Le calme plat régnait à bord. Les ondulations régulières berçaient Michel, adossé au mât de misaine, qui profitait des premières lueurs de l'aube parcourant l'horizon. Les jambes étendues sur le plancher du Mélinée, la goélette aux trois mâts, le jeune garçon accueillait avec bonheur la fraicheur de la matinée. La journée de la veille avait été écrasante, et la nuit tout aussi chaude. La brise qui s'échouait sur les avant-bras de Michel semblait s'y fondre.
Les matelots étaient tous endormis dans les cabines. La mer était douce, complice des aquarelles pâles, bleues et violettes, qu'arboraient le ciel pour saluer l'arrivée prochaine du soleil. Elle laissait entendre de petits clapotis alors que la proue fendait la surface, formant des nuages d'écume. S'approchant du bastingage, Michel s'y assit, face à l'étendue bleue, en glissant ses pieds entre les barrières de bois et en posant sa tête sur la rambarde. Il fermait les yeux. Les ronflements de ses camarades étaient perceptibles si on tendait l'oreille. Les instants de répit étaient rares et dignes d'être savourés, alors le blondinet en profitait, les pieds éclaboussés par les remous capricieux créés dans le sillon de la coque. Le son léger d'un froissement de vêtements indiqua au jeune marin que quelqu'un s'approchait à pas de loup.