Rise.

Chapitre 5 - Long voyage

Yu Jie avait beau se concentrer du mieux qu'il pouvait, la seule chose qu'il pouvait voir était la noirceur de l'obscurité. Son corps était comme paralysé, lié aux ténèbres elles-mêmes. La peur l'envahit, pensant qu'il était mort, et déjà en enfer. Il voulut crier, mais il ne le put.

Comme une lueur au fond du désespoir, une gigantesque paire d'yeux s'est ouverte, et la faible lumière qu'elle dégageait illuminait les écailles se trouvant aux alentours. La créature draconique était juste devant lui, et il ne pouvait rien faire.

"... Humain... Toi qui as troublé mon repos éternel, ton sort aurait déjà dû être scellé dans la pierre depuis bien longtemps. Mais tu as de la chance, je ne te tuerai pas. Du moins, pas pour l'instant..."

Yu Jie était abasourdi, trop de choses se passaient en même temps, et il n'arrivait pas à tout encaisser. "Qu'est-ce qu'il se passe ? Serais-je en train de rêver ? Je ne suis vraiment pas mort de l'attaque d'une telle bête magique, et qui parle en plus ?"

"Il y a une chose en toi qui est spéciale... Je ne sais pas encore ce que c'est, c'est enfoui au plus profond de ton être, et ça brille très fort... À sa mort, mon Maître m'a ordonné de trouver quelqu'un de digne, et cette chose qui brille en toi est la chose la plus belle qui m'ait été donnée de trouver ici-bas... Humain, soit témoin de l'engrenage de la vie, du cycle éternel du Samsara. Si tu arrives à sortir du Labyrinthe aux Cent Réalités, alors que fortune soit tienne. Bonne chance..."

Yu Jie comprenait de moins en moins ce que le dragon racontait. "Qu'est-ce qu'il dit ? Le cycle du Samsara... Mon grand-père m'en avait déjà parlé, c'est le cycle de la réincarnation de tout être vivant. Pourquoi est-ce qu'il m'en parlAAAAAAAAAAAAAAAAaaaaaaaa...."

Noir. Vide. Vide. Noir.

Clic, clac. Les engrenages se mettent en marche. Le théâtre s'anime, la scène prend forme, les décors prennent vie, le monde est façonné.

Un restaurant animé dans la capitale de l'Empire Immortal Phoenix. Yu Jie se trouvait à une table éloignée de toute agitation mondaine. Il regarda autour de lui, ne comprenant pas vraiment ce qu'il faisait là. "J'étais avec le dragon il y a quelques instants, et maintenant... J'ai cette sensation bizarre de déjà-vu, comme si j'étais déjà venu ici..."

Il fut extirpé de ces pensées par un rire angélique qui venait de la table d'en face. Ça y est, il le savait maintenant ! Cette sensation de déjà-vu, ce n'était pas par rapport à l'endroit, mais c'était cette femme !

À la table d'en face se trouvait la jeune dame au rire d'ange et trois hommes, habillés comme des militaires. Le plus âgé prit la parole, inquiété par le comportement de la demoiselle. "Mademoiselle Han Mei, votre père nous a demandé de ne pas nous faire remarquer si nous sortions en ville. Rire de la sorte n'est pas approprié pour une personne de votre rang."

La jeune dame appelée Han Mei semblait contrariée par ses mots. "Oncle Gu, je veux juste m'amuser, je ne vois pas ce que je fais de mal !"

Mei, Mei, Mei. Mei ! Non, ça ne pouvait pas être... ! Le corps de Yu Jie tremblait constamment, son cœur s'emballant comme jamais auparavant. "Elle a le même prénom, la même voix qui me berçait quand j'étais petit, le même visage réconfortant. Han Mei,Yu Mei... Maman !"

Au même moment, le restaurant disparut, laissant place, à nouveau, aux ténèbres. Les clients, les tables,... Tous se sont envolés. Sauf elle. Yu Mei restait en face de son fils, le fixant avec un doux sourire. "Yu Jie, ça faisait si longtemps..."

Les larmes ne pouvaient s'arrêter de couler sur les joues du jeune homme. "Ma... Maman... C'est vraiment toi ?"

La femme se leva et vint enlacer tendrement son fils. "Oui, c'est moi, et je ne partirai plus cette fois-ci. Je te le promets. Tu veux bien rester avec moi ?"

Après tout ce qu'il venait de vivre, Yu Jie ne savait plus à quoi se raccrocher. Il ne savait distinguer le vrai du faux. "Après tout, on s'en fout. J'en peux plus, je veux juste la serrer très fort contre moi, être en sécurité..."

Alors qu'il s'abandonnait corps et âme à celle qui lui a donné la vie, cherchant un semblant de réconfort, elle disparut sans laisser de trace, le laissant dans la froideur de la solitude, une seconde fois.

Noir. Vide. Vide. Noir.

Clic, clac. Les engrenages se mettent en marche. Le théâtre s'anime, la scène prend forme, les décors prennent vie, le monde est façonné, une deuxième fois.

Puis une troisième fois.

Une quatrième fois.

Une dixième fois.

Une centième fois.

1, 10, 100, 1000, 10 000, 100 000 ans... L'éternel cycle du Samsara était lancé, et Yu Jie en était prisonnier.

Li Tiancheng, le dragon d'ébène qui a causé tant de problèmes à Yu Jie, a observé toutes ses résurrections. Il l'a vu sombrer dans le Labyrinthe aux Cents Réalités, petit à petit.

Beaucoup auraient pu croire qu'il y resterait enfermé à tout jamais, mais Li Tiancheng savait que c'était faux. La chose qui se cachait en lui l'empêchait de sombrer, quoi qu'il arrive.

Après seulement 20 jours dans le monde réel, Yu Jie s'extirpa du Samsara. Ayant compris son essence, il l'a démantelé au fil de ses réincarnations, et a fini par en sortir.

"Seulement vingt jours... Il semblerait que je ne me sois pas trompé sur cet humain. Maître, je vous ai enfin trouvé un digne successeur... Jeune humain Yu Jie, tu oublieras tout ce que tu as vécu dans le Labyrinthe, et tu recevras l'héritage du Maître : son propre dantian, forgé avec les énergies les plus pures du Commencement. Le jour où l'on se reverra, un dragon parmi les hommes sera né. À bientôt, humain..."

Yu Jie se réveilla en sursaut, couvert de sueur froide. "Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il y a quelques secondes, Yu Tan a réveillé le dragon, et maintenant... ? On dirait que je suis toujours dans le nid, mais que le dragon n'est plus là... C'est ma chance ! Je ne sais pas quand il pourra revenir, alors je devrais partir au plus vite d'ici ! Yu Tan devrait être mort ou gravement blessé. Je ne pense pas qu'il puisse survivre à cette créature. Je ne sais pas comment cela se fait que je sois encore en vie, d'ailleurs..."

Il se mit à courir mais s'arrêta aussitôt, surpris par sa vitesse. "Comment se fait-il que je sois aussi rapide, je ne peux pas cult... Mon dantian ! Il... il est réparé !? Pas que ça, je suis aussi passé au cinquième ordre du Royaume antique élémentaire ! C-comment..."