des souvenirs gravés dans le sable

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Novembre 2020


Dans la main de Seokjin, les clés sont lourdes et froides. On ne dirait même pas des clés. On dirait de vieilles reliques, un bijou de famille rouillé dont on a oublié l'importance. On dirait un de ces objets qui, jadis, devait servir à quelque chose, mais dont l'autre moitié a disparu, le privant de son utilité. Des pièces sans monnaie. Des pendentifs sans chaîne. Des clés sans serrure.

Ces clés ont bien une serrure, et une utilité. Simplement, on ne dirait pas, car Seokjin se rend compte qu'il les a rarement utilisées, lui-même. Sans parler du fait qu'aujourd'hui, les clés magnétiques sont bien plus courantes.

Il a déjà longuement temporisé, à se distraire et divaguer vers des pensées de ce genre. Mais les clés sont bien dans sa main, et cette fois, c'est à lui de les utiliser. Alors, prudemment, il en glisse une dans la serrure, tourne, et la porte s'ouvre.

Aussi simple que ça.

Il prend une inspiration, fait un pas dans le noir de la maison, frappé par l'odeur entêtante de moquette et de vieux bois. Il sent qu'il étouffera s'il n'ouvre pas une fenêtre, alors il le fait, et laisse entrer ainsi le frais de l'air marin, et la pâle lumière matinale.


Et puis, il fait le tour de la Maison d'Été des Kim. À pas lents et attentifs, il vérifie le séjour et son sofa fatigué ; la cuisine où sa grand-mère lui a appris à cuisiner, ses placards grinçants, la table où elle leur servait plus de cacao qu'ils n'avaient de sang dans leurs veines. Il jette un œil dans la salle de bain, ses tiroirs vides, une pièce où, sans surprise, tout est à sa place et parfaitement nettoyé. Il finit par les chambres d'ami, où les lits sont faits et les armoires vidées, comme attendant que des enfants débarquent et défassent leurs valises, impatients de s'installer, de courir vers l'océan, de remplir leurs poumons de son air pur.

Dans la Maison, il ne trouve pas grand-chose d'inattendu ou déplacé. L'important a déjà été rangé et pleuré, des mois plus tôt. Elle est d'un vide sinistre - comme si Seokjin venait de l'acheter, prête-à-emménager. Impersonnelle. Morte.

C'est donc étrange, d'être là, de revoir cet endroit ainsi après tant d'années. C'est triste, de voir la coquille vide d'un lieu qui, autrefois, débordait d'amour.


Mais lorsque Seokjin s'assoit sur le lit qui était le sien il y a longtemps, lorsqu'il s'allonge et regarde le plafond, il sourit soudain.

Il est encore là, collé sur une des lattes de bois. Un sticker Pororo, seul, incongru. Seokjin ne se souvient même pas d'où il vient, pourquoi il est encore là, ou comment ils avaient réussi à le coller là-haut sans se casser une jambe. Ce dont il se souvient est combien ils avaient ri, les semaines suivantes, à chaque fois qu'ils voyaient ce pingouin absurde au-dessus de leurs têtes.

des souvenirs gravés dans le sable • namjinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant