XXVII

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  Si à première vue, j'ai l'impression d'être balancée de par et d'autres dans une obscurité d'abysse, dans une obscurité oppressante, je me retrouve bien vite entourée d'un brouillard épais que j'ai du mal à percer. Quelques secondes plus tard, alors que je plisse les yeux, il se dissout comme du sable emmené par le vent. Laissant place à un...

- Un miroir ? murmurai-je en fronçant les sourcils.

  Je le touche des bouts des doigts. Mais à peine suis-je rentrée en contact avec la glace que mon reflet change, se métamorphose. Mon regard s'assombrit quand je vois ce même regard qui m'a gâché la vie et qui veut constamment détruire tout ce qui m'entoure pour m'atteindre.
Chacun de mes mouvements sont suivis par ce Double-Maléfique qui répond au nom de Kristine. À l'identique. Sauf pour l'aspect physique. Aujourd'hui, elle est dans son état naturel. Des cheveux bruns presque noirs, au contraire des miens blancs comme neige. Des yeux sombres venu de l'Enfer contrastant à mes pupilles claires comme la mer circassienne. Une allure élancée différenciant de ma petite taille. Un air malsain, psychothique et malveillant, opposé à mon éthique guerrière, plaisantin et gentillesse incarnée. Le noir et le blanc, le Mal et le Bien. Une dinguerie qui nous lie pour autant, dans un chemin de vie tout aussi entrelacé que séparé.

- Salut, Ella... minaude-t-elle de sa voix rauque.

  Je sens une intense rage vengeresse coulée dans mes veines.

- Kristine, dis-je sèchement.

  Au même moment, le sol se met à trembler et le décor a changé.
Mes mains sont devenues plus grandes, et j'ai l'impression d'avoir grandi, tout en étant enfermée dans une boîte. Sauf que ce n'est pas une boîte, c'est un corps ! Je suis devenue Arthur Weasley, je le sais car j'entends sa voix à travers la mienne.

- Bon eh bien, aujourd'hui, c'est mon tour.

  Incroyable mais vrai, j'ai atterri dans le corps du père de mon petit ami. Si c'est d'abord assez... spécial, je comprends vite pourquoi : je suis en plein repèrage dans la salle des Prophéties - une grande pièce où règne un froid intense, aussi vaste qu'une église, et remplie de rangées d'immenses étagères, sur lesquelles reposent des centaines de petits globes de verre poussiéreux qui comportent de minuscules étiquettes jaunies portant le nom de son propriétaire. Des chandeliers fixés à intervalles réguliers le long des rayons émettent une lueur bleutée.
  Mes bruits de pas résonnent dans toute la salle, combattant un silence pesant et dur comme de la roche. Sans doute pour vérifier qu'aucun Mangemort ne vienne faire un casse, j'ai la main serrée sur ma baguette magique - ou plutôt, Arthur l'a tient.
  Un murmure sifflé, comme du Fourchelang, brise le silence. Bloquée dans le corps de Mr Weasley, je ne peux que suivre ses mouvements : je me retourne alors lentement, délicatement, la respiration plus anxieuse. Mes yeux s'écarquillent d'eux-mêmes lorsque je l'aperçois, cet immense serpent qui ondule à terre.
  Nagini.
  Sans crier garde, l'animal me saute dessus, frappant la première fois, plongeant profondément ses crochets dans la chair de mes tempes. Titubant à même le sol, j'en lâche ma baguette dans une exclamation de douleur. Deux coups de croc supplémentaire et me voici à geindre de souffrance... Le sang se répand sur le sol alors que j'hurle de douleur. Mais ma voix s'éteint alors que ma respiration devient plus compliquée, plus lente, plus atroce.
  Ma tête me fait terriblement mal... Comme si elle est sur le point d'exploser...

- Mélody ! MÉLODY !

  J'ouvre les yeux précipitamment dans un sursaut qui m'a fait m'asseoir. Mais alors que je ne visualise que la nuit m'entourant, je discerne une ombre. Grande, élancée, qui s'approche vivement de moi. À l'instant où je me mets à hurler en la sentant m'entourer avec force, elle s'écrie :

Elementum {Tome 5}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant