Recueil : Les poésie et sonnets d'amour (1803)
Je t'aime, mais hélas ! n'ose te le dire ;
Je t'aime, ô toi que je crains de nommer !
Si dans mes yeux du moins tu voulais lire
Ce que ma voix redoute d'exprimer !
Un trouble heureux m'agite et m'inquiète
Quand par hasard ma main touche ta main ;
Le cœur me bat ; ma rougeur indiscrète
Trahit l'ardeur qui dévore mon sein.Si quelquefois ta bouche enchanteresse
À demi-voix soupire un air flatteur,
Dieux, quels transports ! quelle brûlante ivresse
Avec tes chants coule jusqu'à mon cœur !Est-ce pour moi que ton âme attendrie
Aime à former ces accords languissants,
Ces sons si doux, dont la belle harmonie
Ravit, enivre, embrase tous mes sens ?Quel est celui dont l'image chérie
Vient quelquefois frapper ton souvenir,
Pour qui ta douce et tendre rêverie
Laisse en secret échapper un soupir ?Assez heureux pour ne point te déplaire
Si mon amour peut suffire à tes vœux,
Si tu me vois à tes pieds sans colère
Faible mortel, j'égalerai les dieux.Peut-être, hélas ! ton oreille s'offense
D'un aveu tendre exprimé sans détours ;
Si tu voulais deviner mon silence,
Je promettrais de me taire toujours.
Constant Dubos