Peu après le jour de mes 9 ans, j'avais appris que ma mère était malade. Une tumeur. J'avais passé d'interminables heures à la bibliothèque pour me renseigner sur cette maladie. Je n'avais pas vraiment compris d'où elle venait, mais j'avais néanmoins assimilé une chose : les chances de guérison était faible. En parcourant un des ouvrages traitant sur ce sujet, j'avais lu que la tumeur qu'avait maman entraînait des sautes d'humeur. J'avais naïvement pensé que c'était à cause de cela qu'elle était si distante et parfois violente. Elle ne le voulait peut-être pas vraiment. Aucun parent ne peut haïr son enfant naturellement.
Le stade de la tumeur n'était pas vraiment avancé. Les médecins qu'on avait rencontrés quelques jours plus tôt nous avaient annoncé qu'une chimiothérapie était possible, mais très fatigante. En outre, mon père devrait s'occuper de moi. Je n'en avais aucune envie. Il m'effrayait. Il empestait l'alcool, s'énervait sans raison valable. Je le craignais plus que tout. Je me souviens qu'il hurlait souvent après Mary, mais elle n'hésitait pas à lui tenir tête. Il finissait toujours par se calmer et s'excuser. Parce qu'il l'aimait. C'était sa fille chérie, il ne pouvait lui faire du mal. J'aurai aimé qu'il en soit autant pour moi.
Un vendredi neigeux de janvier, alors que j'étais en classe, le directeur de l'école était venu me chercher, et m'avait emmenée dans son bureau. La psychologue de l'établissement était assise sur un des sièges de cuir. Il m'invita à prendre place en face de lui. Une fois qu'il fut installé, il joignit ses mains sur un dossier, et posa son regard sur moi.
« Margo, nous allons parler d'un sujet délicat. Je te demanderai de répondre franchement, tu ne crains rien, déclara-t-il d'une voix qui se voulait chaleureuse.
- D'accord. Je vous écoute, dis-je d'une voix faible.
- Ta maîtresse a remarqué des bleus sur tes bras. Tu aurais affirmé que tu te cognais régulièrement, en raison de ta maladresse. C'est la vérité ? Questionna le directeur.
- Rien ne sortira de ce bureau, sois-en certaine, affirma la psychologue.
- Oui, c'est la vérité, balbutiai-je.
- Margo, tu es sûre ? »Demanda la psychologue ;
Une larme roula le long de ma joue. Je serrai mes poings, tentant vainement de refouler le flot de sanglots qui était prêt à s'échapper. Je savais que je devais dire le vérité, mais j'avais peur.
- Ce sont mes parents... déclarai-je dans un murmure à peine perceptible.
- Ils te frappent ? Demanda la psychologue, comme si la réponse n'était pas évidente.
- Oui. »
Je pleurai silencieusement, honteuse. Je n'avais rien à me reprocher, mais je m'en voulais, et j'étais morte de peur. Je ne savais ni quoi dire, ni quoi faire. La psychologue s'approcha de moi, et pressa une main manucurée sur ma maigre épaule. Après une dizaine de minutes, je réussis enfin à me calmer. Après m'être rafraîchie, j'étais remontée dans ma classe. Quand l'heure de la pause fut venue, Jared s'approcha de moi, et prit ma main. Après quelques secondes, il me sourit tendrement, et demanda :
« Pourquoi il est venu te chercher ?
- Pour rien de grave.
- Tu es sûre ? Tu as l'air fatiguée.
- Oui, je suis sûre.
- On peut rester ensemble ? »
Je hochai la tête, puis lâcha sa main. Une fois dans la cour, nous nous installâmes sur un banc en bois. Il me questionna sur les jeux auxquels j'aimais jouer. Il me déclara également qu'il adorait lire. Nous avions énormément de points communs. Il était différent des autres. Il ne me jugeait pas, et semblait même m'apprécier. Il ne parlait pas sans cesse de football comme les garçons de notre classe. C'était à ce moment là qu'une complicité, peut-être éphémère, enfantine, s'était installée entre nous. Il était devenu mon ami .
A la fin de la journée, alors que j'attendais le bus qui me conduisait chez moi, Jared me rejoignit. Nous habitions encore à cette époque dans le même quartier. Nous restâmes silencieux, comme si nous ne nous étions jamais parlés. Parce que je n'avais plus aucune envie de dire quoi que ce soit. J'allais revoir mes parents. La soirée allait encore être atroce. Comme toujours.
Quand j'arrivai enfin devant notre maison, mes parents m'attendaient sur le porche. C'était mauvais signe. L'entretien avec le directeur me revenait en mémoire. Quand le bus fut assez éloigné, mon père se précipita vers moi, et me poussa à l'intérieur. Il me hurla qu'il allait me tuer, que je ne méritais que ça. Il me rua de coups. Je regrettai amèrement de ne pas avoir esquivé les questions que l'on m'avait posées. Je ne pleurai pas, j'étais en boule contre le mur de l'entrée. Ma mère regardait la scène, les yeux absents. Je protégeai mon visage de mes bras, tandis qu'il assénait de violents coups de pieds dans mon ventre, et dans mes jambes. Quand il décida enfin d'arrêter, je n'osai bouger. Ma mère s'approcha de moi, et me releva. Elle murmura «Excuse ton père. Il est vraiment énervé. Et il a raison. ». Je montai difficilement dans ma chambre, et m'allongeai dans mon lit. J'avais mal partout. Fort heureusement, c'était le week-end. Je l'avais passé enfermée dans ma chambre.
Le mercredi, quelqu'un était venu. Une assistante sociale. Elle avait posé des tas de questions à mes parents et à moi. Nous avions affirmé que je n'étais pas frappée ici. J'avais dit que des hommes qui sentaient mauvais m'attendaient chaque soir à la sortie de l'école, et qu'ils me frappaient, parce que j'étais différente. Je savais que j'aurai du tout avouer, pour aller vivre ailleurs, dans un endroit où je serai en sécurité, où je pourrai grandir comme une petite fille normale.
Mais j'avais menti. Malgré cela, mes parents ne s'arrêteraient jamais. Mon quotidien allait être semé de coups, de souffrance, de hurlements, j'en étais persuadée.
Le chapitre 3 sera plus long. J'ai besoin d'un maximum d'avis alors n'hésitez pas !
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Une enfance brisée
Teen Fiction《 Ne négligez pas votre enfance. Celle-ci sera la base de votre vie. Elle n'est en aucun cas sans importance. 》 Une mort qui changea tout. Rien ne sera jamais pareil pour Margo. Une vie difficile, des parents qui la haïssent, des camarades qui se mo...