« complainte au bord du nil »

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« Tout est sanglant au bord du Nil,
Les soldats ne cessent de combattre de villes en villes.
« Finie la belle époque ! » me lamentais-je, moi le vieux forgeron,
Tout n'est que désordre et abandon.

Dans le palais d'Alexandrie, la cour entière est en panique.
Cléopâtre se croit magnifique,
Mais le pays est ravagé depuis des jours, sans aide ni soutien,
La Reine, elle, ne fait rien.

Quand César et Cléopâtre se rencontrèrent,
Nous crûmes tous à l'avènement d'un immense empire
Où règnerait la paix, nous évitant le pire
Unissant par leur amour la terre entière.

Ces amours, hélas, ne furent que passagères : 
Quelques temps plus tard ils se détestèrent.
Le peuple ne comprit pas ce qui se passait,
Nous étions complètement désorientés.

Cette guerre nous plongea dans un profond désarroi 
Où le pouvoir de l'Égypte entière était en jeu.
De temple en temple, nous invoquions tous nos dieux !
Mais l'obstination de ces deux-là eut raison de notre foi.

Cléopâtre avait un proche messager, un homme de confiance,
Mais qui aurait pu croire
Que celui-ci avait donné sa préférence
Non pas à notre Reine, mais plutôt à César ?

Cela ne présageait rien de bon :
Le traitre s'approcha d'elle et la tua d'un coup de poignard
Lui chuchotant tout bas « de la part de César ».
Il repartit sans le moindre soupçon.

Quelle rage, quel désespoir !
Cléopâtre notre Reine vient d'être assassinée.
Son peuple tout entier
Pleure, se lamente et broie du noir.

A présent, César est le seul à pouvoir
Accéder à la tête de notre pays.
Nous pleurons notre Reine ; César, lui, rit.
Mais dans ses yeux, une pointe de tristesse peut s'apercevoir.

Le voilà qui s'installe à Alexandrie dans le royal Palais. 
Cependant il ne peut se résoudre à son méfait,
Sans cesse il est pris de terribles remords,
Ce qu'il voudrait vraiment : la voir encore.

Rome n'arrive plus à le distraire
Et l'Égypte lui est bien amère...
Comment de cette impasse se sortira-t-il ?
Par la mort ! On le retrouve noyé dans le Nil.

Devrais-je pleurer la mort de l'Empereur ?
Les meurtriers n'ont pas de place dans le cœur des forgerons.
Pour l'heure, je retourne à mes chaudrons
Et peu importe ce que sera notre malheur.

Adieu, César !
Rome est anéantie, Alexandrie s'affole,
La Gaule se rebelle et la Judée s'étiole...
Le monde désormais est aux mains des Barbares. »

                                                                                                       ─ [ C ]

𝐌𝐄𝐋𝐈𝐒𝐌𝐄 ; poetryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant