One Shot

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Je vais vous conter une histoire, une histoire pas si vraie et pas si palpitante, juste une histoire qui mérite de demeurer dans les mémoires de tout le monde. Ou peut-être pas en fait...

Le coeur battant à un rythme effréné, Théo attend devant la Coupole, adossé à un mur. Les yeux perdus dans le vague, il imagine ce que lui réservera cet après-midi avec sa dulcinée. Anne arrive au loin, et le simple fait de la voir le fait rougir. Ses pommettes prennent une couleur de plus en plus cramoisie au fur et à mesure qu'elle s'approche. Les derniers pas semblent comme une sentence qui s'assène sur lui. Une sentence douce amère, un mélange de stress qui rend ses mains moites et de joie qui illumine son monde. Un sourire s'accroche à son visage et il la salue d'un timide "Coucou Anne, content de te voir". Elle ne semble pas aussi gêné que lui et se sent ainsi pris au dépourvu. Lui qui imaginait la voir dans le même état que lui, ce n'était pas du tout le cas. Vêtue d'une manière tant élégante que décontractée, mais elle portait également la pièce maîtresse qui serait capable d'achever et de faire tomber amoureux toute personne vous daignant un minimum d'attention... une paire de collants noir, 120 deniers. Les meilleurs.

Enfin bref, je m'égare. Théo se jette sur sa main qu'il attrape avec deux des siennes, une poignée de main virile, forte, et puissante. Qu'il regretta aussitôt. Ca semblait un mouvement si peu adapté à une rencontre si enflammée. Et si, même lui, il a su en prendre note, c'est que vous en serez tous capables. Il tente, d'une voix timide et monotone :

"Bon euh, on fait quoi en fait ?"

Elle le fixe d'un air surpris, comme si elle ne s'attendait jamais à une telle incompétence de la part du jeune éphèbe à la chevelure aussi rouge que son visage dont on se délectait avec joie de la gêne. Il lui sourit, sans comprendre la nature exacte du regard, supposant un simple air découlant d'une réflexion profonde et intéressée.

"Je... euh... je sais pas ? Je m'attendais à ce que t'aies prévu au moins un petit truc, dit-elle avec une pointe d'inquiétude dans la voix

-Euh non, j'ai juste proposé une sortie comme ça, au pif, j'avais rien d'autre à faire donc bon...

-Ah, bah ça fait plaisir", lâcha-t-elle avant de tourner la tête, une mine boudeuse ayant remplacé la précédente

Théo entreprit donc de la conduire en dehors de la fameuse Coupole pour partir à l'aventure de cette belle ville, que l'on appelle Nîmes. Cette ville où l'aventure vous attend à tous les coins de rue. Cette ville où chaque passant est un PNJ qui activera une quête secrète pour mener votre vie monotone à un délicieux isekai où vous serez entourés d'un harem de jeunes filles - que vous appellerez pourtant "Onee-chan". Mais ce n'était pas le souhait de Théo, ou du moins ça ne l'est plus. Il l'a trouvée, sa seule et unique 3D Waifu et en plus il n'était à rien de se la mettre dans la poche - une poche métaphorique, évidemment, bien qu'il soit idiot il ne penserait jamais à mettre une humaine dans sa poche !

Seulement notre bougre de Théo était tout juste capable de mettre un pied devant l'autre, alors ne parlons pas de sa capacité à mener à bien un date avec l'élue de son coeur. Si bien qu'il ne trouva d'autre solution que de l'emmener, alors qu'il est 16h12, dans un restaurant Italien. Ca lui semblait une évidence qu'il était nécessaire de manger un délicieux plat de pâtes à l'heure du goûter - je vous l'ai dit, son idiotie le perdra un jour... Alors que tous les couples autour d'eux mangeaient à tout hasard une crêpe, une glace, une gaufre ou que sais-je d'autre, les voilà à deux, assis à une table en terrasse, attendant un unique et singulier - de par sa petite taille - plat de délicieuses pâtes farfalles au pesto... malheureusement loin de l'idéal d'un dîner italien romantique. Le serveur leur apporte donc cette assiette dans laquelle les trois pâtes se battent en duel. Et dire qu'il a commandé ça pour 15.90€ - voyons, il est tant pigeon qu'idiot, bien que les deux soient liés. Revenons-en à notre problème initial. Une bataille de regard se lance entre les deux. Le romantisme de Théo ayant disparu au profit de son estomac qui le commandait maintenant. Il avait besoin de manger son plat de pâtes, et lorsqu'ils se jetèrent en même temps sur cette assiette si petite qu'on croyait que la pointe de leurs fourchettes allait la détruire, le gérant du restaurant arrive vers la table, ce qui fit sursauter le couple. Il les fixe pendant une longue minute. Un silence gênant, pesant, gênant, pesant, gênant, pesant et surtout monotone et répété et monotone et répété. Il ouvrit la bouche pour hurler aux deux jeunes :

"Vous avez pas vu la chatte à Mireille ?"

Ils se regardent, comme pour essayer d'appréhender une situation qui les dépasse - je vous disais bien que les PNJ déclenchent des quêtes secrètes !

"Je crois que je l'ai laissée filer toute à l'heure quand je faisais pas gaffe, elle a dû passer par la terrasse

-Euh... bah on a rien vu, répondit Anne, interloquée

-On était super occupés à bouffer notre plat aussi, ajouta Théo en souriant

-Pas vraiment romantique tout ça

-Faut dire que je suis pas gâtée avec ça", ria la jeune femme en pointant Théo

Ils reprirent leur délicieux repas, cette fois-ci en ayant soigneusement séparé : une pâte et demi chacun. Puis, soudainement, une larmichouille de pesto vient se loger sur la pommette d'Anne. Théo prit un instant pour considérer la chance qu'il avait pour qu'une situation qui ressemblait en tout point à une oeuvre de japanimation arrive. Comme cette scène où la fille a un morceau de riz sur le coin de la bouche. Oui, évidemment, il le fera d'une manière sexy, mignonne, qui fera de toute évidence craquer la pauvre Anne, anéantir le peu de honte qu'elle avait pour lui pour finalement le considérer comme son divin chevalier servant. Il se lève, en approchant en slow motion le pesto délicatement posé sur sa peau de pêche. Tout se passe si lentement qu'on peut voir la surprise dans les yeux d'Anne. Mais les geste si peu assurés de notre comparse tant aimé l'ont complètement fait rater le pesto, au profit d'aller caresser, de sa serviette immaculée, le sourcil de sa douce. Elle ne put réagir qu'avec stupeur et tremblement. Elle se retint de lui hurler dessus.

Ils quittèrent, mains dans les poches, le resto. Après avoir déambulé pendant 38 minutes dans les rues de la ville. Ils s'abandonnèrent. Non sans une pointe de regret.

OupsiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant