2

3.9K 179 1
                                    

C'était Brook. Avant même de savoir ce qu'elle me voulait encore, une sorte de liquide blanc coula sur mon visage. Un yaourt à la fraise, selon l'odeur. Je courus immédiatement au toilette avant que le yaourt ne fasse des dégâts sur mon sweat. J'ai bien dû frotter une quinzaine de minutes avant qu'il ne reste aucune trace. Je croisais mon regard dans le miroir. Le temps sembla se stopper quelques instants. Je suis seule avec moi même. Je suis seule face à celle que j'étais, je suis seule face à cette gamine de 17 ans qui se déteste, je suis seule face à cette fille oubliée. L'espace de deux secondes, tout ce travail effectué sur moi cet été disparut, et je suis redevenu l'ombre que j'étais auparavant. Je souffle. Je dois reprendre les choses en mains. Le temps repris son cours et la pause se termina. Je sortis en trombe des toilettes et me dirigea droit vers Brook. Je n'ai pas de yaourt à portée de main, mais mon petit doigt me dit que le tube de gouache qui devait me servir pour mon cours d'art cet après midi sera plus efficace. Je déversais le contenu sur elle me plus rapidement possible.

- Tu t'es attaqué à la mauvaise personne. 

Je peux sentir mon sang battre dans mes tempes. Mon coeur bat la chamade. Je ne vois plus rien au tour de moi mise à part mon ancien bourreau. Sans perdre une seconde de plus, je me dirigeai vers ma salle de classe. La journée se termina sans accroc mais surtout sans Lober.


La télé résonne jusque l'extérieur. Je peux presque imaginer ce qu'il se passe. Mon frère à la fâcheuse habitude de toujours mettre le volume à fond. Je ne pris pas la peine de lui demander de baisser et montai directement dans ma chambre. J'eus à peine le temps de me changer que mon téléphone sonna. 

- Allô ? 

- Salut Silver, alors ce premier jour ? 

Je souris. 

- Plutôt bien. J'ai hâte de te voir à Noel pour tout te raconter de vive voix. 

J'entendis son léger à l'autre bout du fil. 

- Moi aussi. Tu me manques beaucoup. On se voit vite. 

Je souris une fois de plus avant de raccrocher. Je me laissais tombé sur mon lit, serrant mon téléphone sur ma poitrine. Je ne suis plus qu'une potiche comme les autres quand Nathan me parle. Je ne vaux pas mieux que toutes ses filles en extase devant Matt.

 

Une nouvelle journée commence, et me voici face à mon casier. Je fredonne et tape du pied en rythme avec ma musique. Contrairement à celui de ma voisine, mon casier est sobre. Aucune photos, aucun autocollant, juste un dessin au feutre que j'avais fait l'an dernier. C'est un loup. Il me fait penser à mon frère, c'est une façon pour moi de l'avoir auprès de moi pour me protéger. Mademoiselle Dwight est mon enseignante préférée. Elle n'est pas comme les autres, pour commencer elle n'a pas plus de vingt-cinq ans, peut être vingt-six. Elle nous enseigne l'histoire. Elle est passionnée par ce qu'elle fait, et elle m'a beaucoup aidé l'an dernier. C'est sûrement la seule adulte qui a été compréhensive et affectueuse envers moi. Je lui doit beaucoup. Je m'assieds donc au premier rang, ravie de la retrouver. Seulement, lorsque je vis Brook, obligée, s'asseoir à côté de moi, mon enchantement de retrouver Madame Dwight disparût. La première demie heure se passa relativement bien, si l'on met de côté les coups de pieds, les injures à voix basses et les rires de ma voisine. Seulement, au bout de quarante-cinq minutes ça devenait trop compliqué. Je demandai à Madame Dwight si je pouvais aller prendre l'air, elle accepta. 

 Une fois en dehors de la classe je me laissai glisser le long des casiers dans un renfoncement en béton bleu turquoise. Cette odeur de javel persiste. Je respirais profondément avant de brancher mes écouteurs. Je cliquai instinctivement sur ma chanson favorite et ferma les yeux quelques secondes. Tout s'envola. J'étais seule au monde. Rien n'avait la moindre importance à part moi et ce solo de guitare. Tout me semblait tellement loin. Ce petit bout de paradis ne dura pas longtemps, quelques minutes tout au plus se sont écoulées avant qu'une silhouette ne se dessina devant moi. J'ouvris les yeux. 

- Qu'est-ce que tu veux ? lançai-je d'un ton sec.

- Pourquoi t'es pas en cours, je croyais que "Madame Je-Sais-Tout" était trop bien pour se faire virer d'une salle de classe ? 

- Je ne me suis pas faite virer, je suis bien plus intelligente que ça. Je suis bien plus intelligente que toi. 

- C'est assez séduisant ton petit côté rebelle je dois dire, mais me parler sur ce ton ne sera pas sans conséquences. 

- Que le jeu commence Lober.

Je me levai précipitamment avec un air hautain. Son léger sourire narquois me donnerait presque des envies de meurtres. Pressée de retourner dans mon monde à moi, je m'allongeai sur le même banc qu'hier, musique en route. Le soleil qui s'immisce entre les arbres me rappelle cet été. J'étais seule, assise sur la plage, le soleil se frayant un chemin entre les nuages. Je lisais, je me sentais libre. Je m'apprêtais à connaître le nom du meurtrier quand un jeune homme vint s'asseoir à côté de moi. Instinctivement je sortis le nez de mon livre pour observer cet homme bizarre. Il était grand, blond, et semblait tout à fait charmant. Il s'est allongé sur sa serviette et nous avons parlé pendant des heures. Le lendemain, nous avons recommencé, et cela pendant presque un mois et demi. Dès qu'un rayon de soleil arrive jusqu'à moi, c'est comme si c'était lui qui était là.

The Games Are Starting. •TOME 1•Où les histoires vivent. Découvrez maintenant