Prologue

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Au commencement, nul humain ne foulait la Terre. Seuls existaient six êtres quasi-divins.

Le Sîmorgh, Maître de la Vérité, avait en horreur le mensonge. Créature ailée d'immenses dimensions, il pouvait réduire en cendres jusqu'aux aux os et aux pierres de son souffle enflammé, son esprit clairvoyant le guidant.

L'Abrasax, Maître des Enfers et du Monde Souterrain, tentait de concilier bien et mal en son âme si bien qu'il avait les yeux d'un démon et le sourire d'un ange. Lorsqu'il décidait de s'abattre sur la Terre, c'était en légion qu'il sortait, effrayant jusqu'au soleil de ses ailes noires rayées de rouges.

Le Phénix, Maître de la Vie, était capable de guérir de tous les maux même les plus mortels si l'on touchait assez son âme pour en extraire une larme. D'une grande intelligence comme d'une sévérité sans faille, très peu étaient ceux qui l'avaient vu renaître de ses cendres, y compris parmi les Bêtes Mystiques.

Le Léviathan, Maître des Océans très colérique, pouvait transformer les eaux glacées en un lac bouillant et traitait le fer comme de la paille. Il avait à l'origine une femelle, vivant avec lui dans le Grand Détroit, mais ce qui lui arriva fut volontairement oublié des Hommes.

L'Ouroboros, Maître de la Connaissance, était le gardien le plus savant de ce monde. Aussi redoutable que sage, il demeurait caché dans la grande bibliothèque des Monts de la Connaissance, interdisant l'accès aux âmes qu'il jugeait impures. Capables de lire le passé et le présent comme le futur, on raconte qu'il serait doté de la parole.

Le Catoblépas, sixième et dernière Bête Mystique, Maître du Coeur et des Sentiments, pouvait être considéré comme la plus insignifiante tout comme la plus mortelle des Bêtes Mystiques. Immense taureau taciturne et mélancolique, sa propre existence était pour lui, le plus grand fardeau, si bien que jamais il ne relevait la tête. Il serait d'extrêmement bon conseil si son regard ne tuait pas ni son souffle ne transformait en pierre.


À l'origine, donc, ces six Bêtes Mystiques, êtres quasi-divins capables de détruire le monde en un cycle solaire, se retrouvèrent bien seules et bien bêtes. Nul autre être vivant pour les distraire, nulle autre âme pour transmettre leur savoir.

Alors, grâce au feu du Sîmorgh, à l'argile de l'Abrasax, aux larmes du Phénix, à la force du Léviathan, à la connaissance de l'Ouroboros et au cœur du Catoblépas, ils conçurent les premiers êtres vivants. Parmi eux se trouvaient l'Homme. Et ils trouvèrent leurs créations si belles, qu'ils en firent milles autres : oiseaux, poissons, mammifères, créatures... Puis ils s'arrêtèrent et observèrent.

Durant milles ans, les êtres vivants créés par les Bêtes Mystiques vécurent en paix avec elles. Puis l'Homme, l'orgueil gonflé par ses connaissances, décida qu'il était temps pour lui de voir de nouveaux horizons. Il voulut traverser le Grand Détroit, gardé par le Léviathan et sa femelle, et se rendre dans les Terres Inconnues qu'avaient réservées les Bêtes Mystiques pour d'autres projets, en attendant de voir la manière dont évolueraient les premiers rayons de vie.

Ceci marqua le début de la Grande Catastrophe. Refusant qu'ils accèdent aux Terres Inconnues, le Léviathan se mit en colère. Mais cet énervement ne fut pas comparable à la fureur qui le prit lorsque dix bateaux encerclèrent sa femelle et la tuèrent. Sa rage fut telle qu'elle réveilla les cinq autre Bêtes Mystiques.

L'Abrasax sortit alors du Monde Souterrain et s'abattit sur le monde avec ses légions de démons.

Le Sîmorgh brûla les villages et les forêts, détruisant les vies qui les trahissaient.

L'Ouroboros creusa la Terre, décrivant des failles de milles kilomètres dans le sol et propulsant les âmes dans les Enfers.

Le Catoblépas, las, souffla sur le monde et transforma tous ceux qui le respiraient en pierre.

Le Léviathan souleva les eaux bouillonnantes, noyant ou brûlant les villages côtiers de tsunamis.

Puis enfin, lorsque leur rage se calma, le Phénix vint voir les âmes innocentes et les raviva d'une larme, accordant le salut à ceux qui n'avaient jamais rien fait que vivre en paix, laissant néanmoins dans le cœur des survivants la peur de leur colère.

L'Homme apprit de cette apocalypse qu'ils ne devraient plus jamais énerver les Bêtes Mystiques ou leur race disparaîtrait dans la journée.


Trois milles ans après ces incidents, l'Homme avait tout oublié de la Genèse et de comment les Bêtes Mystiques les avaient créés. Ne restait dans leur âme que cette certitude : ne jamais provoquer leur courroux. C'est à cette époque que naquit l'Assemblée puis le Conseil des Royaumes.

Notre histoire ne commença que quelques centaines d'années plus tard.

Leïa et les AilésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant