Hier, on s'est laissés tous les trois à regret, j'accroche beaucoup à mes deux oiseaux. Honnêtement, Loïs a réussi à sublimer mes dernières photos, et Violet m'a appris beaucoup de choses, alors c'est maintenant impossible que je me passe d'eux.
Je cherche le papier qui m'indiquera où je dois retrouver Loïs pour qu'il m'emmène jusqu'à l'endroit spécial. Ça y est ! Je l'ai trouvé mais... c'est incompréhensible. Ça ne m'étonne pas du rossignol.
Ça me fait penser.. Je ne sais pas depuis quand j'utilise des noms d'oiseaux pour parler des gens. Ça me vient de la boulangère, je crois. Cette phrase aurait suffi pour que Loïs éclate de rire. Comme je passais mon temps dans un coin de sa boutique, j'ai fini par m'apercevoir qu'elle avait cette habitude. Qui m'a emportée aussi.
Je suis dehors. Je marche sans grande conviction en suivant les indications du piaf le plus photogénique que je connaisse.
Et là, je bute contre quelqu'un. Quelle idiote ! Je dois être plus rouge qu'un coquelicot. J'essayer de m'éloigner le plus vite possible de cet endroit qui suinte mon malaise. Là, une main tire un coin de mon manteau. Violet ! Elle me dit : "Cours !"
Elle a l'air de s'amuser follement. Son sourire est énorme. Et on s'élance toutes les deux, s'éloignant de ce gêneur, ou plutôt de ce gêné. L'hirondelle attrape ma main, et m'entraîne à travers un chemin étroit et bossu. Quelque chose me dit qu'on va bientôt retrouver Loïs. Et là, je me rends compte de sa main dans la mienne...
Je la regarde. On s'arrête de courir, mais elle ne lâche pas ma main.
Elle me dit qu'elle aime tenir les mains car c'est plus fort, si ça ne me dérange pas. Bien sûr que non, ça ne me dérange pas. Je l'observe. Aujourd'hui, elle ne porte pas une robe mais un pantalon fait avec plein de pièces de tissus différents, et une veste bleue ornée de gros motifs de papillons, avec de grandes poches. Ça s'accorde vraiment bien.
Nous ne tardons pas à voir Loïs, de dos. Je l'appelle : "Rossignol !
Et il répond, en se retournant, l'air inquiet.
- Cyan ! Mais tu étais où ?
Vraiment ? Je vois un bout de larme au coin de son œil .
Alors je le prends dans mes bras.
- Tes indications étaient pourries, petit oiseau. On y va ?
Résigné, il retrouve sa bonne humeur en un rien de temps.
- Alors, annonce-t-il, on va vraiment pas beaucoup plus loin, suivez-moi !
Et il s'enfonce dans une haie. Disparu.
Violet rit et dit :
- Vas-y d'abord !
Alors je plonge. Je fais plusieurs pas entourée de branches et de feuilles, dans l'inconnu, et j'arrive à une clairière. J'attends Violet. Je sens encore sa chaleur au creux de ma main, qu'elle a lâchée pour me laisser avancer.
Elle arrive, avec une feuille dans les cheveux. J'hésite, puis je l'enlève délicatement.
Elle sourit.
- Merci.
Et on regarde autour de nous.
Loïs nous appelle, ...d'en haut ?
- C'est cet arbre-là ! nous guide-t-il.
Effectivement, sa voix nous as menés à un monsieur majestueux. Je distingue des attaches sur son énorme tronc, accompagnées d'une échelle de corde.
C'est fabuleux. Alors, je monte, et je vois.
Une petite marche se présente pour aider, menant à une cabane au toit ouvert, avec des fauteuils qui semblent confortables malgré leur grand âge, une table ronde, et surtout Loïs avec des jumelles, qui regarde vers le ciel. Ses yeux brillent. Je pense que les miens aussi.
- Donne moi ton avis, petite bête...
Je souris. Et je lui attrape la main, car c'est plus fort.
- C'est le plus chouette coin que j'ai jamais vu, lui dis-je.
Et il rit, fier.
Violet nous rejoint. Elle ouvre de grands yeux. Ils ont vraiment cette couleur singulière...
- Et devinez quoi ? J'ai tout prévu ! lance Loïs.
- Mais il nous manque rien là... le taquine l'hirondelle.
Ils se lancent des piques, et moi je vais vers la balustrade.
Je m'accoude, et j'observe. Je saisis mon appareil. Et je capture.
Rien n'est susceptible de me déranger. Sauf peut-être... la main de Violet qui se pose près de la mienne.
Ça va aller, Cyan, c'est seulement le soleil, sa chaleur qu'il te partage et qui te déstabilise.
Comme elle est là, j'en profite pour saisir l'hirondelle dans un instant.
Loïs m'appelle. Je me retourne, et je le vois faire remonter un panier en osier recouvert d'une nappe, à l'aide de cordages. Pas fichu de m'indiquer le chemin mais une merveille d'ingéniosité. Vraiment épatant, ce rossignol.