Au clair de la lune

Une rencontre

Plus elle montait et plus la boule ronde et lumineuse au-dessus de sa tête grandissait. L'eau devenait aussi de plus en plus chaude, bientôt presque aussi chaude que dans sa bulle. A quelques centimètres de la surface elle s'arrêta, la gorge serrée et l'estomac noué. Ça y est, c'était le moment. Depuis toujours, elle s'était posé cette question et elle allait bientôt avoir la réponse. Qu'allait-elle bien trouver au-dessus de la surface ? Elle regarda une derrière fois en bas, on ne pouvait à présent plus voir le fond et encore moins la petite trappe par laquelle elle était passé pour venir jusqu'ici. Elle prit une grande inspiration et donna un grand coup de nageoire vers le bas.

Aussi étrange que cela puisse paraitre, elle n'eut aucune difficulté à passer pour dessus le voile brillant qu'elle avait au-dessus de la tête quelques secondes auparavant. Une sensation très particulière l'envahie, elle sentait quelque chose de frais lui caresser les jours mais ce n'était pas de l'eau, elle se sentait bien plus lourde que d'habitude et ses cheveux qui, d'habitude dansaient tout autour d'elle telles des algues vertes, étaient collés à son visage et le long de son cou, retombant lourdement sur ses épaules nues. Elle décida alors d'ouvrir les yeux. Et ce qu'elle découvrit, jamais elle n'aurait pu l'imaginer, un paysage merveilleux, c'était l'autre côté du voile, il scintillant tout autour d'elle sous les rayons éclatants du soleil.

Alors qu'elle commençait à manquer d'oxygène et replongea et ouvrit grand la bouche pour laisser entrer le plus d'eau possible pour enfin ressortir par ses branchies. Plus légère, elle sentie ses cheveux virevolter comme à leur habitude tout autour d'elle. Elle était rayonnante de bonheur. Enfin, elle avait vu de ses propres yeux la beauté du monde du dessus. Il fallait qu'elle y retourne, elle ne pouvait s'en empêcher.

Dans un second élan, elle redonna un grand coup de nageoire et repassa à travers le voile. Encore une fois, ses cheveux se collèrent le long de son visage, de son cou jusqu'aux épaules. Elle put, une nouvelle fois, admirer la beauté de ce monde. Au-delà des grandes étendues d'eau qui se trouvaient autour d'elle, elle distingua une très grande forêt rempli d'une végétation qui lui était inconnue. Très différents des forêts d'algues ou de lianes qu'elle connaissait, ces végétaux avait un aspect plus solide, plus dur, ils avaient l'air bien ancrés dans le sol noir. Tout en haut de ces troncs plantés dans ce qui semblait vu d'ici, un sable plus dense que celui qui tapissait le fond du lac, se trouvaient des feuilles vertes qui dansaient comme si elles étaient entrainées par une sorte de courant. Bien que ce courant fût très différent que celui dans lequel elle avait l'habitude de nager. Il était frais, il lui caressait les joues encore humides où des gouttes s'étaient formées ici et là.

Pendant qu'elle contemplait la beauté qu'elle avait sous les yeux, sans même s'en rendre compte, ce même courant frais entra par son nez et par sa bouche. C'était agréable. Aussi agréable que de contempler cet étrange plafond bleu clair qui se trouvait au-dessus d'elle. On aurait dit un autre voile comme lorsqu'elle se trouvait dans l'eau, bien que celui-ci paraissait bien moins mobile et beaucoup plus lointain.

Après quelques minutes, toujours en train d'admirez cette mystérieuse forêt, elle se rendit compte qu'elle n'était pas redescendue pour reprendre son souffle depuis un certain temps et que ça ne lui avait posé aucun problème. Ce n'est pas de l'eau, s'était-elle dit, mais je peux quand même respirer. Ça aurait pu l'effrayer, la rendre nerveuse, mais tout au contraire, ça l'emplit de joie.

Alors qu'elle dansait sur elle-même, provoquant des vaguelettes au-dessus de l'eau habituellement lisse, elle s'arrêta net. Devant ses yeux couleur caramel se trouvait un très grand château qui ressemblait à s'y méprendre au palais de son père qui se trouvait tout au fond du lac. Il était, lui aussi, très imposant mais l'architecture était très différente que dans celui dans lequel elle habitait. Au pied de ce grand château bâti de pierres grises, se trouvait une grande étendue d'algue finement coupée, du moins, c'est ce qui lui semblait vu d'ici. C'est là qu'elle le remarqua, quelque chose de vraiment très étrange, un peu plus loin vers la gauche. A la limite entre la verdure et la surface de l'eau, se trouvait quelque chose. Quelque chose ou bien quelqu'un. Elle n'était pas sûre de ce qu'elle voyait. Elle décida alors de s'approcher un peu plus près mais, n'étant pas totalement inconsciente, elle replongea dans l'eau et nagea en direction du bord de l'eau. Elle prit le soin de contourner un peu par la gauche pour éviter de se faire voir en arrivant directement face de celui ou celle qu'elle avait cru voir.