XIX. Paris

7 1 0
                                    

°°La vie ce n'est pas d'attendre que

L'orage passe, c'est d'apprendre

A danser sous la pluie°°

Sénèque

La capitale était un enchaînement de boulevards et de ruelles entremêlés. Les maisons étaient serrées les unes contre les autres et les immeubles tendaient leurs bras vers le ciel en quête d'un maximum de luminosité. C'était un autre monde pour notre fratrie qui n'avait connu que les champs s'étendant à l'horizon parla fenêtre. On avait en effet eu raison d'aller à Paris. Les gamins des rues étaient nombreux et nous passions inaperçus dans la foule malfamée et bruyante qui déambulait dans les ruelles à longueur de journée. Avec Jules, nous décidâmes d'essayer de se fondre dans lamasse au maximum, d'observer les gens et de faire comme eux. La vie ne semblait pas si simple à Paris mais on était sûrs, qu'ensemble, on y survivrait. Notre priorité était de trouver un abri pour passer la nuit, loin des ombres effrayantes et dangereuses que la nuit projetait sur la capitale assoupie. J'ouvris le carnet de William et y trouvais plusieurs adresses notées. Je n'avais absolument aucune idée d'où étaient ces rues, écrites d'une écriture serrée dans un carnet de mauvaise qualité. Je commençais alors à interpeller les personnes aux alentours mais celles-ci étaient trop pressées et ne prenaient même pas le temps de répondre à mes salutations. Le monde allait trop vite autour de moi et j'avais l'impression que les gens hurlaient à mes côtés. Les bus roulaient vite dans la capitale et les voitures étaient déjà nombreuses. C'était un autre univers que notre campagne que nous avions toujours connue. J'avais l'impression de revivre notre retour sur notre terre natale après notre exode en Bretagne. Les gens formaient une masse informe et compacte autour de moi et je me sentais si petite parmi toutes ces personnes avec leurs beaux vêtements. Mon rythme cardiaque augmenta rapidement et je sentis ma poitrine se soulever de plus en plus vite à chaque seconde. Ma vue se troubla. J'eus envie de pleurer et de hurler au milieu de cette rue insalubre et pleine de monde. Mon frère, me voyant paniquer, me prit la main et m'emmena à l'écart de la foule. J'étais bouleversée et incapable de me tenir sur mes jambes. Jules me caressa tendrement les cheveux et me murmura de rassurantes paroles qui me calmèrent rapidement. Je repris contenance lentement grâce aux soins de Jules. Mon frère me serra alors contre lui à m'en faire craquer les os. C'était sa façon à lui de me dire qu'il tenait à moi et qu'il avait eu très peur de me voir autant paniquer. Une fois que j'eus repris totalement mes esprits, je me libérais de l'emprise de mon frère et lui demandais :

« Où est Marie ? »

Soudain, son regard changea et il devint pâle comme un linge. N'obtenant pas de réponse et à la vue de sa tête, je réitérais ma question espérant avoir mal interprété ses expressions faciales. Toujours pas de réponse et je sus alors que je ne m'étais pas trompée. Marie avait bel et bien disparue. Je regardais autour de moi mais pas de traces de la chevelure blonde de ma sœur. Je me mis à courir, suivie par Jules, à travers la foule en hurlant à tort et à travers son prénom. Les gens râlaient de s'être fait bousculer mais ne nous laissaient pas pour autant passer. Marie était introuvable. La foule était si dense, comme un étau qui se resserrerait petit à petit autour de nous.

Soudain, je percutais un homme. Il me rattrapa avant que je tombe et me regarda bizarrement. Puis sans dire un mot, il attrapa mon bras et me traîna derrière lui. J'attrapais mon frère par la main avant de me faire emporter. L'homme était grand et large comme une armoire à glace, je ne pouvais donc pas lutter contre sa poigne de fer. Il nous entraînait dans les tréfonds de Paris. Il s'arrêta tout à coup, se décala et je vis devant moi une Marie souriante dans les bras d'une femme que je ne connaissais ni d'Ève ni d'Adam. Je me précipitais vers Marie et l'arrachais des bras de la femme. Celle-ci me dévisagea alors mais je n'en avais que faire. J'observais Marie sous tous les angles pour voir s'il ne lui était rien arrivé. Jules remercia alors vivement l'homme et la femme. Ils avaient trouvé Marie au milieu de la foule, esseulée et l'avaient amenée à l'écart pour la questionner et savoir où était sa famille. Ils avaient commencé à lui poser des questions mais, au même moment, l'homme nous avait entendu crier et nous avait donc conduit vers notre jeune sœur.

Madame SironOù les histoires vivent. Découvrez maintenant