1-Après la pluie, l'arc-en-ciel.

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« Dieu n'est ni illusion, ni réalité, Dieu est un symbole mythique. »

Paul Diel

1-Après la pluie, l'arc-en-ciel.

Quelque part dans le ciel, trente jours après le déluge...

Le diable fit son apparition dans l'antre du tout-puissant. Oui, diable, c'est bien comme ça qu'on l'appelle depuis peu. C'est que la gloire, ça ne dure que le moment d'un pet et l'odeur qui va avec, le temps qu'elle s'évapore. Avant il était appelé « Ange de lumière », on courbait l'échine devant lui. Tout les autres anges tremblaient devant sa face, mais voilà que maintenant, l'un d'eux, celui-là même qui le vénérait le plus, l'annonça aux portes avec dédain :

- Seigneur tout-puissant ! Il y a le diable, le vilain, le tentateur qui demande audience.

- Mais quel culot ! Dis ce dernier, tu as bien la mémoire courte ! Moi qui jadis fus ton maître, celui par le biais duquel tu recevais tes ordres. Fais gaffe ! Ton créateur est un maître jaloux et d'humeur changeant, le jour où il se passera de toi, je verrai bien ta tête. Fanfaron ! Va !

L'ange, pour toute réponse, lui fit qu'une moue, et sortit de la pièce, laissant les deux protagonistes régler leurs différents. Sans se donner la peine d'user des formules diplomatiques, l'orgueilleux, doublé d'un effronté alla droit au but :

- Tu ne penses pas que tu exagères là ? Ça fait plus de trente jours quand même !

Le maître des lieux ne répondit rien à son interlocuteur le diable, en effet, on était déjà à un mois depuis que les eaux avaient recouvert la surface de la terre. Avoir des branchies était devenu depuis la tendance à la mode, tout comme avoir le luxe de posséder un bidon d'oxygène sur terre en l'an deux mille cent-soixante. Seuls les animaux marins se pavanaient sereinement et faisaient le fier. Partout sur terre on n'entendait plus rien que les bruits sourds des orages, le craquement plaintif des planches, en rang serré, de l'arche qui tenait tant bien que mal, ainsi que les soupirs des occupants de cette prison flottant sur l'eau. En diapason, la furie de cette pluie accompagnée de vents impétueux offrait un concert infernal dans ce vide inondé. Le diable en avait marre, n'ayant plus personne à qui parler, au pire taquiner, s'ennuyait. Cette solitude le troubla tellement, qu'il prit la décision de se rendre auprès de celui qui était à juste titre, le responsable de tout ça. Après tout, n'est-il pas à l'origine de tout ? Donc, il se rendit auprès de celui qui était responsable de tous ses maux.

- Alors, tu ne veux rien dire pour ta défense ? Tu ne penses pas que ta décision est la plus grosse connerie qui soit ?

À ces mots, son hôte s'enflamma, comme la détonation de l'explosion à l'origine du farfelu bing bang :

- Mais bon sang ! Pour qui tu te prends ? Un peu de respect pour...

Il n'en avait pas fini de parler que le diable l'interrompit :

- Du respect pour mon créateur ? Et bien oui, justement. Un créateur qui semble s'ennuyer de sa création, comme un enfant gâté qui, ayant fini de bâtir un château de sable, plante son pied en plein dedans, anéantissant ainsi l'œuvre de ses mains.

- Explique-toi fanfaron ! Toi qui crois détenir toute logique.

- Que je m'explique ? N'est-ce pas toi qui a l'illusion de tout connaitre ? Qui anticipe sur toutes choses ? Tu connais d'avance chacun des mots que je vais placer. À quoi bon ?

- « Mais si ! » - Il dut croire que diable lui avait fait une fleur, alors il continua – Sauf que je veux te donner la chance de t'exprimer, c'est ça la liberté d'expression. Je suis du genre à accorder le libre arbitre à mes créatures.

- Libre arbitre ? Voyez-vous ça ! N'est-ce pas que tu deviens démocrate maintenant ? pfff ! La bonne blague ! Laisse-moi rire un peu. Toi qui n'admets point d'autre rival devant ta face ?... Bon ! Admettons ! Mais n'est-ce pas à cause de ce même concept de « libre-arbitre » qu'ils sont submergés à présent ? Parce qu'ils m'ont choisi moi au lieu de toi ?

- Halte-là ! Ne confond pas tout mécréant ! Où étais-tu donc quand je créais la terre et tout ce qui s'y trouve ? Ils paient pour leurs ingratitudes, le salaire du péché c'est la mort.

- Tiens ! Tiens ! La mort, encore une autre connerie, tu tues une multitude de gens, mais tu épargnes quelques-uns qui vont se multiplier et qu'ensuite je vais me mettre à séduire à nouveau. Ce sera la nouvelle génération deux-point-zéro des corruptibles, ça je te le promets ! la crême de la crême. Tu n'as encore rien vu de semblable. Alors, va-t-on donc passer l'éternité à jouer à ce jeu débile ? comme deux gamins ?

Le diable venait tout juste de pousser le bouchon un petit peu trop loin. Son ironie n'avait point de bornes, alors, s'étant fâché, le créateur chassa son invité indésirable. Voulant éviter de lui frapper, après tout, il fallait bien qu'il donne le bon ton à ses anges qui assistaient de loin, en catimini à la scène, il mit un violent coup de pied bien placé dans un coin du ciel. Ceci déclencha une pagaille monstre, une explosion de couleur, de là est né l'arc-en-ciel.

Par-delà ciel et mirageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant