Décroche moi la Lune (auto éditer le 4 novembre)

Chapitre 1

Je crois que j'ai toujours aimé les soirs d'hiver, ceux éclairés par la pleine lune lors desquels quelques flocons commencent à danser au gré du vent. J'ai pris cette habitude, en rentrant le soir du travail, de me poser quelques instants sur un banc public et de regarder cet astre céleste. Me perdant dans mes rêveries, celles où je m'imagine dans un tout autre monde, loin de tous mes tracas du quotidien. Puis je me lève et rentre chez moi, en remettant mon écharpe autour de mon cou.

Dans mon minuscule appartement, je me retrouve dans cette solitude apaisante. Je suis un homme seul, célibataire, et je n'ai clairement aucun atout pour moi. Je me trouve d'une banalité affligeante, le nombre de mes conquêtes est là pour le prouver, au nombre de zéro. Peut-être que j'aurais pu plaire aux femmes, or, ce ne sont pas elles qui m'attirent, mais bien les hommes. Cela est sûrement la raison de mon célibat, mais aussi de ma vie d'ermite et de geek.

La première chose que je fais après m'être débarrassé de mes vêtements, me retrouvant alors en caleçon, c'est de m'installer devant mon ordinateur et de lancer le dernier jeu à la mode en ligne. Je ne prends même pas la peine de me concocter un repas, je n'ai jamais faim, après le travail. Enfin, je me nourris du paquet de chips abandonné la veille, elles sont un peu ramollies, mais je ne m'en inquiète même pas. Je n'ai pas beaucoup de temps pour me préparer à manger, de toute manière, je dois partir en raid avec mon groupe de joueurs.

— Hey, salut, LouGa ! me lance mon coéquipier dans mon casque connecté.

— Salut Artima, alors, on se le tombe, ce boss, ce soir ? lui lancé-je de bon cœur.

Rapidement, tout le groupe se connecte en vocal, et nous pouvons commencer notre partie. Ce n'est que vers cinq heures du matin que je daigne enfin quitter mon écran. Je n'ai pas vu l'heure passer et je dois dormir un peu avant de reprendre le travail dans six heures. Me jetant dans mon lit, je ne mets pas longtemps à ronfler, me réveillant seulement à dix heures trente.

Panique à bord, si je ne me dépêche pas, je risque d'être encore en retard. Pas le temps de prendre de douche, je remets les vêtements de la veille et me brosse à peine les dents avant de sortir à toute vitesse. Je manque de me vautrer devant l'immeuble à cause de la neige déjà piétinée par les passants. Courant comme si ma vie en dépendait, j'arrive à onze heures pile devant la librairie. Pas une librairie de bouquins, mais une boutique spécialisée dans la BD, les mangas et la culture geek. J'ai trouvé mon job de rêve, mon patron arrive en même temps que moi. En voyant ma tête, il explose de rire.

— Tu as encore geeké toute la nuit, toi ?

— Quoi ? Ça se voit tant que ça ?

— Tu as encore la marque de l'oreiller sur la figure et tu ne t'es clairement pas coiffé, me lance-t-il, amusé, en ouvrant la porte de la boutique. Tu devrais penser à prendre un peu plus soin de toi, une jolie minette pourrait remarquer tes jolis yeux bleus derrière cette tignasse emmêlée.

Je lâche un grognement, mes yeux bleus, je n'ai que ça de potable chez moi. Une tignasse noire que je n'arrive pas à dompter, même avec du gel, un corps frêle et très peu musclé, et un goût déplorable pour la mode. Je suis le parfait cliché du geek, et je n'ai pas fait exprès de cultiver cette apparence. Balançant la tête en arrière pour essayer de chasser les mèches trop rebelles, je prends un air à moitié boudeur avant d'entrer après mon patron, matant son cul au passage.

Il est, comment dire, mon opposé complet. Le genre de mecs qui passe son temps libre dans les salles de sport, avec des abdos presque inhumains, des cheveux blonds parfaits et des dents dignes d'une pub. Je n'arrive pas à comprendre qu'un mec pareil tienne un magasin pour geeks comme celui-ci. Je l'aurais plus vu coach sportif ou vendeur d'aspirateurs en porte à porte. Il est atrocement canon, mon genre de mecs, mais le genre de mecs hétéro complètement inaccessible pour un geek aussi mal foutu que moi. Alors je me contente de le mater dès que je le peux, tout en gardant mes penchants pour moi.