rien, souhaitant remettre de l'ordre dans ses pensées confuses. Quand il releva la tête, il se mit à observer les gens qui s'agitaient au dehors. 

Tous vaquaient à leurs occupations l'air de rien. Les cafés étaient pleins et les rues grouillaient de vie. Une dame en particulier, attira l'œil de Jimin. Elle sortait d'une supérette et avait dans son chariot, une petite montagne de pack de bouteilles d'eau. Les lots de bouteilles, entassés les uns sur les autres atteignait une telle hauteur, que Jimin avait du mal à voir la petite femme, qui poussait le chariot, tant elle était dissimulée par sa cargaison. Pourquoi diable acheter autant de pack d'eau ? La fin du monde n'était pas prévue pour bientôt si ? Se demanda-il. C'est alors que pour la deuxième fois en l'espace de quelques minutes, la réalité rattrapa Jimin de plein fouet. Entre son coming-out surprise, la dispute avec ses parents et son départ soudain, il en avait oublié la raison même pour laquelle il s'était retrouvé chez eux aujourd'hui. Le virus. La pandémie. Le confinement.

Il jura contre lui-même en se tapant le front contre le volant. Voila qui ne l'arrangeait pas. Le timing jouait vraiment contre lui. Certes, il aurait pu choisir de retarder la confrontation avec ses parents mais à y réfléchir, il lui aurait été impossible de continuer à mentir, surtout s'il lui avait fallu côtoyer ses parents de manière quotidienne pour qui sait combien de temps. Il se résigna. Ce qui est fait et fait et en y repensant, il ne regrettait rien. Si pouvoir vivre sans masque en étant pleinement lui-même signifiait qu'il ne pouvait désormais considérer la maison des Park comme la sienne, alors très bien. Ainsi soit-il, il se débrouillerait par ses propres moyens. Maintenant, il fallait à tout prix qu'il se trouve un logement et surtout qu'il y reste.

Il resta alors quelques secondes à contempler le vide en se demandant que faire, et, par reflexe, attrapa son portable dans sa poche, le déverrouilla et en appuya frénétiquement sur le contact de son meilleur ami, les mains tremblantes.

IsolationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant