Excuse-moi, je viens de chanceler droit dans ton jardin, je regardais les arbres qui s'amusaient sans moi et suis tombé comme Thales dans le puit qui arrose tes coquelicots. La profondeur n'est que le miroir du vertige, je n'étais que poète et ne voyait qu'à l'envers ! Tomber pour avoir aimé le ciel ! Peut-être que le puit n'est qu'une lunette astronomique braqué sur le sommeil de la lune ! L'oxygène y est rare, certes, mais la surface du monde est là sous mes pas, et chacun dans son puit,seul avec son écho compose des poëmes. Mais on raconte que certains puits sont mitoyens comme celui de Miette et de Silvère chez Zola, on y est seul à deux, et malgré le mur qui les sépare, on y est bien. On s'aime dans le reflet et ne parle qu'en vers.
Et on y jette des bouteilles à la mer : Je m'excuse de n'être pas revenu plus tôt. On est mélancolique du bonheur. Ah, quelle chance que chanceler, c'est déjà danser à moitié !
T'ai-je déjà parlé de mon amour pour les pavots bleus ?
C'est normal, ces fleurs n'existent pas. Pourtant, je crois que ces fleurs d'evidence dans les puits. Les myosotis soupirent "Ne m'oubliez pas", et elles "Je ne t'oublie pas".
Et on demeure auprès du bonheur, on écoute la mélodie vivre blotti dans la margelle. L'on a des fleurs aphones dans la cervelle, et des racines dans les yeux. Voilà, j'habite dans la longue-vue et ne vois que le ciel. Et je suis heureux dans mon refuge de pierre et dans l'immense éternité des puits.
Aussi, est ce pour cela qu'on écrit des poèmes ?
NB : Je sais bien, ne revenir que tardivement, et peut-être tard est-il toujours trop tard. Je suis bien navré de ne répondre que maintenant, aussi t'ai-je laissé un message ici et ailleurs. En espérant pouvoir te parler, et en attendant dans un jardin ouvert sur le monde et que balaye tranquille une brise.