Le deuxième sang

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-Ça empeste le sang ! Il a pas fait dans la dentelle ce type !

Une traînée de sang traversait la rue, puis suivait le trottoir. La victime avait essayé de s'échapper. Pas assez vite à en croire le moignon de jambe abandonné là.

Laura se retourna vers Enric.

-Vous pouvez restez là. On s'en occupe.

Elle pouvait le soulagement sur le visage du jeune homme. Elle pouvait le comprendre ... Même elle, pourtant habituée des macabés et défunts de toutes sorte, aurait préférée ne pas avoir à continuer. ''Enfin, c'est le boulot. Pas le choix.''

 Elle se dirigea vers les lumières des policiers et s'enfonça dans la ruelle sombre, suivit de près par Abby. 

Le sol était recouvert de sang et le liquide, encore chaud, luisait à la lumière des lampes torches. Le corps gisait là, au milieu de la flaque écarlate, les vêtements arrachés et imbibés de sang. Il avait une plaie béante au cou, la chair avait été arrachée violemment, ne laissant que quelques bouts pendre, encore attachés au corps. Il avait les bras lacérés, si bien que la chair se mélangeait au tissu de son costume noir. Sa jambe gauche avait été arrachée, et la droite était pliée dans un angle peu naturel. Laura pouvait apercevoir l'os cassé qui avait percé la peau du pauvre homme. Elle soupira et se tourna vers les policiers derrière elle. 

Ils n'étaient que deux, les autres n'ayant sans doute pas supporté la vue.

-Vous avez pris les photos ? 

-O-oui Madame.

-Mademoiselle.

Laura posa un pied dans la mare de sang, afin de s'approcher de visage de la victime.

-Comment vous avez su son nom ?

-Il avait fait tomber son porte-feuille avec ses papiers d'identité.

-Hum-hum.

Le mort avait de nombreuses morsures à la tête, une quinzaine à en juger par le nombre de paires de points rouge. Laura fouilla la poche de veste de l'homme, ou du moins ce qu'il en restait. 

-Et on sait où il habite ? dit-elle en sortant des clefs gluantes de la veste.

-Non toujours pas.

Laura se retourna et vit qu'il n'y avait plus qu'un policier et il était blanc comme un linge, plus que livide. Le deuxième était parti vomir au pied d'un mur. Elle récupéra un sac en plastique et y mit les clés.

-Abby ? Tu sens quelque chose ?

-Rien du tout. 

La petite fille tenait une pierre noire dans la main.

-Il a mis un charme. 

-... sérieusement ?

-Si le sort a été introduit efficacement, ça peut marcher. C'est très compliqué mais ça reste possible.

-Donc tu es en train de me dire qu'on ne peut pas le traquer ?

Abby hocha la tête.

-Bon ... soupira Laura, essaye de faire un tour dans le voisinage pour voir si tu ne trouve pas quelque chose.

En un battement de paupières, la petite fille avait disparue. Le policier en était bouche bée mais la jeune femme en avait l'habitude. Elle ne cilla même pas et prit la direction de sa voiture. Ses chaussures, imbibées de sang, couinaient à chaque pas. ''Elles sont foutues ...''

Le jeune Enric l'attendais à la bande jaune.

-Mademoiselle Payne !

-Oui ?

-On a du nouveau.  René Gaume n'était pas marié, mais vivait avec sa petite amie, Adilène Hines, depuis quatre mois. Elle habite pas loin d'ici.

-Bien. 

Laura se dirigea vers sa voiture, et y monta sans attendre plus de détails. Le pauvre Enric la fixait étonné. Elle le regarda un moment puis soupira. 

-Bon alors tu montes ? dit-elle après avoir ouvert la portière, ou on attends le déluge ?

-J'arrive ! 

Le jeune policier entra dans la voiture avec précipitation et mit sa ceinture.

-C'est par où ?

-Vous faîtes demi-tour.

-Hum-hum.

Vous prenez à gauche.

-Hum-Hum.

-Deuxième immeuble à droite.

-...

-Voilà on est arrivé.

Laura s'arrêta surprise et regarda son passager d'un air désespérée :

-Et tu m'as laissé prendre la voiture alors qu'on était juste à côté ?

-M-mais vous ne m'avez pas laisser le temps de finir !!

Elle soupira.  

-Fallait insister ! Bon allons-y.

Les deux jeunes policiers entrèrent dans le bâtiment. C'était un viel immeuble beige, avec de grandes fenêtres et de petits balcons. L'intérieur n'était pas beaucoup plus récent, mais propre. "Pas mal .."

Ils montèrent dans l'ascenseur et Enric appuya sur le quatre.

-Je te laisse parler.

Le jeune homme se retourna surpris.

-Hein ? Comment ça ?

-Tu parles et j'écoute. Allez on y va.

-Mais ...

Trop tard, la jeune femme était déjà dans le couloir.

-Quel porte ?

-La trois.

Enric soupira et s'approcha de la porte. Il toqua doucement.

Après quelques instants, la porte s'ouvrit sur une belle femme. Typée afro-américaine, elle avait de long cheveux ébènes tressés et de beaux yeux noirs. Elle paraissait fatiguée et inquiète.

-Bonjour Madame. Vous êtes bien Adilène Hines ? Nous sommes de la police, nous aurions quelques questions à vous poser.

- Vous avez retrouvé mon René ?

Les couleurs de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant