La voisine

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     Ce matin, un type un peu paumé est venu me voir au commissariat pour me parler d'une affaire plutôt étrange. En tant que bon flic je l'ai écouté mais je pressentais que la question allait vite être réglée. Je me trompais bien évidement sur toute la ligne.

    

     - C'était aux alentours de 23h.... commença-t-il.

     Et oui, il fallait bien que cela soit tard dans la nuit, sinon ce n'était pas drôle. J'appuyais mon coude sur mon genoux, et le fixais attentivement.

     - J'étais sur le point d'aller me coucher, lorsque j'ai entendu que l'on toquait à ma porte. J'ai ouvert, et j'ai vu une jeune femme d'à peine trente ans, enroulée dans un châle, qui m'a demandé  si elle pouvait passer la nuit chez moi.

     Il était bien vêtu, convenablement. Pourtant il était très mal rasé, et ses vêtement étaient tachés. Sans doute un homme gagnant juste de quoi survivre, et encore.

     - J'ai acceptée évidement, elle n'avait pas l'air bien du tout, comment pouvais je refuser ?

     - Bon, soufflais-je, coupez court, que s'est-il passé ? Elle vous a volé ? Agressé ?

     - Mais pas du tout ! s'emporta-t-il. Une jeune femme aussi exemplaire ! Voyons !

     - Bon bon...

     Il avait les yeux tombants de fatigue et se grattait les ongles, signe de nervosité. Il me faisait un peu de peine, alors je n'osais plus l'interrompre.

     - Le lendemain, elle avait disparu ! Envolée, volatilisée ! La couverture que je lui avait donné était pliée sur le canapé, et il n'y avait aucune trace de son passage, comme si elle n'était jamais venue.

     Je brûlais d'envie de lui dire que ce n'était donc sûrement qu'un rêve, s'il n'y avait pas eu la suite :

     - Le soir suivant, elle est revenue. Cette fois, je n'ai pas pu m'empêcher de lui demander ce qui n'allait pas, et pourquoi tenait elle absolument à dormir ici, car elle avait des bleus et du sang sur tout le corps. Elle m'a dit que son mari la battait. J'ai résisté à l'envie d'appeler immédiatement la police, mais elle semblait gênée et il était minuit passé. Elle a à nouveau dormi, et a disparu, ce matin encore. Je n'ai pas hésité une seule seconde à venir vous en parler.

     - Très bien, dis-je d'un ton qui se voulait un peu plus sérieux, nom de la victime, âge, profession, domicile ?

     - Je n'ai pas pu tirer beaucoup d'information la concernant. Je peux vous dire qu'elle avait de longs cheveux blonds et raides, des yeux noirs, environ vingt cinq ans, et son nom... son nom s'était... Ah oui ! Marianne PAUL !

     Je fronçais les sourcils.

     - Vous faites erreur monsieur.

     - Ah bon ? A propos de quoi ?

     - Je vous dis que vous faites erreur, dites à la jeune femme de venir elle même au commissariat.

     - Mais je ne comprend pas !

     Il me tapait sur les nerfs :

     - Mais parce que Marianne PAUL est décédée il y a un an sous les coups de son mari ! Elle est enterrée au cimetière. Vous vous êtes trompé de personne.

      Exaspéré, je lui mis sous le nez une photo de la jeune femme en question.

     - L'affaire n'avait pas trop été ébruitée, je ne vois pas comment vous auriez pu en entendre parler en plus.

     L'homme était pensif. Il inspectait chaque traits du visage de la jeune femme sur mon téléphone. Il mit un moment à répondre. Mais finalement, sûr de lui, il déclara :

     - C'est elle.

     Et tandis qu'ils continuaient de parler, ils ne remarquèrent pas qu'une ombre blanche au longs cheveux blonds lui retombant devant les yeux s'était installée dans un coin de la pièce et les regardait, l'air timide.

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