La vie rêvée d'une Fleur tome 1 Éclosion

chapitre 9

IX. Puisque je vous dis la vérité, croyez-moi !

 

Au bout d'une heure enfin, Mr Bradley revient avec mon café et un petit sachet à l'odeur alléchante. Des croissants ! Je me demande où il a pu en trouver ici. Son ami Frenchie ne doit pas y être étranger. Il manque de lâcher son sac quand il voit la manière dont j'ai de porter son survêtement. Il est mignon et un peu naïf quand-même. Il a étudié mon corps nu sous toutes les coutures pendant des jours et dans toutes les postures possibles et le voilà à rougir dès que je provoque un peu de sensualité. Si le simple fait d'ouvrir une veste suffit pour le déstabiliser, que va-t-il faire quand je vais commencer mon récit ? Il s'installe en face de moi, prend un morceau de croissant et le trempe dans son café. Il grimace. Le café doit être à mon goût.

"- Alors, dîtes-moi, mademoiselle Dante, qu'est-ce qui vous pousse à me parler maintenant ? Dix jours que je vous questionne dans relâche et je sais que j'ai à peine entamé votre résistance, vous auriez pu jouer encore longtemps avec mes nerfs, je connais les femmes comme vous."

  Il connaît les femmes comme moi ? Cela m'étonnerait beaucoup même si je comprends ce qu'il veut dire. Entre deux bouchées de cet excellent croissant, je finis par lui dire :

"- Le téléphone, c'est interdit...

- Comment ça ? m'interrompt-il déjà. Quand est-ce interdit et qui a établi cette règle ?

- Vous n'êtes jamais à court de questions ? J'en ai une pour vous : qui êtes-vous ?

- Je vous l'ai déjà dit, mon nom est Finn Bradley, je suis agent analyste pour la NSA."

  J'avoue que j'ai encore quelques doutes. Je préfère continuer à l'interroger :

"- Mr Bradley, rassurez-moi sur un point, nous ne sommes quand-même pas dans les locaux fédéraux ? Bien que délicieuse, votre méthode d'interrogatoire n'est pas légale. Alors où sommes-nous ?

- Actuellement, nous sommes dans mon refuge. Personne ne le connaît. Je vous attendais."

  Cette révélation me déplaît car elle soulève plus de questions que de réponses. Drake n'a pas pu passer à côté de ça. Il ne peut en être que l'instigateur mais alors, quel est son but ? Hélas, l'agent Bradley ne me laisse pas le temps de réfléchir à mes questions, il préfère me poser les siennes :

"- Qu'est-ce qui vous pousse à vouloir me raconter votre histoire ?

- Vous n'êtes pas une mission habituelle, lui répondis-je. Jamais une des missions que Drake m'a confié n'a duré aussi longtemps. De plus, il déteste les smartphones donc le fait que vous puissiez en utiliser un est un autre indice. De plus, Drake ne peut ignorer que je me trouve ici, en votre compagnie. Pas avec ce dont il est capable. Tout ceci me fait dire qu'il vous a choisi, je ne sais pas pourquoi vous en particulier, pour entendre notre histoire si peu commune.

- Avant de commencer, dîtes-moi, Mlle Dante, ce fameux Drake, c'est le colosse qui vous accompagne sur quelques photos ?

- Oui, Drake dans toute sa splendeur ! ironisé-je. Ne faîtes pas cette tête, il peut se montrer charmant, à ses heures.

- Quand-même, il est difficile pour lui de passer inaperçu. Je pense être assez doué dans mon domaine. Avec les moyens de surveillance que j'ai mis en place, il n'aurait pas pu approcher du bâtiment à moins de cinquante mètres sans que je le sache...

- Croyez-moi sur un point, agent Bradley, préféré-je l'interrompre. Il n'y a aucun moyen pour vous d'empêcher Drake de faire quoique ce soit. Si je suis encore ici, c'est son choix, pas le vôtre et encore moins le mien. Maintenant, si vous le voulez bien, j'aimerais commencer mon long et riche récit. Laissez-vous guider par mon histoire inédite et passionnante qu'aucun scénariste hollywoodien n'a jamais écrite."

  C'est à son tour de m'interrompre et d'ironiser. Je ne sais pas ce qui me retient de le bâillonner.

"- Longue et riche ! Je vous donne à peine vingt-cinq ans. De plus, vu le caractère hautement sexuel de vos missions, vous devez avoir tout au plus sept ans de missions à me raconter à moins que vous ne me disiez comment votre vie vous a amené à votre étrange métier."

  Son étroitesse d'esprit m'offusque. A quel moment ai-je parler d'une quelconque transaction d'argent pour les missions que me confient Drake ? Ne serais-je qu'une prostituée aux yeux de mon geôlier ? Certes, je tire beaucoup d'avantages avec cette association mais mon argent provient de mes nombreuses entreprises à travers le monde. J'ai beau lui expliquer tout cela, il n'en reste pas moins dubitatif.

"- Pour tout vous dire, finis-je par lui avouer, je suis née en 1537, j'approche bientôt mes cinq-cents printemps."

  Oh le pauvre ! Il en avale sa gorgée d'eau de travers, le café étant vraiment trop corsé à son goût. Je me demande où il a pu trouver un café d'une telle qualit
é. Il faut que je pense à le lui demander.

"- Comment pouvez-vous penser que je vais vous croire sans preuve ? Ce que vous me dîtes est impossible."

  Je crois que j'ai manqué l'occasion de lui demander pour le café. Tant pis, nous verrons cela plus tard.

"- Je savais que vous alliez avoir du mal à me croire mais c'est pourtant la stricte vérité. Et je suis convaincue que si je suis encore ici, c'est pour raconter notre histoire si singulière et pourtant si belle."

  Cette fois, j'ai toute son attention. Il me regarde fixement et finit par acquiescer.