Je est un autre
Aujourd'hui, par un ironique concours de circonstances, ce sont les musulmans qui ont un statut de dhimmi en Occident, avec tous les avantages et désavantages qu'un tel statut comporte!
J'en veux aux Français car ils m'obligent à prendre la défense de ce que je méprise le plus au monde : la Religion... mais je m'y résous car je considère qu'il existe une plus grande faute que de croire en Dieu : celle de ne pas croire à l'AUTRE. Rappelez-vous l'homme aux semelles de vent : Je est un autre.
Si les Français lisaient Buber, ils sauraient qu'il faut dire « TU » à l'autre, et non plus « ça » ou pour parodier le penseur hassidique et son « Ich und Du » : Ich ist Du!
Il ne s'agit pas de "réfléchir" l'autre, mais de se "réfléchir SUR" lui pour qu'il nous renvoie notre propre reflet.
La « rencontre » avec l'autre doit se faire sur le mode de la "conversation".
Il convient de passer du Erfahrung au Beziehung- de dépasser le monologue auxquels les Français se livrent afin d'instituer un dialogue.
Pour ceux qui ne sont pas islamophobes (ils existent), ils sont pour la loi sur le voile car ils, et surtout elles, sont misogynes ; et le plus insensé, c'est que ce sont les féministes de la première qui font preuve de la plus farouche et orgueilleuse misogynie ! En effet, ceux-là adoptent non seulement une vision fasciste et coloniale en pensant que les musulmans se trompent dans leur interprétation de l'islam (et même si c'était le cas, c'est le droit à l'erreur que possède tout un chacun), mais en sus de cela, elles (car là il s'agit majoritairement de femmes) font preuve d'un égocentrisme démesuré en pensant que les seules femmes qui disposent du libre arbitre et qui font une exégèse correcte de l'islam soient elles seules, et surtout la femme occidentale ; ainsi, l'Européenne peut consentir aux partouzes, aux relations sadomasochistes, etc., mais la femme musulmane, elle, ne peut consentir à rien. Il ne peut y avoir de femmes qui choisissent délibérément de porter le voile ! Toutes celles qui le portent le font car elles y sont forcées par leurs pères, frères ou maris ou bien « téléguidées » (mot on ne peut plus à la mode par les xénophobes nouvellement convertis) de l'étranger. Ainsi, la femme musulmane ne serait ni assez intelligente pour avoir sa propre interprétation de SON islam, ni assez libre pour vivre SA foi comme elle l'entend, et il est ici à propos de rappeler ce que Mohammad Iqbal disait dans son Djâvid-Nâma: « La connaissance ne dépend pas de la mode de vos vêtements; un turban ne constitue pas un obstacle à l'art et à la science. Pour la science et l'art, ô jeune homme hardi! il faut un cerveau, non des vêtements européens. Sur cette voie, ce qui importe, c'est d'avoir une vue pénétrante : cela ne dépend pas de la forme de votre chapeau. Si tu as une pensée agile, cela suffit; si tu as un esprit perspicace, cela suffit! C'est au cours des veillées à la lumière de la lampe qu'on trouve la science, l'art et la sagesse. »
La déresponsabilisation de l'individu est le pire des fascismes. Le Consentement d'un individu à disposer de son corps comme il l'entend doit éclipser toutes considérations morales. La plupart des femmes qui portent le voile y consentent, tout comme la plupart de celles qui se prostituent y consentent. Mêmes si certaines en effet y sont obligées, cela n'est pas pour autant suffisant pour pénaliser celles qui le font de leur plein gré, car il suffit de pousser le raisonnement jusqu'au bout, et on en viendra à interdire presque tout : puisque certains conduisent en état d'ivresse, interdisons l'alcool, puisque certains braquent des banques, interdisons les armes à feu, et on peut multiplier les exemples à l'infini. Il suffit de faire appel à l'argument reductio ad absurdum pour dévoiler l'inanité des propos des chantres de l'interdiction de tout poil.
Mais les féministes pensent que les femmes ne peuvent consentir à certaines choses... Donc, il faut en conclure que les féministes pensent que les femmes sont des êtres doués d'une raison inférieure. En somme, que la femme est un « sous-homme ». Toute personne doit pouvoir disposer de son corps comme bon lui semble, et on voit bien que la réticence qu'ont certains à penser que l'on ne peut consentir à tout témoigne de l'incrustation d'une vision religieuse et platonicienne du monde. On doit pouvoir consentir à porter le voile, à se prostituer, à vendre ses organes, à entretenir des relations sadomasochistes intenses, et finalement, à se donner la mort. Comme disait Aleister Crowley: « Do what thou wilt shall be the whole law. »