Va au Diable

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Des petits coups sourds vinrent réveiller Lucie qui émergea difficilement de ses songes. Elle se sentait vaseuse et ne se rappelait pas quand ni comment elle avait rejoint son lit. Tout ce qu'elle savait c'est qu'elle avait dormi comme une masse. La porte de sa chambre s'ouvrit lentement sur le petit Elfide rose qu'elle avait aperçu en compagnie d'Etharion dans son bureau. Il était chargé d'un plateau sur lequel se trouvait un petit déjeuner plutôt copieux : des céréales, un café, des toasts et une orange. Lucie eut une impression de déjà vu.

— Oh, c'est pour moi ? Je vous remercie.

— Le maître a dit que vous ne vous étiez pas levée, que vous deviez avoir faim.

L'Elfide parlait clairement d'une douce voix cristalline, sans gène ou fioritures, il maîtrisait, contrairement à Enaf, sa langue.

— Il m'a aussi chargé de vous dire que votre ami était réveillé.

— Mon ami ? Jack ?

— Oui je crois que c'est le nom qu'il a employé.

Lucie voulut sortir du lit, mais l'Elfide s'y opposa.

— Vous devez d'abord manger. Le maître a été catégorique !

— Et vous faites toujours ce que vous dit le maître bien sûr...

— Oui toujours.

L'Elfide fixait Lucie avec suspicion et méfiance. Dès qu'elle la regardait, elle ne pouvait s'empêcher de plisser les yeux et retrousser son petit nez pointu.

— Vous n'avez pas l'air d'apprécier ma présence.

Lucie buvait son café tout en faisant la constatation.

— Je n'ai pas à juger.

— Mais cela se voit bien.

L'Elfide grogna avant de concéder.

— Le maître est trop bon avec vous. Maintenant, manger !

Sans attendre de réponse, l'Elfide quitta la place en claquant la porte derrière elle. Lucie ne se laissa pas déconcerter pour autant, si on ne l'aimait pas, tant pis, ce n'était pas son problème. Elle dévora rapidement le contenu du plateau, elle avait faim, mais son envie de retrouver Jack était encore plus forte. Quand elle arriva dans le salon, elle ne vit personne. Elle ne savait pas où se trouvait l'infirmerie ni où elle était autorisée à circuler.

Elle poussa une première porte au hasard et tomba sur une pièce sombre aux rideaux fermés. Le mouvement de la porte avait soulevé une imposante volute de poussière qui la fit tousser à plusieurs reprises. Personne n'avait vraisemblablement mis les pieds ici depuis longtemps. Lucie rebroussa chemin et se dirigea vers une autre aile du château.

À cet instant, Lucie se rendit compte à quel point la bâtisse était immense. Elle commença à désespérer et ce dit qu'elle ferait tout aussi bien de hurler afin d'attirer quelqu'un pour lui indiquer la bonne direction, mais si cette personne était Etharion ? Elle l'imaginait déjà se faire remettre en place par une réplique cinglante la comparant à un goret qu'on égorgerait.

« Non merci très peu pour moi ».

Heureusement pour Lucie, elle entendit des aboiements semblant venir du jardin. Elle se hâta de les rejoindre et trouva Jack et Enaf en train de jouer joyeusement sur la pelouse. Ykar, un peu à l'écart, les surveillait.

— Jack, mon beau !

Le chien se précipita vers Lucie lui léchant facétieusement le visage.

— Si c'est le côté baveux et poilu qui te fait kiffer, tu sais qu'on a moyen de s'arranger !

Lucie leva les yeux au ciel, mais ne dit rien, elle commençait à comprendre l'humour de Ykar.

Les portails disparusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant