J'ai 18 ans, et bien loin de ce que vous penserez de mon jeune âge, je vivais à ma façon, me fichant franchement du point de vue des autres à mon sujet.
Je suis d'ici, d'Afrique et pourtant la vie que nous menions entre ses quatres murs de nos maisons, ne ressemble en rien à ce que l'on aurait pu croire de ce qu'on appelait autrefois Afrique, berceau de l'humanité, que je dirai avait finit par devenir le centre de toutes atrocités plus ou moins inconnues du monde extérieur. La violence était de mise, la loi du plus fort où il fallait, voler, et parfois même tuer. Phénomène auquel, le jour au jour nous étions tous confrontés dans cette petite ville turbulente.
Voyager en Occident pour des conditions de vie meilleures, était ce à quoi s'attelait bien les gens de ma ville au profit de s'adonner par tous les moyens possibles à l'immigration clandestine.
De mon côté, je n'arrivais toujours pas à digérer cette action de ma mère, à s'être donner le necessaire pour que je puisse partir pour les État-Unis. Elle avait certes nourri ce rêve de me voir partir un jour, mais sincèrement parlant, je ne croyais pas que cela risquerait d'arriver.
À vrai dire, la seule chose qui me passait en tête était de savoir comment elle s'y était prise pour mon passeport et le billet d'avion. Plusieurs idées ne cessaient de tourner en boucle dans ma tête. Comment avait-elle fait ?
Vu la misère dans laquelle nous avions vécus depuis pas mal d'années, avoir de quoi se nourrir, était le plus difficile à acquérir. S'était-elle livrée à la prostitution ? Elle qui, au sacrifice de sa vie donnerait tout pour voir un jour son unique fils réussir.
Non et non ! D'aussitôt, je me résigne à ne point me mettre cette idée en tête, car à bien connaître ma mère, je savais pertinemment que malgré notre pauvreté, ma mère était l'une de ces femmes africaines beaucoup trop croyantes à craindre le tout puissant. On croirait même que Jésus est un membre de leur famille.
Elle était belle, très belle, cette femme qui s'était donnée corps et âmes pour mon bien-être. J'étais son fils unique, j'ai toujours vécu avec elle, je n'ai jamais connu le connard qui avait servi de donneur de sperme. Je ne pouvais l'appeler père étant donné qu'il s'était barré une semaine après ma naissance, d'après ma mère. Elle ne voulait pas plonger dans les détails et cela ne m'intéressait nullement. En gros je m'en foutais de tout ou presque, tout ce que je voulais c'est le calme et mon lit, je n'avais presque pas de motivation.
Les démarches avaient été faites et maintenant, me voici après quelques semaines amères d'attentes ; j' y suis, posé pour la première fois dans le hall de l'aéroport à regarder des gens défiler à se précipiter dans tous les sens ; d'autres se livrant à des scènes d'adieu les larmes aux yeux ou même que pour des retrouvailles. Étrange à mon point de vue !
Dans deux heures environ, je serai précisément très loin d'ici, de ma mère. Elle avait pris soin de m'accompagner pour le dernier au-revoir. Comme par entendement, chose que j'ai dû constater, les africains avaient cette fâcheuse tendance à se pointer très tôt à l'aéroport pour une raison dont j'ignorais. Ce qui expliquerait la présence de ma mère qui me parlait depuis un bon moment, mais qui malheureusement à l'entendre sans l'écouter, mon regard fuyant le sien, ma pensée bien ailleurs, faisant plus ou moins exprès de ne pas prêter attention à ses dits. Quand elle eut constatée mon attitude, d'un petit cri, elle me sort de mes pensées.
- As tu entendu ce que je viens de dire ?
D'un ton distrait, je me retrouvais forcer à lui répondre.
- Tu disais ?
Visiblement, elle n'était guère surprise par le fait, que je réagisse ainsi face à ces propos. Elle savait très bien en ce moment, ce dont j'avais besoin. C'est-à-dire retrouver ma chambre et mon lit. Hélas, l'illusion parfaite. Chose qui était sûr de ne pas se reproduire, étant donné qu'elle allait me projeter dans un avion bientôt.
- Sois sage à New-York ! Reprit-elle.
Ce voyage ne paraît te plaire, mais j'espère que plus tard tu comprendras que c'était pour ton bie....- C'est bon maman ! J'ai déjà compris le message et d'ailleurs ce n'est pas comme si j'allais mettre le feu à leur foutu pays.
Cela parraissait fou, mais elle n'avait pas tord du tout. Je n'étais pour ce voyage ; car à bien y croire, je ne m'etais douté de rien lorsqu'elle m'obligeait à la suivre pour faire un tas de conneries de démarches et je ne jugeais pas utile de poser des questions, d'autant plus que je venais d'obtenir mon bac.
Dire que je commençais à m'ennuyer assis à ses côtés. Heureusement j'avais ce qu'il me fallait, mon remède fétiche. Au bout de quelques minutes, la musique en plein tympan, excès de volume avec "what you Know about love" de pop smoke qui jouait à travers de mes écouteurs que morphée vint m'emporter dans un sommeil à la fois lourd et inconfortable, bien sûrement parce que je n'étais pas dans mon lit...
Quelques Zzz plus tard, "flexing" de pop smoke me torturait les oreilles. Mes écouteurs furent retirer pour mieux saisir cette femme qui brisa mon sommeil en me secouant. C'était ma mère.
- C'est bientôt l'heure de s'envoler lève toi. Dit-elle en continuant de me secouer.
- C'est bon, je suis déjà réveillé.
J'avais du mal à ouvrir les yeux tellement que la lumière me semblait forte. Je sentais mon départ tout proche, je le savais par la façon dont ma mère me regardait. Elle semblait si faible comme si je partais droit en enfer. À la regarder, une envie soudaine s'empara de mon Être, à lui poser tout un tas de questions sur mon père. En la voyant si déstabilisée par l'idée de ne plus me voir si proche d'elle, me taire paraissait la meilleure option.
J'ignore encore totalement comment est-ce que, nous garderons contact une fois parti, vu que ma mère n'était pas de cette génération Android, Apple etc...
Elle n'avait qu'une merde à touche qui lui servait de téléphone. Franchement c'était la galère dans ma tête. Au contraire de toute attente joyeuse, je n'ai exprimé qu'un sentiment de morosité, à apprendre mon départ surprise.
- Comment ferons-nous pour se communiquer ? Je me décide enfin de rompre ce lourd silence.
- Ton téléphone risque d'être insuffisant au lieu du crédit pour me joindre à l'autre bout du monde.
Elle semblait être amuser par ce que je venais de dire. Ne pouvant s'empêcher, elle se mit à rigoler à vive éclat, comme si c'était la première blague qu'elle venait à écouter. Cette femme vêtu d'une robe en pagne à la peau marron clair aux cheveux noirs tirés en queue de cheval et soigneusement maquillée avec des ballerines qui ornaient ses pieds attira l'attention de tout le monde en rigolant un peu trop fort comme un porc.
- Je sais à quelle heure ton avion atterrira. Alors tache de m'appeler dès que possible. Dans le cas contraire, j'appellerais le campus. Dit-elle les yeux rouges à force d'avoir rigoler.
En terminant sa phrase, l'annonce venait de tomber, me signalant de quitter cette salle d'attente afin de me rendre je ne sais où... Si ce n'était pas là où la majorité des gens allaient. Dans une autre salle où seuls les passagers avaient accès. Je me lève et en me retournant, elle me saisit d'aussitôt par le bras. Les larmes ruisselaient sur ses joues et grande fut ma surprise.
Mais pourquoi pleure t-elle ? Que fera-t-elle en restant ici ?
- Je t'aime... Mon fils. Au milieu de quelques sanglots, elle articula ces mots ayant un goût étrange en moi avec peine.
Je ne savais quoi répondre alors je déglutit en lui adressant mon plus beau sourire et me retourna, bien décidé à aller vers l'avant, à laisser ma mère et tout... À laisser ma zone de confort. Je n'osais me retourner une dernière fois, car je risquerais de ne plus monter dans cet avion.