Le 15 décembre 2020
La flamme était suffisamment proche de la tige, pour l'éclairer et légèrement noircir son extrémité. La lumière du briquet caressait cette cordelette, ce qui finit par allumer la bougie. Mélane en éloigna rapidement ses doigts, de peur de se brûler. Elle venait d'allumer la quatrième bougie de l'Avent. Celle du dernier dimanche avant Noël. Tout le monde avait fait un effort pour ce jour et était allé à la messe. Tous excepté Robert, qui n'y allait plus depuis le décès de son épouse et préférait rester à l'appartement.
Le logement était assez grand pour les accueillir, ils avaient tous leur propre chambre et assez d'espace pour se retrouver dans le séjour. L'isolement était quelque chose de fréquent à leur âge, ne souhaitant pas souffrir de celui-ci, ils avaient tous voulu faire partie de ce projet. Pour certains, le plus difficile avait été de se séparer de leurs biens. Ceux qui les avaient accompagnés toute leur vie, parfois même ayant appartenu à d'autres avant eux, comme certains meubles avaient été offerts par leurs propres parents ou grands-parents. Les histoires et souvenirs attachés à ces objets étaient tout ce qui leur restait de leur vie passée. Seule Martine était détachée de ces éléments. Grande voyageuse, elle avait eu l'habitude de passer de demeure en demeure, sans porter d'attention particulière aux objets de son quotidien. Cependant, tout le monde comprenait le déchirement de laisser derrière soi l'héritage d'une vie. Heureusement, chacun avait pu ramener quelques-uns de leurs meubles, pour décorer leur chambre et pour habiller le salon. Au vu de la période de fêtes, cette grande pièce avait d'ailleurs été décorée avec beaucoup de grâce et de délicatesse par Anne-Lyse, la doyenne de la colocation. Celle-ci avait toujours eu un don pour ces choses-là. Sa mère, avant elle, était déjà très douée, Anne-Lyse aimait avoir ce passe-temps qui la rapprochait du souvenir de sa défunte mère. Elle avait passé du temps à créer des décorations, malgré la douleur de ses doigts marqués par l'arthrose. A son âge, elle préférait continuer à faire ce qu'elle aimait, plutôt que de préserver des doigts qui ne lui serviraient plus dans quelques années. Le résultat de son travail était plus que satisfaisant, chacun avait sa chaussette avec son nom brodé. Elles étaient disposées côte à côte sur le mur, symbole de l'harmonie qu'il existait entre ces quatre retraités. Le sapin n'était pas grand, à vrai dire il était plus haut que les un mètre quarante trois de Mélane, mais plus petit que le reste des locataires. Décoré de rouge et d'argent, il trônait dans l'angle de la pièce, auprès des chaussettes personnalisées. Anne-Lyse avait, cette année, réalisé des guirlandes en branche de sapin. Heureusement, son petit-fils Lucas était passé au début du mois pour les poser aux sommets des fenêtres. En effet, personne ne souhaitait monter sur un escabeau, depuis la chute fatale de l'ancien locataire, désormais remplacé par Martine. De ces magnifiques parures, l'appartement était bien plus chaleureux, ce qui allait les aider à passer un hiver qui s'annonçait plus froid que les précédents.
Ce n'était pas encore le réveillon, mais ce dimanche était le seul durant lequel ils pouvaient s'échanger leur cadeau tous ensemble. Cette année, ils avaient essayé de faire un jeu qui leur reviendrait à tous moins cher, offrir un cadeau pour une personne piochée au hasard le mois précédent. En effet, chacun touchait soit une retraite, soit une pension, mais les fêtes avaient tendance à les ruiner. Lorsque Mélane avait proposé l'idée, tout le monde avait naturellement accepté. Installé dans son fauteuil préféré, Robert lisait un article du journal. Celui-ci faisait référence à un marché de Noël, non loin de leur demeure. Habituellement les commerces étaient fermés le dimanche, mais à l'approche des fêtes, les commerçants avaient eu l'autorisation de rester ouverts. Robert, n'ayant toujours pas acheté le cadeau pour Anne-Lyse, car il avait pioché son nom, regarda sa montre pour réaliser qu'il ne lui restait qu'une heure et demie pour s'en procurer un. Cet homme avait toujours été un fervent adepte de la procrastination, il avait gardé cette habitude qu'il vantait être un trait de personnalité. Néanmoins, cette particularité le faisait agir dans la précipitation, en ce dimanche, il allait encore être sur le fil pour trouver un cadeau.
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Textes
RandomVous trouverez dans cet ouvrage les textes qu'il m'arrive d'écrire. Issus de pitchs, pour des concours ou encore juste pour le plaisir. J'essaie de mettre dans les titres des chapitres des éléments clairs sur leur contenu.